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Cultiver pour prendre racine
© Carole Alkabes

Cultiver pour prendre racine

30 août 2019 | Edition N°2571

L’Entraide protestante a présenté mercredi le fruit d’une année de collaboration entre des réfugiés et des résidents.

La rencontre avait beau se passer en dessous de Chamblon, dans les jardins d’Yverdon-les-Bains, l’ambiance y était multiculturelle mercredi. Et pour cause, la fête des récoltes organisée par l’Entraide protestante suisse (EPER) réunissait plusieurs binômes composés d’un habitant de la région et d’un réfugié. Une exposition photo présentait plusieurs migrants cultivant des bouts de terre helvétique, alors que le café était servi à l’érythréenne.

Marie-Fleur Baeriswyl, animatrice, et Magaly Hanselmann, directrice romande de l’Entraide protestante, présentent le projet. © Carole Alkabes

Le mélange des cultures (dans tous les sens du terme), c’est justement l’un des objectifs de l’initiative «Nouveaux Jardins» de l’EPER. «Nous avions déjà un programme de parrainage, explique Magaly Hanselmann, directrice romande de la fondation. Mais ce projet permet un rapport plus égalitaire entre la population locale et les migrants. Lorsqu’ils jardinent, les deux membres du groupe apprennent l’un de l’autre.»

Quand arrive le moment de présenter leur parcelle, la complicité des tandems saute aux yeux. À l’image de Claude-Annette Renaud et d’Azieb Ghirmay, qui se rendent dans leur jardin main dans la main. «Je n’ai pas l’âme d’une jardinière. Ici, c’est Azieb qui commande, assure la Nord-Vaudoise. Elle me dit quoi faire et j’obéis!» C’est que la mère de famille d’origine érythréenne possédait un très grand jardin dans son pays d’origine.

Une véritable amitié

Malgré les lacunes botaniques de l’Yverdonnoise, le duo fonctionne bien. «Claude-Annette est une bonne partenaire, souligne Azieb Ghirmay. Elle enlève les mauvaises herbes et moi je plante des fleurs et des légumes.»

Car le binôme n’en est pas à son coup d’essai. «Nous nous sommes rencontrées il y a deux ans, dans le cadre du programme de parrainage de la fondation», indique Claude-Annette Renaud. Au début, il s’agissait surtout d’aider la famille érythréenne d’un point de vue administratif. Aujourd’hui, ce n’est plus en tant que marraine que la septuagénaire rencontre Azieb Ghirmay plusieurs fois par semaine, mais en tant qu’amie. «Lorsque je me suis lancée dans cette aventure, je ne savais pas à quoi m’attendre, confie la retraitée. Mais c’est une expérience incroyable.»

Le municipal chargé du Service de la jeunesse et de la cohésion sociale, Jean-Claude Ruchet, était présent pour montrer son soutien. «Ce genre de projet est essentiel pour Yverdon-les-Bains, se réjouit l’édile. Il permet une amélioration concrète du quotidien des réfugiés en les incluant dans la société.»

Ainsi, l’initiative «Nouveaux Jardins» a permis à Azieb de trouver une activité. «Quand elle va jardiner, on voit que ça lui fait du bien», garantit Rahel, sa fille, qui a réussi à trouver du travail dans la région.

En plus des liens sociaux qui se créent entre les participants, l’initiative de l’EPER a aussi pour but d’améliorer le français des réfugiés. «Azieb a toujours un peu de peine à parler, mais elle comprend très bien la langue, atteste Claude-Annette Renaud. Du coup, nous avons trouvé notre propre moyen de communiquer!» Dernier avantage du projet: la possibilité de bénéficier d’aliments sains, et cela à un prix réduit.

Seule déception pour le tandem? La qualité des récoltes de cette année, toujours pas à la hauteur des attentes d’Azieb. Mais tout n’a pas été perdu, et il suffisait de goûter aux délicieuses côtes de bette fraîchement cuisinées par l’érythréenne pour être conquis par l’initiative de l’EPER.

Massimo Greco

Rédaction