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Celui qui n’aurait pas dû être là

20 septembre 2024 | Textes: Manuel Gremion | Photo: Gabriel Lado
Edition N°3792

Attendu au RC Lens, Djibril Diop a finalement posé ses crampons à Yverdon la semaine passée. Venu de Norvège, le défenseur sénégalais de 25 ans est l’un des gros renforts attendus d’YS. Rencontre.

Djibril Diop, racontez-nous la Norvège, où vous avez joué ces deux dernières saisons.

J’étais déjà venu quelques fois en Europe quand j’évoluais dans un centre de formation au Sénégal. J’avais ainsi pris l’habitude d’affronter des équipes européennes, et ça m’a un peu aidé. A Stavanger, ça a été ma première expérience dans les pays nordiques. Les deux ou trois premiers mois ont été vraiment compliqués, du point de vue du football et humainement: il faisait froid et je n’avais pas l’habitude de jouer sur des terrains synthétiques. Ensuite, je me suis adapté au froid et je me suis imposé.

Avez-vous appris la langue?

Je communiquais en anglais, car le norvégien est compliqué. On était plusieurs joueurs à suivre des cours, mais on a tous arrêté en même temps. Il existe plusieurs dialectes en fonction des régions, en plus.

Vous êtes quand même resté deux ans là-bas.

Oui, et c’était franchement bien. Le championnat est super, les gens vraiment gentils et le club m’a bien aidé. Sur le terrain, c’était un peu différent de ce que je connaissais, et j’ai bien progressé. Le coach a changé de façon de jouer et de système après la première année. A mon arrivée, on jouait à trois derrière, la saison suivante à quatre, et avec le ballon aussi, les attentes ont évolué. Dans ce contexte, avec un tel entraîneur, tu progresses forcément.

Préférez-vous jouer à trois ou à quatre en défense?

Plutôt à quatre mais, dans le passé, j’ai déjà eu à évoluer dans une défense à trois. J’ai pratiquement joué de tous les côtés, que ce soit en Norvège, au Maroc ou au Sénégal.

Vous avez les deux pieds?

Oui, même si je suis droitier.

Revenons-en à vos débuts. Comment avez-vous commencé à taper dans le ballon?

J’ai grandi et étudié à Thiès, à une heure et demie de la capitale, Dakar. Je jouais dans une école de football, puis, à 12 ans, j’ai passé des tests et j’ai intégré le centre de formation de Génération Foot, où je suis resté durant huit années. Au départ, j’étais milieu de terrain, d’abord offensif, puis j’ai reculé. Le coach aimait bien changer ses joueurs de position. Latéral, demi, défenseur central: j’ai pratiquement tout vu, car encore avant, j’étais attaquant. Finalement, je suis resté dans l’axe de la défense. Avec le temps, j’ai intégré l’équipe nationale des jeunes. Il existait un partenariat avec le FC Metz, et j’ai eu l’opportunité d’y signer à deux reprises, mais ça ne s’est finalement pas fait, car le club cherchait plutôt des attaquants. Par la suite, j’ai décidé d’aller au Maroc.

Pourquoi cela?

Pour découvrir autre chose. Mon agent me l’avait conseillé. J’avais fait toute ma formation à Génération Foot, j’ai été capitaine, j’y ai gagné beaucoup de trophées, j’ai joué avec la première équipe. Il était temps de franchir un palier. Ça ne s’est pas réalisé à Metz, alors j’ai opté pour tenter ma chance au Maroc.

Ensuite, comment êtes-vous passé de Hassania à Viking, en Norvège?

Ça s’est fait en toute fin de mercato, car à la base je devais signer à Lorient. Ça, c’est toute ma vie! A chaque fois que je dois m’engager quelque part, ça ne se concrétise pas, c’est incroyable (rires)! D’autres clubs, notamment du Portugal, étaient venus me voir, mais j’avais une proposition concrète de Lorient. Le président de mon club a toutefois changé d’avis, il a voulu me garder. Lorient a alors laissé tomber. Viking, ça s’est fait le dernier jour. Mon agent, quelqu’un de bien, m’a dit que c’était un bon club, que ce serait une nouvelle expérience et que j’allais m’en sortir avec mon potentiel. J’aime expérimenter des choses.

Avez-vous essayé le ski de fond?

Non, ce n’est pas du tout mon truc!

La suite, c’est encore l’histoire de votre vie, vous deviez partir à Lens, et…

Je devais partir à Lens, et ça ne s’est pas fait à la dernière minute (ndlr: l’opération a capoté en raison du départ avorté du Lensois Kevin Danso à Rome, à la suite de la visite médicale)! Puis je devais aller à Venise, et ça ne s’est pas fait à la dernière minute, car les papiers n’ont pas été signés à temps… J’étais prêt à rester à Stavanger, puis Yverdon s’est manifesté. Mon agent m’a expliqué qu’il s’agit d’un club qui veut aller de l’avant et que ce serait une bonne occasion pour moi, que le championnat suisse est suivi, alors j’ai dit allons-y.

Pourquoi plus la Suisse que la Norvège, finalement?

J’avais envie de voir quelque chose d’autre. Mon objectif initial était de jouer en France ou en Belgique, et quand est arrivée l’option suisse, je me suis dit on y va. Lausanne s’était déjà intéressé à moi en début de mercato, mais à ce moment-là, mon club n’était pas disposé à me laisser partir. Le championnat suisse est très bien, j’ai pu voir Bâle et Young Boys en Ligue des champions, et ce sont vraiment de très bonnes équipes.

Voilà un nouveau pays à découvrir.

Un nouveau championnat, un nouveau pays: c’est tout ce que j’aime.

Saviez-vous qu’on parlait français ici?

Oui, mais ce que j’ai découvert, c’est qu’on parle aussi allemand.

Pensez-vous avoir trouvé une bonne vitrine pour vous mettre en valeur?

C’est certainement plus facile de venir ici qu’en Norvège, et je pense que les clubs qui m’ont déjà observé le referont si je suis performant. Je pars dans l’optique de toujours aller de l’avant et d’être performant. Je suis quelqu’un qui se réfugie dans le travail, alors je vais travailler, progresser encore, et les choses se réaliseront quand elles se réaliseront.

Quelles sont vos premières impressions d’Yverdon Sport?

Avant même de venir ici, le coach et le directeur sportif m’ont parlé du club, ils n’ont rien caché. Ils avaient évoqué l’ambiance et l’accueil des joueurs, et j’avais pris cela un peu à la légère. Je n’imaginais pas que c’était comme ça, et c’est vraiment quelque chose. Cela m’a marqué dès mon arrivée: tout le monde est ensemble, c’est une famille. C’est un plaisir quand on arrive dans un endroit où on ne connaît personne. Dès le premier jour, certains ont commencé à me vanner, il y a un bel état d’esprit.

Dans quel état de forme êtes-vous?

J’ai fait la préparation et les matches amicaux en Norvège. Une fois que les papiers pour mon départ en France étaient prêts, je me suis entraîné à part une semaine. En arrivant ici, le préparateur physique est tout de suite venu s’occuper de moi pour retrouver la forme, et je me sens prêt, bien que peut-être pas à 100%.

Qu’est-ce qui vous a convaincu de vous engager pour trois ans?

J’ai estimé que trois années étaient bien pour m’adapter. Ça peut prendre du temps, comme aller très vite. Peut-être que je vais faire un an ici, peut-être deux, peut-être que je vais finir à YS. C’est la vie du footballeur, on ne sait jamais.

Quel joueur le public d’Yverdon va-t-il découvrir sur le terrain?

Je vais être moi-même, un joueur qui aime toucher le ballon, prendre des risques, communiquer avec ses coéquipiers. Défensivement, je suis vraiment quelqu’un d’agressif, je vais certainement prendre quelques cartons! Dans un nouveau club, un nouveau championnat, tout ne sera pas parfait au début, peut-être me faudra-t-il deux ou trois matches pour être dans le rythme, peut-être cinq. Ce que je sais, c’est que je vais me donner à fond et essayer d’aider l’équipe de mon mieux.