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«C’est comme lorsque l’on termine un marathon»

20 juillet 2015

Lignerolle – Le député UDC a quitté la présidence du Grand Conseil le 30 juin dernier. Il revient sur une année riche en rencontres et en émotions qu’il ne va pas oublier.

L’agriculteur est revenu sur son année de présidence chez lui, à Lignerolle. © Michel Duperrex

L’agriculteur est revenu sur son année de présidence chez lui, à Lignerolle.

Lignerolle, rue du Collège, jeudi dernier. Sully, le carlin de quinze mois réserve un accueil chaleureux. Une cloche trône dans le salon de l’appartement où vit Jacques Nicolet avec sa compagne. Elle lui a été remise par ses enfants, le 2 septembre passé, lors de la réception organisée, dans son village, pour célébrer son accession au siège de président du Grand conseil. «Ils ne m’avaient rien dit. Après le discours de mon prédécesseur, Laurent Wehrli, mon fils a pris la parole. C’était un moment poignant», se souvient l’agriculteur nord-vaudois.

Près d’un an plus tard, le député, qui a cédé sa place au perchoir à Roxane Meyer Keller le 30 juin dernier, jette un coup dans le rétroviseur, même si, de son propre aveu, il préfère regarder vers l’avant. Une année à la tête du Grand Conseil, cela laisse des souvenirs…

Des gens engagés

Jacques Nicolet à l’heure de l’apéritif, après la séance du Grand Conseil du 1er juillet 2014, qui a marqué l’accession du député de Lignerolle à la présidence. © Jacquet -a

Jacques Nicolet à l’heure de l’apéritif, après la séance du Grand Conseil du 1er juillet 2014, qui a marqué l’accession du député de Lignerolle à la présidence.

La représentation de l’institution l’a conduit aux quatre coins d’un canton qu’il avait, certes, déjà bien arpenté sous sa casquette de commissaire acheteur de céréales, mais où il a pu mesurer l’état d’esprit milicien, l’engagement sans faille de la population dans le cadre de l’organisation de manifestations. «On remarque que les gens aiment ce qu’ils font et ont à coeur de bien recevoir. Dans les girons de Jeunesse, lorsque tout le monde est debout sur les bancs au passage des drapeaux et qu’on entend la chanson de la fédé -(La Fédération vaudoise des jeunesses campagnardes, ndrl.)-, on a les poils qui se hérissent», commente Jacques Nicolet.

Vue de la place du président lors d’une séance du Grand Conseil. Plus que la conduite des débats, l’application de la procédure a été un enjeu pour lui. © Dany Schaer

Vue de la place du président lors d’une séance du Grand Conseil. Plus que la conduite des débats, l’application de la procédure a été un enjeu pour lui.

Au total, l’habitant de Lignerolle a pris part à quelque 300 événements durant sa présidence. Certains d’entre eux lui ont réservé des surprises, comme le Comptoir d’Oron, théâtre de son enlèvement par les Brigands du Jorat. D’autres étaient incontournables, comme les assemblées générales des sept grandes associations vaudoises ou la venue, en avril dernier, du président français. «C’était du haut de gamme. François Hollande est quelqu’un de relativement abordable, malgré ses nombreux gardes du corps», observe le membre du groupe UDC, avant de partager une anecdote amusante: «Sur les quais d’Ouchy, il a déclaré, en regardant de l’autre côté du lac, que les Alpes suisses sont belles!» Jacques Nicolet rechigne quelque peu à évoquer le souvenir d’autres personnages de marque qu’il aurait rencontré. «Il y a 755 000 personnalités dans le canton de Vaud», explique-t-il.

La réception du 2 septembre, à Lignerolle, a été un moment inoubliable pour Jacques Nicolet, qui l’a évoqué à plusieurs reprises lors de l’entretien. © Duperrex -a

La réception du 2 septembre, à Lignerolle, a été un moment inoubliable pour Jacques Nicolet, qui l’a évoqué à plusieurs reprises lors de l’entretien.

S’agissant de son emploi du temps sur le terrain, il déclare avoir toujours, dans la mesure du possible, «mis une priorité sur la région. J’ai mes racines dans le Nord vaudois», rappelle-t-il, lui qui, à plusieurs reprises lors de l’interview, a exprimé sa reconnaissance au sujet de la réception de Lignerolle -«le Nord vaudois a scotché le canton», déclare-t-il avec fierté. Bien souvent, le premier citoyen du Canton n’a pas pu se contenter de faire acte de présence. La majorité des discours qu’il a eu à prononcer, il les a préparé lui-même: «J’avais cela à coeur pour laisser transpirer ma sincérité. Quand on s’exprime avec franchise, cela passe très bien», observe-t-il.

Des règles à appliquer

Jacques Nicolet, à gauche du drapeau suisse, lors des commémorations du 70e anniversaire de la section vaudoise de l’Association suisse des sergents-majors. © Dany Schaer

Jacques Nicolet, à gauche du drapeau suisse, lors des commémorations du 70e anniversaire de la section vaudoise de l’Association suisse des sergents-majors.

Du point de vue de sa fonction au sein du Parlement vaudois, Jacques Nicolet estime que l’enjeu principal a été l’application des procédures et des règles de l’institution. Il évoque quelques couacs, comme le fait de ne pas avoir suivi le principe du vote à main levée alors que la situation l’exigeait. Et regrette de ne pas avoir vu le dossier de la Loi sur la pédagogie spécialisée aboutir durant son année de présidence. Son autre déception? Que le projet Imago, lié à son postulat demandant un état des lieux de la formation agricole dans le canton, ne soit pas arrivé sur la table parlementaire.

Quant aux sujets de satisfaction, ce sont l’adoption de la Loi sur les auberges et les débits de boisson (LADB) et le traitement de plusieurs gros dossiers ayant trait aux infrastructures routières. En marge des débats, Jacques Nicolet relève sa rencontre improbable, en avril dernier, avec une délégation sarde désireuse de voir l’île italienne devenir un canton suisse, et deux moments tragiques particulièrement difficiles à gérer lors de son passage au perchoir, à savoir l’accident d’hélicoptère ayant causé la mort de quatre membres de la Fédération des entrepreneurs vaudois et le décès de Jean-Marc Chollet. L’agriculteur de Lignerolle a aussi pu mesurer l’impact des réseaux sociaux lors du départ du député Didier Divorne. Le fait qu’il ait procédé à une lecture sélective de sa lettre de démission avait déchaîné les passions sur Twitter et il avait rectifié le tir en la relisant dans son entier l’après-midi.

Un autre épisode délicat est survenu, cette fois-ci au sein du bureau du Grand Conseil, lorsqu’il a été question de remplacer le secrétaire général Olivier Rapin, dont le départ effectif s’est produit à la fin de l’année dernière. «Le bureau était tiraillé entre deux candidats. Il a fallu trancher», commente le député de Lignerolle, qui, cette période de turbulences mise à part, fait état de la très bonne collaboration en vigueur dans l’entité.

Et c’est donc avec le sentiment du devoir accompli que Jacques Nicolet a enlevé son costume de président du Grand Conseil, au terme d’une année «exceptionnelle en tous points», lors de laquelle il a pu compter sur son fils par l’exploitation familiale, se ménageant toutefois du temps pour la traite du matin qu’il aime tant. «C’est comme un marathon, on est content quand on arrive au bout, la tête haute et en bonne forme», commente-t-il.

Objectif Conseil national

«Quand on veut, on peut.» Tel est le message que le député de Lignerolle a voulu faire passer lors de son premier discours, le 2 juillet 2014 à Orbe, 33 ans après y avoir obtenu, lui-même, son certificat de fin de scolarité. Sa boucle politique n’est pas pour autant achevée, loin s’en faut, lui qui figure sur la liste des candidats de l’UDC vaudoise au Conseil national. Et croit en ses chances. «Je suis arrivé à maturité. C’est le bon moment pour moi. A Berne, il est préférable d’avoir des représentants du canton au caractère bien trempé. Et puis, j’adore les combats perdus d’avance», déclare-t-il.

Ludovic Pillonel