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2024: «Une année de m…»
Le comité de Vitiplus réuni dans la grande salle de Rances. De g. à dr.: Anthony Mottaz, Lucie Loeffel, Alexandre Taillefer, Axel Jaquerod (secrétaire), Frédéric Blanc (président) et Vincent Chappuis (vice-président).

2024: «Une année de m…»

7 février 2025 | Textes: Robin Badoux | Photos: Gabriel Lado
Edition N°3887

L’association Vitiplus, section vaudoise de Vitiswiss, Fédération suisse pour le développement d’une vitiviniculture durable, a tenu son assemblée générale mercredi à Rances. L’occasion de faire le point sur l’année écoulée, qui a laissé un goût amer sur le palais des viticulteurs.

Difficile pour certains viticulteurs de mettre de l’eau dans leurs vins après une année 2024 plus que maussade. Leur ressentiment était presque palpable mercredi dernier lors de l’assemblée générale de Vitiplus, qui rassemble les professionnels de la vigne adeptes de la production intégrée.

Années maudites

«2024, une année dont le dernier chiffre est quatre, présage avéré d’une année compliquée, à l’instar de 2014 avec la drosophila suzukii, 1994 avec le blocage de maturité ou 1984 avec la pourriture. 2024 n’a pas échappé à la règle. C’était une année de m… Dame Nature ne nous a pas épargnés et le monde viticole n’a pas pu souffler une minute», a lâché Frédéric Blanc, président de Vitiplus devant un parterre de viticulteurs du canton, rassemblés dans la grande salle de Rances.

Depuis mi-avril 2024, gel, grêle, maladies et pluies sont en effet venus altérer la qualité de la vigne. «Des campagnes d’arrachage de vignes se mettent en place dans un pays voisin (ndlr: En France, avec des campagnes d’arrachage sanitaire pour lutter contre les maladies) et on parle de déconsommation des vins plutôt que de baisse de consommation», a continué le président, ajoutant espérer de meilleures conditions pour l’année à venir.

Si la météo pluvieuse a rendu compliqué le travail dans la vigne pour les producteurs, elle a également impacté les comportements des consommateurs. «La pluie durant le printemps n’a pas incité les gens à sortir sur les terrasses et à prendre le temps de déguster du vin», remarque Frédéric Blanc.

Outre les aléas de la météo, la question des produits phytosanitaires a été évoquée. C’est notamment la réduction de la liste des produits phytos qui inquiète. «Dans certaines cultures, comme dans la vigne, l’arrivée d’un nouveau ravageur devient problématique, voire sans solutions. Trouver la bonne matière active en tenant compte de toutes les restrictions d’utilisation demande bientôt plus de temps que le traitement lui-même», remarque le président Frédéric Blanc.

Pour couronner le tableau, les viticulteurs ont pointé du doigt l’ensemble «des mesures techno-administratives inextricables continuellement sorties du chapeau fédéral», pesant lourdement sur les activités de la branche.

De l’espoir pour l’avenir

Malgré les difficultés, les viticulteurs restent confiants. Le raisin récolté en 2024, celui qui a pu être protégé, était de bonne qualité, selon les cépages. Parallèlement, Vitiplus assure vouloir se montrer plus proactive sur le terrain pour continuer à accompagner ses membres et pour faire face aux défis à venir. «Le monde agricole doit se bouger, c’est comme ça que nous surmonterons toutes ces petites complications. C’est aussi à ça que sert Vitiplus. Oui, il y a des difficultés, mais si le monde viticole se met ensemble, nous pourrons avancer plus sereinement», confie Frédéric Blanc, ajoutant espérer une année 2025 plus clémente pour la vigne.

Les efforts de l’association pour aider ses membres se concrétisent par la multiplication de ses offres de formations continues, sur la taille, l’irrigation ou les nouveaux vins sans alcool (encadré ci-dessous), ou la publication de brochures proposant des solutions, par exemple pour se passer des herbicides.


Tendance le vin sans alcool?

L’assemblée générale de Vitiplus a permis de faire le bilan des différentes formations continues offertes aux membres de l’association.

Mention a ainsi été faite des récents cours dédiés aux vins sans/low alcool. Dix-neuf participants se sont inscrits à l’unique proposée sur ce thème en 2024, mais davantage devraient arriver avec le temps.

«On sent, avec le dry January par exemple, que le sans-alcool devient tendance. Nous tâcherons d’être proactifs sur ce terrain», a clamé le président Frédéric Blanc.

Les viticulteurs présents à l’assemblée ont néanmoins émis l’idée de changer l’expression «vin sans alcool» en «vin desalcoolisé» afin que le terme corresponde mieux à la pratique qui permet d’obtenir ce produit tout en facilitant les échanges avec les clients.

A noter que, comme le remarque Frédéric Blanc, les boissons sans alcool – mais initialement alcoolisées –, rencontrent de plus en plus de succès auprès du public. C’est notamment le cas des bières sans alcool dont le volume des ventes a crû de 3% en un an. Concernant les bières Feldschlösschen par exemple, cela représente 9% des ventes, selon Keystone ATS. «Il existe des opportunités de croissance dans ce domaine. Je peux imaginer que leur part représente jusqu’à 25% du marché total», estime le patron de Feldschlösschen Thomas Amstutz, rapporte l’agence de presse. Reste à voir, si les vins sans alcool rencontreront un succès similaire à l’avenir.


Une grappe sur cinq aux couleurs de Vitiplus

L’association Vitiplus est la section vaudoise de Vitiswiss. Elle rassemble les viticulteurs qui travaillent selon les principes de la production intégrée et de la viticulture durable, soit des pratiques agricoles mêlant agricultures biologique et conventionnelle.

Ses membres sont certifiés sous le label Vinatura®. Vitiplus compte actuellement 441 membres, représentant 80% de la surface viticole vaudoise. 15% de ces membres sont en bio.

Depuis plusieurs années, le nombre de membres suit une courbe descendante. Ils étaient encore 539 en 2017. Une baisse s’expliquant surtout par l’élargissement et le fusionnement des domaines viticoles au fil des ans, explique le président de Vitiplus, Frédéric Blanc.

Vitiplus est née de la fusion de l’association vaudoise de viticulture intégrée et de l’association vaudoise des groupes d’étude viticole en 1999.

L’association propose des formations continues aux viticulteurs vaudois, gère le certificat Vitiswiss et le label Vinatura®, conseille les producteurs sur les enjeux techniques et économiques de la branche, et promeut la production intégrée.

Vitiplus est l’une des six associations régionales de Vitiswiss, qui «est la fédération suisse pour le développement d’une vitiviniculture durable. Elle est l’organisation de la branche viticole, reconnue par l’OFAG, pour élaborer les directives pour l’obtention des prestations écologiques requises (PER) en viticulture», indique Vitiplus sur son site.