Logo

Le Musée du fer fait renaître une fête millénaire au bord de l’Orbe

22 août 2016 | Edition N°1811

Vallorbe – Les Vulcanales -un événement organisé pour la première fois le week-end dernier sur le site des Grandes Forges-, ont fait la part belle aux artistes passés maîtres dans le travail des métaux.

Emma Pietrzykowska travaille, comme sa soeur et son frère, aux Grandes Forges du Musée du Fer. Tous trois ont participé aux Vulcanales. ©Carole Alkabes

Emma Pietrzykowska travaille, comme sa soeur et son frère, aux Grandes Forges du Musée du Fer. Tous trois ont participé aux Vulcanales.

Un bruit métallique singulier et répétitif accueillait les visiteurs, hier au Musée du fer et du chemin de Vallorbe. La coupable ? «Agläe», l’araignée rose de Nicolas Coeytaux, adepte de «cigares de salades humides» selon son concepteur, et dont les claquements de mâchoire trahissaient l’appétit dévorant.

Placé dans le local moderne de l’institution, cet animal géant issu du bestiaire du sculpteur mécanique de La Praz incarne l’esprit des Vulcanales, dont c’était la première édition le week-end dernier. «Gérald Richard, ancien membre de la fondation du musée aujourd’hui décédé, avait émis l’idée d’organiser une manifestation sous ce nom. A l’origine, il aurait plutôt été question d’une fête médiévale, mais nous avons opté pour la présentation du travail du métal d’un point de vue artistique», explique Simon Leresche, conservateur et chef d’exploitation du Musée du fer et du chemin de fer.

La plupart des artistes ont participé à la réalisation d’un buste de Vulcain. ©Carole Alkabes

La plupart des artistes ont participé à la réalisation d’un buste de Vulcain.

Après avoir observé une sculpture en bronze d’Albert György, d’Ogens, on se rend au premier étage, où une forêt de boucliers d’Etienne Krähenbühl, de La Sarraz, trône. «On peut y voir des balles et des éclats d’obus. Cela illustre le paradoxe des armes offensives et défensives. Les boucliers n’ont pas seulement un rôle protecteur. Ils représentent des murs qui séparent les gens», commente Simon Leresche.

Cette oeuvre d’Albert György sera exposée jusqu’à cet automne. ©Carole Alkabes

Cette oeuvre d’Albert György sera exposée jusqu’à cet automne.

Les échos du travail des sœurs Emma et Amélie Pietrzykowska émanent de la forge Estoppey, alors que l’on enjambe le pont qui offre une vue privilégiée sur les roues à aubes en action sur notre droite. Ces «habituées du musée» font partie, tout comme leur frère David, du panel d’artistes de la région et de France voisine sélectionnés pour les Vulcanales. Les créations de la plupart d’entre eux ont été réunies sur une île au milieu de l’Orbe. «Nous avons décidé de profiter de ce cadre magnifique, au bord de l’eau, qui fait habituellement office de place de pique-nique», déclare Simon Leresche.

Diversité artistique

L’araignée «Agläe» donne un bon exemple de la créativité des artistes réunis sous l’égide des Vulcanales. ©Carole Alkabes

L’araignée «Agläe» donne un bon exemple de la créativité des artistes réunis sous l’égide des Vulcanales.

Une tente montée sur le site abrite des œuvres très diverses choisies pour montrer les nombreuses possibilités artistiques que laisse le métal aux ferronniers d’art, sculpteurs, bronziers et autres participants à l’événement. Des pièces de mobilier contemporain de Sébastien Cattin y côtoient, par exemple, une créature échappée du Seigneur des anneaux de Jean-Marie Corona. Plus loin, la forge médiévale de Marc Grélat et son équipe attire un nombre croissant de curieux. «Ces pièces étaient réalisées il y a 2000 ans», apprend-on en contemplant la réalisation d’un clou viking.

Le groupe Trio de poche a donné le premier concert dominical. ©Carole Alkabes

Le groupe Trio de poche a donné le premier concert dominical.

Derrière la cantine, où le groupe Trio de poche commence à distiller son «jazz vitaminé» -la programmation musicale de la manifestation a été confiée au Hessel Espace Culturel à Orbe-, d’autres artistes du métal se concertent avant de se mettre au travail. «Nous sommes en train de reproduire le logo des Grandes Forges -un buste de Vulcain», précise Elliot Coeytaux, qui s’est vu attribuer la conception d’un bras de la divinité. Satisfait de la démarche du musée, il promet d’être au rendez-vous l’année prochaine.

«Nous avons eu de très bons échos des visiteurs», affirme, pour sa part, Simon Leresche. «Il y a eu un peu moins de 300 personnes hier (ndlr : samedi) et on ne peut pas non plus parler de grande affluence aujourd’hui, mais je suis sûr que l’événement va bien fonctionner à l’avenir. Ce rendez-vous annuel, qui s’ajoute au Festival des couteliers, vient compléter notre offre», conclut-il.

Des sacrifices humains à l’époque romaine

Célébrées durant l’Antiquité, les Vulcanales étaient plus mouvementées que leur récupération vallorbière. «L’Encyclopédie d’Yverdon signale qu’à cette occasion, on brûlait une portion des victimes que l’on offrait sur des autels», relève l’historien Christian Schülé. La plupart des auteurs anciens indiquent toutefois que des animaux vivants jetés dans les flammes se substituaient aux humains pour attirer les faveurs de Vulcain, dieu du feu et du travail des métaux. Des courses avec des lampes et l’illumination nocturne des rues des villes sont d’autres anecdotes moins sanglantes liées à ces festivités dont le coup d’envoi était, semble-t-il, souvent donné le 23 août. Selon une source, «les Vulcanales ont été fondées à Préneste, l’actuelle Palestrina, à l’est de Rome, par Ceculus, le fils de Vulcain. Des veaux roux et des véras étaient offerts à son père», conclut Christian Schülé.

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Ludovic Pillonel