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Bière qui roule n’amasse pas mousse
Dans son local de 200 mètres carrés à Chavornay, La Talentueuse brasse à l’heure actuelle près de 250 litres de bière par semaine.

Bière qui roule n’amasse pas mousse

21 janvier 2025 | Textes: Maude Benoit | Photos: Michel Duperrex
Edition N°3874

La brasserie de La Talentueuse est en maturation depuis trois ans. Et la levure prend bien! Rencontre avec Pauline Abetel, sa cofondatrice.

«Tombée dans la bière par hasard» comme elle le dit elle-même, Pauline Abetel a cofondé avec son père la brasserie chavornaysane La Talentueuse. En 2021, l’occasion s’était présentée de reprendre l’unité de brassage de la brasserie O’bled de Bavois.

La Talentueuse a récemment passé le fameux cap des trois ans. Une étape décisive dans tout voyage entrepreneurial. Ainsi, la jeune entrepreneuse ambitieuse, motivée et amoureuse de son terroir nous parle de ses projets.

Pauline Abetel, qui êtes-vous?

J’ai 26 ans et j’ai grandi dans le Nord vaudois. Je suis partie à deux reprises de la région: à Toronto pour apprendre l’anglais et à Sierre pour mes études en économie d’entreprise. Ainsi, j’ai compris que c’est en partant de chez soi, qu’on se rend compte de la valeur des choses. Aujourd’hui, j’ai vraiment à cœur de mettre en valeur ma région.

Avez-vous dû vous former au brassage?

La brasserie a commencé à évoluer en parallèle de mes études que j’ai terminées en décembre 2022. Ensuite, je me suis un peu formée sur le tas, en m’appuyant sur des personnes formidables et compétentes qui m’ont partagé leur expérience et leur savoir-faire. Depuis mi-2024, nous avons engagé un brasseur yverdonnois, Josselin Aubert, ce qui nous permet d’assurer la qualité du produit. La collaboration fonctionne d’ailleurs très bien; on s’est bien trouvés.

Et vous êtes associée avec votre père, c’est bien cela?

Oui, et on fait une jolie équipe tous les deux. Il a ses activités à côté, mais il est bien là en soutien et j’ai de la chance de l’avoir.

En 2021, vous aviez lancé votre première bière, la «22». Où en êtes-vous?

Depuis on a fait évoluer notre gamme petit à petit pour fournir des produits de qualité et maîtrisés. Trois nouvelles ont vu le jour: une session IPA nommée «Hoppa», une blanche nommée «La Panoramique» et tout dernièrement, une ambrée nommée «La Flamme». Nous avons désormais une gamme de base uniformisée autour du volume d’alcool (4%) et produite avec des matières premières issues de notre terroir vaudois.

Travailler avec des produits locaux, est-ce important pour vous?

C’est même notre marque de fabrique. Le houblon vient du Domaine de la Bluette à Grandcour, notre malte vient pour le moment de la malterie de Bavois et nous utilisons l’eau du réseau qui vient du canal d’Entreroches. Mais travailler local, cela a un coût. En Suisse, plus de 90% des matières premières brassicoles sont importées. On a réussi à avoir une bière bien de chez nous et accessible en termes de goût, de teneur en alcool et de prix.

Et pourquoi «La Flamme»?

L’ambrée est une bière réconfortante que l’on aime boire en hiver au coin du feu. Cela fait aussi référence au flambeau présent sur le logo du giron de la Fédération vaudoise des Jeunesses campagnardes (FVJC) à Chavornay auquel j’ai participé en 2022. Cette année-là était d’ailleurs assez «chaude» pour moi, car je terminais mon bachelor, je participais à l’organisation du giron et je développais mon entreprise. Ainsi, «La Flamme» fait référence à cette période-là qui correspond aussi aux trois premières années de l’entreprise.

Justement, quel est le bilan de ces trois ans?

Après avoir pris nos marques, nous avons peaufiné nos recettes et développé nos bières en fût pour mettre des tireuses à disposition lors des événements. Aujourd’hui, je suis confiante dans mon produit, j’ai de bons partenariats et je participe à quelques événements. L’année passée, j’ai notamment travaillé avec la Foire d’automne et bourse aux sonnailles à Romainmôtier et la Fête de la saucisse aux choux à Orbe. Je cherche encore à m’implanter dans les commerces.

Qu’est-ce que l’entrepreneuriat vous a-t-il appris?

Qu’il ne faut pas avoir peur de se sentir légitime dans son projet. Tant que tu y crois et qu’il tient un minimum la route, il faut y aller. De plus, il est important d’écouter tous les sons de cloches des gens que tu rencontres, qu’ils y croient, ou pas. Cela permet de prendre du recul. Je me suis aussi rendu compte que les négociations, ça s’apprend (rires). Enfin, je dirais qu’il faut accepter de renoncer à certains partenariats, surtout si le produit n’est pas valorisé à sa juste valeur.

De nouveaux projets?

Nous avons plein d’idées qu’il faut mettre en place. Nous souhaitons notamment créer des moments de convivialité avec la clientèle. Tout prochainement, nous allons refaire la garde-robe de nos bières, ce qui donnera l’occasion de mettre sur pied un événement. Des nombreux projets auxquels je peux me consacrer pleinement, maintenant que je travaille à 100% pour l’entreprise.


Un pays de bière

Boisson alcoolisée certainement déjà brassée dans nos contrées par les Gallo-Romains, la bière plaît aux Suisses. En 2023, ils ont consommé en moyenne 50,7 litres de bière par personne. Cette année-là, on comptait également 1192 brasseries en Suisse, faisant du pays l’un des plus densifiés au monde en matière d’artisanat brassicole.