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«Ce souvenir reste gravé dans ma mémoire»
Cyril Cornu et Alan Roura. © Michel Duperrex

«Ce souvenir reste gravé dans ma mémoire»

6 novembre 2020

Cyril Cornu a eu le bonheur d’accompagner Alan Roura à la sortie du chenal, aux Sables-d’Olonne, lors du départ du Vendée Globe 2016. Quatre ans plus tard, La Fabrique est toujours liée au navigateur genevois, qui repart dimanche pour le tour du monde en solitaire et sans escale. Très engagé dans le projet, le responsable communication de Cornu SA raconte tout ce que cette incroyable aventure commune implique.

Quatre ans plus tard

Cyril Cornu se souvient encore parfaitement du départ de 2016. À peine arrivé au ponton, on lui avait fait la surprise de le laisser monter à bord du bateau pour la remontée du chenal des Sables-d’Olonne avec Alan Roura, devant près de 400 000 spectateurs amassés sur les quais. «Je n’y croyais pas. Je pensais que c’était réservé au skipper. L’ambiance était exceptionnelle, indescriptible. Ce souvenir reste gravé dans ma mémoire.»

Quatre ans plus tard, le navigateur genevois se trouve de nouveau au départ du Vendée Globe. La Fabrique est toujours à ses côtés, son nom grimé sur la coque, sur les voiles, sur les vêtements. Dimanche, à 13h02, Alan Roura et les autres s’élanceront dans un nouveau tour du monde en solitaire. À huis clos. Seuls quelques chanceux seront de la partie, dix par équipage, dont Cyril Cornu. «C’est un moment de grande tension et de concentration. Je pense que sans public pour réchauffer l’atmosphère, ce sentiment va être décuplé. Et c’est très émouvant aussi.»

Le Champagnoux aurait souhaité emmener toute sa famille pour leur faire vivre ces émotions du départ. Reste l’arrivée. Alan Roura souhaite boucler le Vendée Globe en moins de huitante jours. «Le retour est encore plus magique. Cela fait trois mois qu’on a la boule au ventre, qu’on sait que tout peut se produire, et de voir ce point grossir à l’horizon, c’est très fort. J’espère que je pourrai emmener mes proches. J’aimerais pouvoir partager cela avec le plus de monde possible. Mais vu la situation actuelle, je me rends bien compte que ce ne sera certainement pas possible.»

 

Dans le même bateau, c’est pour bientôt

Au fil du temps, Alan Roura et La Fabrique sont devenus plus que de simples partenaires professionnels. Cyril Cornu parle d’amitié. «On ne se voit pas souvent. On habite quand même à neuf heures de route l’un de l’autre, mais on est régulièrement en contact par messages. On a néanmoins toujours su garder une certaine frontière lorsqu’il s’agit du boulot. Alan sait rester pro et pragmatique, et c’est important.» C’est par ailleurs entendu: le navigateur emmènera Cyril Cornu traverser l’Atlantique avec lui, un de ces quatre. «Je m’en réjouis, et non, ça ne me fait pas peur.» Contrairement à l’avion.

 

Celui qui gagne… et celui qui coule

Le Vendée Globe est une aventure et, aussi, une course. Qu’attend-on d’Alan Roura à Champagne? «Les gens parlent de deux bateaux: celui qui gagne et celui qui coule. En matière de communication, la meilleure chose qui puisse arriver, c’est qu’il coule!» Cette affirmation, Cyril Cornu la tient d’un habitué du milieu.

Bien évidemment, à La Fabrique, personne ne souhaite de malheur à Alan Roura. Au contraire: «Je préfère nettement qu’on ne parle pas de nous plutôt qu’il coule. On veut qu’il finisse et, surtout, que lui soit content, qu’il soit fier de lui. C’est ça, mon baromètre.»

 

Du biscuit ou que des miettes?

Alors, investir dans la voile, c’est une affaire? Sans étude onéreuse, que la firme nord-vaudoise s’est épargnée, il est difficile de chiffrer cela. «Mais sans ce foutu Covid, on aurait eu d’énormes retombées cette année, assure Cyril Cornu. Il devait y avoir trois courses importantes en 2020: The Transat et la New York Vendée, qui ont été annulées, en plus du Vendée Globe. On avait prévu de grosses opérations sur place, de faire goûter nos produits. La crise a fortement prétérité notre impact médiatique.»

Pour affirmer cela, l’entrepreneur se fie notamment aux expériences menées lors de la Route du Rhum et de la Transat Jacques Vabre les années précédentes. «Nos stands ne désemplissaient pas. Les gens venaient découvrir notre marque et, contrairement à ce qui se passe dans d’autres sports, le public de la voile a beaucoup de sympathie pour les sponsors. Les gens, souvent alors même qu’ils ne nous connaissent pas, s’y intéressent presque autant qu’aux skippers, et de manière très positive, nous remerciant de soutenir la cause. C’est quelque chose que je n’ai jamais vu ailleurs.»

 

Un bretzel et un palmier comme compagnons de route

Au revoir les briques imbriquées des murs de La Fabrique sur les voiles, place à un immense bretzel et un tout aussi imposant palmier. L’IMOCA d’Alan Roura affiche un nouveau design pour ce Vendée Globe, et la firme de Champagne a osé la gourmandise. «Si on s’est relancés dans l’aventure, ce n’était pas pour le bâtiment La Fabrique cette fois, mais pour la marque, qui est surtout distribuée en France. Et nos produits phares y sont les palmiers et les bretzels», explique celui qui occupe, entre autres, le costume de responsable communication de Cornu SA.

Flûte, si Alan Roura était partant pour afficher du biscuit sur sa voilure, il aurait préféré un design plus épuré. Il en a proposé une variante… qui n’a pas été retenue. «Il ne nous en veut pas, rassure Cyril Cornu. Notre position s’explique par le fait qu’on n’est pas aussi connus qu’Hugo Boss, par exemple, qui peut se limiter à inscrire son nom. On a besoin de montrer ce que l’on fait, de mettre en valeur nos produits. Et puis, une fois le travail accompli, Alan a quand même reconnu que son bateau avait de la gueule.»

 

La dernière de La Fabrique avec Alan Roura

Il y a quatre ans, Alan Roura et La Fabrique s’étaient entendus en septembre, seulement deux mois avant le départ du Vendée Globe. Il avait alors fallu tout organiser dans des délais très courts. Et ça l’avait fait.

L’entente commune devait s’arrêter là. Mais le Genevois est revenu à la charge avec, cette fois, plus de trois ans de marge. «On ne pensait pas reconduire notre sponsoring. On n’a pas des moyens démesurés, rappelle Cyril Cornu. On a quand même demandé à Alan de nous présenter un projet mieux ficelé et, quelques mois plus tard, il est venu avec trois propositions. On s’est mis d’accord le jour même.» La Fabrique est ainsi toujours partenaire principal, mais la porte a été ouverte à d’autres sponsors, qui ont rejoint le navire.

C’est qu’il faut aller vite. Un bon Vendée se prépare trois ans à l’avance. Voire plus: «Alan m’a expliqué que beaucoup de bateaux s’achètent et se vendent pendant la course. Les skippers communiquent entre eux et s’entendent. Ce sera peut-être le cas pour le nôtre, d’ailleurs, qui est en vente.»

Par ailleurs, Alan Roura recherche déjà activement des partenaires pour l’édition de 2024. Avec un projet plus ambitieux encore, nécessitant un budget d’autant plus colossal. La Fabrique sera-t-elle toujours de l’aventure? «Il ne faut jamais dire jamais, mais je ne pense pas. On n’en aura pas les moyens.» Alors autant profiter un maximum du présent.

 

Fermeture dans l’urgence

Cyril Cornu a prévu de partir ce soir pour les Sables-d’Olonne. «Je dois être testé vendredi pour avoir accès au ponton dimanche, explique-t-il. Entre-temps, je vais travailler depuis la chambre que je loue.»

Mais mercredi, c’était le branle-bas de combat à La Fabrique, à Champagne, au lendemain des mesures annoncées en fin de journée par le Canton. «On a 24 heures, moins la nuit, pour organiser la fermeture. Jusqu’à 17h pour décider ce qu’on fait avec le personnel et les stocks qui sont pleins, relevait Cyril Cornu, tôt hier matin. On comprend bien la nécessité sanitaire et on se doutait que cela aller arriver, mais on aurait apprécié d’avoir plus de temps pour réagir.»

Manuel Gremion