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De l’espoir au désespoir en quatre ans

9 août 2018 | Edition N°2306

Yverdon-les-Bains – Les locataires du Parc Saint-George et la Ville se battent contre le propriétaire des 90 logements protégés qui a modifié son projet initial.

«Ça y est, on nous a enfin mis un panneau officiel!», a lancé, vendredi dernier, d’un air jovial, une des résidentes du Parc Saint-George à Yverdon-les-Bains en parlant de l’écriteau bleu indiquant les cinq entrées des bâtiments sis à la rue Edouard Verdan 24. Un détail qui peut paraître anodin mais qui a le goût d’une victoire pour les habitants de ces logements protégés, car ils attendaient cela depuis la construction des immeubles, fin 2013.

S’il s’agit certes d’une avancée, elle reste bien maigre face aux multiples batailles que certains locataires mènent depuis leur arrivée dans ce quartier destiné aux seniors et aux personnes en situation de handicap ainsi qu’aux bénéficiaires de prestations sociales. En effet, le propriétaire, la société Parc Saint-George S.A., leur a fait miroiter un complexe idyllique d’environ nonante appartements comprenant une cafétéria avec terrasse, une salle d’activités et une autre dédiée au bricolage, un fitness, un espace bien-être et des bains. Pourtant, quatre ans et demi après l’inauguration du site yverdonnois, les résidents n’ont toujours pas vu la couleur de ces locaux communs, mis à part la cafétéria. «J’ai signé pour avoir ces commodités et bénéficier d’une certaine qualité de vie. Aujourd’hui, je me sens bernée parce que je n’ai même pas eu la moitié de ce qui m’avait été promis», grogne l’une des habitantes qui, comme bien d’autres locataires, préfère rester anonyme par peur de représailles de la part du propriétaire.

La piscine tombe à l’eau

Comme elle, de nombreux résidents se sont unis pour faire front face à Parc Saint-George S.A., qui a adressé à tous, en juillet 2016, une notification de nouvelles prétentions. Celle-ci prévoit que «les locaux communs ne font plus partie de l’objet du bail» et que le loyer initial est, par conséquent, réduit.

Modification difficilement contestable

Bien que ce changement de concept soit jugé «un peu facile» par les habitants, il n’en reste pas moins qu’il a été notifié dans les règles. «Et personne ne s’y est opposé», indique Me Philippe Conod, mandaté par le propriétaire pour gérer les litiges en matière de bail à loyer. «Cela va être difficile de contester après coup, constate Renaud Jaccard, directeur de l’Association suisse des locataires (Asloca) intersection, qui regrette que les gens ne se soient pas mobilisés davantage pour agir ensemble. Dès le départ, ce projet sentait mauvais, on voyait que les promoteurs se fichaient de ce qui se passait là-bas. Maintenant, il y a sans doute encore quelque chose à faire sous l’angle du défaut de la chose louée, mais cela devra s’apprécier au cas par cas.» 

Selon Me Jean-Claude Perroud, qui défend les intérêts de Parc Saint-George S.A. dans un conflit l’opposant à la Ville (lire encadré dans notre version papier), l’abandon des locaux communs s’explique par le fait que Pro Senectute, associée à l’origine au projet, a quitté le navire après la mise à l’enquête. «Le projet a donc dû changer d’orientation, mais il a toujours gardé une vocation sociale», relève l’avocat.

Contacté, le propriétaire n’a pas répondu à nos appels. «C’est comme pour tout, il y a toujours des locataires, des commerçants et des journalistes qui se plaignent mais, pour moi, c’est un dossier qui est calme, sans problème particulier», conclut Me Philippe Conod.

 

Christelle Maillard