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Dernière ligne droite à l’Hôtel du Chasseron
Nicolas Blanchard, avec son épouse Thay et ses parents Josiane et Jean-Luc Blanchard.

Dernière ligne droite à l’Hôtel du Chasseron

7 février 2025 | Textes et photo: I. Ro.
Edition N°3887

Nicolas Blanchard s’apprête à passer la main après dix ans d’exploitation avec l’aide de ses proches.

Depuis le début de l’automne, le Chasseron bénéficie d’un climat idéal: froid la nuit, ensoleillé la journée. Alors que le Plateau est le plus souvent sous la chape du stratus, le public se rue sur les hauteurs, histoire de jouir, ne serait-ce que quelques heures, du temps ensoleillé. C’est dans ce contexte que Nicolas Blanchard et ses proches abordent les derniers mois d’exploitation. Au terme de deux mandats totalisant dix ans, ils ont décidé de se tourner vers d’autres activités.

«Il n’y a pas de lassitude, mais c’est le moment de faire autre chose. Dix ans, c’est déjà une belle période. Ce sont dix années exceptionnelles et avec un panorama pareil, ce n’est pas un travail», explique le tenancier amusé.

Même si, ces journées comme celles du week-end dernier, il faut faire face à de fortes affluences. Celles-ci sont heureusement suivies de deux jours de congé qui permettent à tout le monde de récupérer. Et si durant la période automne-hiver le panorama est généralement idyllique, il y a aussi des journées moins lumineuses, forcément plus longues. Mais elles sont rares.

«On a eu des rencontres extraordinaires avec les clients et je pense qu’on en aura encore ces prochains mois», ajoute le tenancier. Si le temps reste ce qu’il est, avec si possible un peu de neige fraîche en prime pour les relâches scolaires, ce sera parfait.

Au Comptoir

Aux environs de la mi-mars, l’Hôtel-Restaurant du Chasseron fermera ses portes jusqu’au début du mois de mai. Nicolas Blanchard enchaînera avec le Comptoir du Nord vaudois, où il tient l’un des restaurants. Et puis, avec son épouse Thay, ils s’accorderont quelques vacances.

La transition est une réalité

Alors que la conversion des stations de moyenne montagne vers un tourisme des quatre saisons est en route – il n’est plus possible de garantir un enneigement, même artificiel, durant tout l’hiver –, le Chasseron a, lui, fait sa transition depuis longtemps. Un peu par la force des choses.

En effet, aucune installation de remontée mécanique n’y conduit directement. Il faut donc y accéder à la force des mollets: à pied, en raquettes et avec des peaux de phoque. Les randonneurs de la région mettent souvent la montée au Chasseron au programme pour s’entraîner lorsqu’ils ne disposent pas de beaucoup de temps.

Pour les autres, même en famille, c’est une randonnée facile aussi bien en été qu’en hiver. Depuis le parking des Rasses, il suffit d’une heure pour accéder à cette plateforme privilégiée qui offre un panorama époustouflant sur les Alpes, mais aussi sur toute la chaîne jurassienne.

Quant à la descente, beaucoup la font en luge. On a même vu un skieur chevronné se lancer dans la pente avec son chien sur les épaules!

Et en termes de fréquentation, janvier-février et juillet-août sont, de l’aveu du tenancier, les meilleurs mois.

Diversification limitée

Au moment où il s’apprête à passer la main – Arma Suisse, propriétaire de la bâtisse, va sans doute lancer un appel d’offres –, Nicolas Blanchard n’exprime aucun regret. Enfin un tout petit quand même: celui de ne pouvoir développer d’autres activités sur le site.

En effet, il aurait volontiers poursuivi l’expérience des barriques transformées en chambre à coucher, offrant un panorama nocturne exceptionnel dans un contexte d’intimité. Mais les contraintes légales et les restrictions imposées par le bâilleur ont empêché le renouvellement de cette initiative. Cela dit, il a quand même pu proposer la Bulle, et cela avec les autorisations nécessaires.

Car au-delà du panorama, la clientèle privilégie aujourd’hui les «expériences» originales. Les montées au sommet au clair de lune en font partie. Mais passer la nuit à quelque 1600 mètres d’altitude avec le sentiment d’être seul au monde est bien évidemment très attrayant. «L’intérêt manifesté par les gens nous a démontré que cela aurait marché», analyse le tenancier. Et de relever sur la lancée que le chiffre d’affaires hôtelier ne représente que les 5%: «C’est la restauration qui fait tourner l’affaire.»

Des actions ponctuelles

Quitter l’Hôtel-Restaurant du Chasseront – le bail se termine à fin septembre – est une chose, mais pour quoi d’autre? «Pour faire quelque chose d’autre», répond Nicolas Blanchard, un peu taquin.

Et d’ajouter: «Je fais déjà les comptoirs (Yverdon-les-Bains, Payerne), des festivals, les Brandons d’Yverdon. Ça bouge plus qu’ici.»Jamais en manque d’idées, le trentenaire veut développer un service traiteur à l’enseigne des «Traditions suisses». Cela lui permettra ainsi de varier ses activités.


L’appui de la famille

Il y a bientôt dix ans, nous avions présenté la famille Blanchard lors de son arrivée au Chasseron. Jean-Luc, le papa, tenancier pendant plus de trois ans de la cabane de Tracuit, dans les Alpes valaisannes, avait alors décidé de revenir plus près. La construction de la nouvelle cabane, un véritable hôtel, par la section Chaussy du Club alpin suisse (Aigle), lui avait permis de faire la transition. Il a ainsi été le dernier gardien de l’ancienne cabane.

Auparavant, ce menuisier patenté – il a suivi une formation de cuisinier article 41 –, a tenu avec son épouse Josiane Mauron Blanchard, de 1998 à 2007, l’Hôtel du Lac, à Yverdon-les-Bains, prolongeant ainsi l’histoire de la famille Mauron à la tête de cet établissement très apprécié, acquis ultérieurement par Max Studer Intérim.

Après une formation de cuisinier suivie au Grand Hôtel des Rasses, alors propriété de Hans et Raymonde Wyssbrod, Nicolas Blanchard a pris en main les fourneaux du Chasseron en 2015, avant de succéder à son père en 2018.

Tout au long de ces années, le tenancier a bénéficié de l’appui de ses proches, en particulier de sa maman, qu’il n’est pas rare de rencontrer là-haut, opérant aussi bien au service qu’à d’autres tâches, tel le repassage.