L’action de sauvetage des batraciens migrateurs vient tout juste de se terminer avec succès. Car si les batraciens sont sortis de leur torpeur hivernale, avec le retour de leur chant vient également le temps de leur grande migration vers leurs points de reproduction. Et avec celle-ci, son lot de danger.
ça y est, les batraciens du Nord vaudois sont arrivés à bon port. Comme chaque année, quand les nuits se réchauffent et que le temps est pluvieux, ces petits amphibiens migrent des forêts où ils hibernent jusque vers l’étang ou le point d’eau où ils vont se reproduire à leur tour.
Problème, leur pérégrination se heurte aux zones urbaines et aux routes empruntées par les automobilistes. Suivant leur instinct, ils ne contournent pas ces zones pourtant dangereuses. Elles le sont particulièrement en fin de journée, à la tombée de la nuit quand les batraciens se mettent en route, mais aussi quand le trafic routier est le plus dense. En plus d’être potentiellement écrasés, ces petits animaux d’eau douce risquent également de souffrir de lésions induites par le déplacement d’air provoqué par les voitures.
Dans le Nord vaudois, les cinq kilomètres de route entre les villages de Fontaines-sur-Grandson et Fiez sont particulièrement empruntés par les crapauds, les grenouilles et les tritons. Alors, chaque année, un groupe de bénévoles est missionné par Pro Natura Vaud pour transporter ces animaux jusqu’au point d’eau le plus proche. La 7e édition de ce sauvetage vient tout juste de se terminer.
Parcours du combattant
Les petits batraciens qui traversent la route entre Fontaines-sur-Grandson et Fiez cherchent notamment à se rendre à l’étang de la Scie. Il s’agit d’une réserve naturelle propriété de Pro Natura, mais aussi d’un site porté à l’inventaire fédéral des sites de reproduction de batraciens d’importance nationale.
Mais le chemin pour l’atteindre est ardu. Impossible de placer des «crapauducs», soit des passages à amphibiens, le long de cette route. Durant la période de migration, «les batraciens viennent de tous les côtés», explique Ludovic Longchamp, bénévole depuis près de dix ans. Il faut donc les aider à traverser à la main. C’est munis d’un gilet jaune de sécurité, d’une lampe frontale, de gants et d’un seau que la cinquantaine de bénévoles partent en mission. Durant près d’un mois, ou plutôt 17 soirées pluvieuses, les bénévoles se sont consacrés à cette tâche.
Une action qui porte ses fruits
En tout, 1209 batraciens ont été amenés sains et saufs jusqu’à l’étang de la Scie, soit 1153 crapauds communs, 39 grenouilles rousses et 17 tritons alpestres. Ludovic Longchamp salue le travail remarquable effectué et remercie tous les participants pour leur implication.
Une activité qui se fait dans la bonne humeur, mais aussi en famille, ce qui donne la possibilité aux enfants de se familiariser avec la protection de la faune locale.
La pression climatique
Si la migration des batraciens est dictée par la météo, il va sans dire que le dérèglement a un effet néfaste sur leur cycle. Avec des hivers de plus en plus chauds, les batraciens doivent puiser davantage dans leurs réserves. À la sortie de l’hibernation leur indice de masse corporelle est plus bas, ce qui a un impact direct sur la reproduction et sur leur survie.
Ensuite, les hivers sont également plus courts. Ces petits animaux se réveillent plus tôt de leur phase de repos hivernal. Leur migration vers leurs lieux de reproduction commence donc plus tôt. Cette année, elle a démarré début mars dans le Nord vaudois. Mais certaines années et dans certains endroits, elle commence parfois en décembre. Or, en cas de retour du froid et des gelées nocturnes, les œufs déjà pondus sont détruits. De plus, comme les étés sont de plus en plus chauds, il arrive que les points d’eau où les batraciens ont pondu s’assèchent, tuant au passage les petits encore en train de se développer.