Distributeurs attaqués: et maintenant?
16 mai 2025 | Texte: Robin Badoux | Photo: Dupperex-AEdition N°3944
La saga des attaques de distributeurs automatiques semble avoir finalement atteint une accalmie dans la région. Alors que les banques Raiffeisen et BCV n’ont pas tardé à remplacer leurs machines à Sainte-Croix ou à Montagny, La Poste lambine un peu, mais voit déjà plus loin avec d’autres solutions sur le long terme.
«La Suisse semble constituer une cible de choix», remarquait l’Office fédéral de la police fedpol en janvier 2025, au moment de faire le bilan de six années particulièrement denses en attaques de distributeurs automatiques de billets. Alors qu’en 2018 on comptait 18 attaques sur tout le territoire helvétique, le nombre moyen d’infractions s’est fixé autour des 50 par année depuis 2019. En 2024, fedpol a recensé 48 attaques, dont 28 à l’explosif et 5 au gaz.
Proches de chez nous, les distributeurs automatiques ont été la cible de malfrats à Concise en mai 2022 (bancomat Raiffeisen), à Yvonand en mars 2024 (postomat) et à Sainte-Croix en juillet 2024 (Raiffeisen). à Montagny-près-Yverdon, deux attaques ont eu lieu, d’abord sur un postomat en juillet, puis sur un bancomat de la BCV en décembre 2024. Dans certains cas, les bandits sont repartis bredouilles, ou avec un butin inconnu.
Pour l’instant, les enquêtes sont encore en cours pour ces cas en particulier, confirme la Police cantonale vaudoise. fedpol précise de son côté que «selon l’état actuel des enquêtes, plusieurs groupes de criminels sont actifs en Suisse et mènent des attaques de manière ciblée. Le choix des distributeurs automatiques de billets, le type d’attaque et la manière de prendre la fuite les différencient les uns des autres. Les attaques à l’explosif sont généralement le fait de deux réseaux criminels: les Roumains et les Néerlandais. Des auteurs isolés qui imitent leurs méthodes viennent s’y ajouter. Les explosions au gaz sont le plus souvent commises par des réseaux serbes ou roumains. Les attaques à l’aide d’outils sont plutôt exécutées par des criminels de l’espace albanophone. L’attaque est perpétrée par trois ou quatre personnes. Pour la fuite, elles utilisent souvent plusieurs véhicules, parfois volés, sans plaque d’immatriculation ou alors avec de fausses plaques, et elles traversent les frontières cantonales ou nationales.» fedpol précise que, bien souvent, ces attaques sont l’œuvre de groupes bien équipés et préparés, et que la lutte contre ces délits demande une meilleure compréhension du fonctionnement des réseaux criminels.
2025, période d’accalmie
En 2025, la Police cantonale vaudoise n’a dû faire face qu’à une attaque en terres vaudoises, à Mies le 3 avril dernier, où les bandits sont repartis bredouilles. Ces derniers mois ont donc été calmes dans la région. La raison est difficile à déterminer. Contactée, la Police cantonale vaudoise n’a pas souhaité avancer d’hypothèse, étant donné qu’il s’agit «d’enquêtes en cours et supervisées par le Ministère public de la Confédération», explique-t-elle.
Dans tous les cas, les banques concernées se sont mises en branle pour remplacer le matériel endommagé. La BCV a été la plus rapide. Son bancomat, somme toute peu abîmé par l’attaque du 8 décembre 2024, est à nouveau fonctionnel depuis le 19 février suivant. «La remise en service d’un bancomat dépend de la disponibilité et des délais de livraison d’équipements fournis par des prestataires externes. La remise en service du bancomat BCV à Montagny-près-Yverdon a été réalisée dans le meilleur délai possible», explique Nicolas Gay-Balmaz, rédacteur BCV.
De son côté, la Banque Raiffeisen Mont-Aubert Orbe a aussi fait en sorte de remplacer au plus vite son matériel à Sainte-Croix. Son bancomat a pu être remis en service en décembre 2024. L’agence, ravagée par les explosifs utilisés par les malfrats, a également dû être remise en état. Elle devrait ouvrir le 22 mai prochain. «Les bancomats demandent beaucoup de manutention et beaucoup d’entretien, quasiment tous les jours, indique Cyril Rod, président de la direction. Face à la recrudescence des attaques, les assurances ont d’ailleurs revu leurs tarifs à la hausse. Mais nous, nous n’évaluons pas les avantages ou les inconvénients à conserver nos bancomats, dont 100% de notre parc est actif. Nous nous contentons de répondre à un besoin de la population.»
Vers un réseau unique?
La Poste, pour sa part, n’a pas encore remplacé ses appareils à Yvonand ou en Chamard. «La Poste prévoit de remettre en service un postomat à Yvonand d’ici à la fin du mois de septembre 2025. À Montagny-près-Yverdon, un postomat Drive-through était en service jusqu’à l’explosion. Mais ce type d’appareil n’est plus disponible entre-temps et ne peut donc pas être remplacé. La Poste souhaite toutefois remettre en service un postomat et examine de nouvelles options sur place», explique Stefan Dauner, porte-parole, qui précise: «Une vérification sérieuse de toutes les options prend du temps. En général, chaque reconstruction d’un postomat dépend de différents facteurs, en partie externes. Il s’agit notamment d’un examen précis de l’emplacement, des mesures techniques de sécurité et de la planification des travaux. Pour chaque reconstruction d’un postomat, nous examinons différents facteurs liés à l’emplacement, comme le nombre de transactions, les investissements nécessaires et les critères liés à la sécurité.»
Toutefois, parallèlement à la reconstruction de ses postomats endommagés, La Poste voit plus loin. Il y a un an, le géant jaune a émis l’idée de rassembler l’entier du réseau des distributeurs automatiques de billets sous son giron. «La Poste étudie actuellement une offre qui permettrait aux banques de confier l’exploitation de leurs distributeurs d’argent à La Poste ou de regrouper leurs distributeurs avec le réseau de postomats. La planification d’une seule et même entreprise permettrait une gestion plus stratégique et donc plus économique», continue Stefan Dauner. Une manière, selon le porte-parole, de réduire les coûts alors que les distributeurs sont de moins en moins utilisés: «Cela et la tendance croissante aux moyens de paiement numériques posent de nouveaux défis. Parallèlement, l’approvisionnement en espèces reste un sujet important en Suisse.»
En attendant, les polices cantonales et fedpol continuent de faire de la prévention auprès des banques pour prévenir les attaques. La Police cantonale vaudoise propose par exemple gratuitement des analyses sécuritaires sur place pour des conseils en matière de prévention: votrepolice.ch/prestations.