Logo
Denner brouille les cartes commerciales
Olivier Bahon devant le bâtiment qui accueillera bientôt son nouveau magasin.

Denner brouille les cartes commerciales

9 avril 2025 | Textes: Jérôme Christen | Photos: Michel Duperrex
Edition N°3925

Le magasin Denner de la rue Centrale va déménager à la rue de l’Industrie. Pour son gérant Olivier Bahon et sa sœur Delphine, cela signifie également un changement de statut et un plus gros loyer. Par attachement à Sainte-Croix et pour honorer la mémoire de leur père, avec qui ils s’étaient lancés dans cette «aventure» il y a seize ans, ils ont décidé de relever le défi.

«Notre père voulait absolument renouer avec ses origines, après avoir quitté Sainte-Croix il y a plus de cinquante ans. C’est ainsi qu’en 2009, nous nous sommes installés à Sainte-Croix et avons commencé à exploiter un commerce de détail en tant que Denner satellite. Depuis au moins une douzaine d’années, la troisième plus grosse entreprise de commerce de détail tend à abandonner ce statut, préférant la formule de partenaire», explique Olivier Bahon. A Sainte-Croix, elle a eu de la peine à trouver une surface mieux adaptée à ses besoins, si bien que, dans un premier temps, toutes les démarches ont été entreprises pour réaménager l’espace actuel. Mais finalement, un site a attiré l’attention de la direction de Denner, à la rue de l’Industrie 19, à côté de la Migros.

Magasins standardisés

«A l’époque où nous avons ouvert à Sainte-Croix, c’était souvent le gérant qui proposait un lieu à Denner, qui donnait son aval ou non. Aujourd’hui, c’est Denner qui cherche des emplacements pour pouvoir implanter des magasins beaucoup plus standardisés», poursuit celui qui gère également le magasin Denner d’Yvonand qui lui,  est déjà passé de satellite à filiale. Que les surfaces soient carrées ou rectangulaires, les agencements sont identiques et on trouve les produits plus ou moins au même endroit. Au départ, nous avons eu de la peine à nous laisser convaincre, mais depuis que nous avons effectué ce changement, nos ventes ont progressé», reconnaît Olivier Bahon.

Attachés à Sainte-Croix

Dans son futur magasin, il va gagner 30 m2, ce qui n’est pas énorme, mais si l’on ajoute que sa surface actuelle est biscornue, on comprend que la nouvelle configuration va lui permettre d’avoir plus de produits et plus de clarté mais avec une augmentation de loyer conséquente. «C’est un risque que nous avons évalué après une longue réflexion. Nous sommes arrivés à la conclusion que même si notre papa est parti il y a dix ans déjà, cela aurait été compliqué de lâcher ce projet que nous avons lancé en famille pour renouer avec nos origines et il aurait été difficile de quitter les Sainte-Crix qui sont des gens de la montagne extrêmement attachants. Certes, on ne peut pas faire des affaires qu’avec le cœur, mais ça a fait pencher la balance pour nous encourager à relever le défi.»

Plus de produits locaux

Qu’en sera-t-il de la place des produits locaux dans le futur magasin, après la retraite du boulanger Taillaule qui était l’unique fournisseur? «Il y aura du pain local, assure Olivier Bahon. Je suis en pourparlers avec Eric Vuissoz, l’autre boulanger du village, que j’avais d’ailleurs encouragé à s’installer à Yvonand. Ce qui va changer, c’est qu’il y aura aussi du pain Denner. Notre partenariat prévoit un four dans lequel nous faisons nous-mêmes notre pain, ce qui n’est pas le cas actuellement. Ce sera donc le même concept qu’à Yvonand, qui fonctionne bien. De manière générale, Olivier Bahon aura plus de place pour les produits locaux: «C’est la première de mes motivations. Aller discuter, chez les artisans locaux, le vigneron, le fromager, les bouchers.»

Le magasin actuel fermera le 26 avril et le nouveau  ouvrira le 2 mai.  Une pharmacie Sunstore s’installera à côté. La Migros subira aussi des transformations et sera fermée pendant sept semaines dès l’ouverture du  nouveau Denner (le groupe appartient à 100% à Migros depuis 2009), histoire de ne pas laisser partir des clients chez Coop.


«Travailler à faire un centre vivant à Sainte-Croix»

«Nous assistons à un exode en direction de la gare avec la Migros, Denner, une pharmacie et des restaurants. Nous devons nous préoccuper de  l’avenir des commerçants de la rue Centrale et de la rue Neuve qui ont toujours été le centre du village», réagit Joakim Junod, président de la Société industrielle et commerciale de Sainte-Croix. «Nous devons également réfléchir à une approche globale des aménagements de la rue du Tyrol, la place du Marché, celle du Pont et la rue Centrale. Il est nécessaire d’impliquer les commerçants dans une réflexion sur leurs besoins.

Lors de la fermeture des usines Hermès et Paillard, Sainte-Croix avait créé une commission de promotion économique. Ses membres ont décidé lundi soir de lui donner une nouvelle impulsion pour «réussir sa mutation économique et urbanistique», explique Joakim Junod.

«Pour revenir à la rue Centrale, nous pourrions, par exemple,  la mettre en zone 20 km/h, la doter de petites guinguettes et  mettre sur pied des animations avec des artistes et artisans locaux. L’idée est d’intégrer à nos réflexions un acteur de chaque secteur économique local: agriculture, tourisme, hôtellerie-restauration. Et de travailler sur des projets concrets, le premier étant une refonte du centre-ville. Il ne faut pas voir les choses en noir, tout ne va pas si mal, mais il faut travailler ces prochaines années sur un projet qui permette de faire  un centre vivant à Sainte-Croix. »


La Municipalité associe les commerçants

Conscient du problème des vitrines vides à la rue Centrale, le syndic Yvan Pahud relève «que ce transfert a commencé il y a environ dix-sept ans avec le transfert de la Migros de la rue Centrale à la rue de l’Industrie, ce qui a donné un regain d’attractivité à ce secteur proche de la gare». Les fermetures  consécutives de Denner,  du boulanger Taillaule, de la boucherie Junod et de la Banque Raiffeisen  ont conduit la Municipalité, la SIC et la commission de promotion économique à se saisir en priorité de ce dossier. Si l’autorité  a peu de marge face aux difficultés que traverse le commerce de détail, elle peut agir sur les conditions-cadres qui sont de sa sphère de compétence: les aménagements et la mobilité. En vue des travaux de mise en séparatif à la rue Centrale, elle souhaite que les commerçants fassent des propositions d’aménagements pour le secteur du centre historique, qui comprend également la rue Neuve, la rue du Tyrol, la place du Marché et celle du Pont. Une séance aura lieu le 25 août pour qu’ils puissent exprimer leur vision et leurs besoins.  Cette démarche permettra de répondre au postulat «pour une redynamisation du centre du village et des commerces locaux», déposé il y a trois ans et demi par Steve Benoit, président du groupe UDC.