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Dix ans de fêtes, d’échanges et de partage

26 septembre 2021

La Table d’hôtes de Philippe et Audrey Roncière, qui reçoit chaque mois à Lignerolle des seniors de la région pour un moment de partage dans le cadre du programme de l’association Pro Senectute Vaud, a fêté son dixième anniversaire.

Lundi, début d’après-midi: repues, assises devant un jeu de carte, chocolats et tasses de café sur la table, les seniors de la Table d’hôte de Lignerolle, toutes des femmes du coin, attendent avec impatience la fin de mon intervention journalistique pour se lancer dans une partie de jass passionnée. Ponctuant la conversation, les blagues fusent, et le doux humour vache côtoie le pince-sans-rire, comme pour démontrer à mes yeux de visiteuse l’étendue de la familiarité construite au fur et à mesure des années autour de cette même table. Il faut dire que certaines sont là depuis la première heure et ont vu défiler toutes les têtes, comme celle que l’ont surnomme «La Mémé», la «vétérane» de la table, dont la première participation date de 2011.

Le concept derrière les Tables d’hôtes de Pro Senectute Vaud est simple: des bénévoles organisent sur une base régulière des repas maison afin de proposer aux seniors en recherche d’expériences sociales un moment convivial. Avec une centaine de tables comme celle-ci à travers le canton, le programme trouve son public, que ce soit en ville ou à la campagne; un succès que constate Mehregan Joseph, coordinatrice des Tables conviviales, tout en espérant son expansion.

«Le rêve, ça serait qu’on ait une table comme ça dans chaque commune du canton. Il existe de petits villages, comme Lignerolle, où il n’y a plus de restaurant ou d’autres endroits publics de rencontres, et il est donc important pour les gens de cette génération d’avoir un lieu où l’on peut voir du monde», explique-t-elle. «Ce qui est génial, c’est que le principe est le même, mais que chaque table est unique et dépend de ses bénévoles et de ses participants. Ce sont chacune un microcosme propre, à l’équilibre et aux amitiés spécifiques, et aucune ne se ressemble.»

Pro Senectute Vaud s’applique également à varier ce concept de manière à accommoder les intérêts et disponibilités des participants et des bénévoles, comme pour les Tables au bistrot, où, plutôt que de cuisiner eux-mêmes, les volontaires emmènent leur groupe au restaurant. Cette année, l’association a également décidé d’étendre ses Tables de Noël à tout le canton, afin de donner une occasion à ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas s’engager sur un bénévolat régulier de participer à égayer les fêtes de fin d’année des personnes âgées isolées.

La Semaine du Goût, quand à elle, est l’occasion d’emmener les intéressés dans divers domaines agricoles du canton de Vaud et de coupler visite des lieux et repas local.

Le couple de bénévoles lignerollois, pour sa part, semble particulièrement attentionné vis-à-vis de son microcosme. «Philippe met les petits plats dans les grands pour le repas, et ensuite ils jouent aux cartes, parfois jusqu’à la fin de l’après-midi… il fait même parfois les trajets pour aller chercher celles qui ne peuvent pas venir elles-mêmes», sourit la coordinatrice. «On mange très bien, on est très contentes, c’est notre petit plaisir de se retrouver le lundi, et on a un cuisinier merveilleux… des fois on est presque déçues de rentrer chez nous pour manger du pain et du fromage!», ironise la doyenne du groupe.

La plupart des participants découvrent les Tables par le bouche-à-oreille, souvent emmenés par une connaissance. Comme à Lignerolle, les hommes ont tendance à être rares, que ce soit par manque d’intérêt, parce qu’ils fréquentent d’autres cercles ou parce que l’espérance de vie plus élevée des femmes impose naturellement à ces dernières plus de temps à remplir. «C’est une histoire de femmes! Un mec au milieu de tout ça, vous imaginez?», s’amuse une participante en montrant l’assemblée féminine d’un grand geste. «Il y en a qui sont venus, mais ils ont eu peur…», rigole-t-elle. Malgré tout, l’ouverture prime: «On se connaît toutes, mais s’il y en a un qui vient et qui ne connaît pas, on l’intègre! On ne lui demande que trois choses, c’est de jouer aux cartes, de ne pas ronchonner et de garder ses mains sur son jeu!»

Carline Estermann