Ecoute Voir, pour une accessibilité aux arts vivants
19 novembre 2024 | Méribé EstermannEdition N°3834
L’association Ecoute Voir, fondée en 2014, favorise l’accès au théâtre en Suisse romande pour les personnes en situation de handicap visuel et/ou auditif. Créée à Yverdon-les-Bains, elle fêtait en beauté ses dix ans jour pour jour, jeudi dernier à Vevey.
Ecoute Voir… Un nom bien choisi pour cette association yverdonnoise qui s’est donné comme mission, il y a dix ans déjà, de créer des ponts entre les milieux culturels et les personnes malvoyantes, aveugles, malentendantes ou sourdes. Grâce aux mesures inclusives proposées par l’association, les personnes en situation de handicap sensoriel peuvent profiter du théâtre au même titre que tout le monde, et ce à travers toute la Suisse romande. Ces mesures incluent principalement l’audiodescription, l’interprétation en langue des signes et le surtitrage de spectacles et pièces en tout genre. Une entreprise couronnée de succès, puisque Ecoute Voir a proposé depuis sa création plus de 400 mesures d’accessibilité. La codirectrice de l’association, Anne-Claude Prélaz Girod, revient sur cette dernière décennie, non sans émotion.
Le chemin parcouru
«Au départ, Corinne Doret Bärtschi (l’autre codirectrice de l’association, responsable des mesures d’audiodescription) a créé Ecoute Voir. De mon côté, je dirigeais le projet appelé Sourds&Culture, qui avait les mêmes objectifs que cette dernière. On a collaboré pendant plusieurs années, puis on a réfléchi à regrouper les deux associations pour n’en faire qu’une», témoigne Anne-Claude Prélaz Girod, responsable des mesures d’interprétation en langue des signes et interprète depuis une trentaine d’années. Un rapprochement qui a fait l’objet d’une grande réflexion, puisqu’un des grands défis de l’association reste la question du budget. «Le financement n’est jamais simple pour ce genre de projets. Il fallait qu’on soit sûres de ne pas perdre certains financeurs si l’on se regroupait. Mais au final on est très heureuses d’avoir fait cette fusion, parce qu’on est plus fort à plusieurs.» Malgré ces défis budgétaires permanents, la codirectrice revient avec émotion sur son ressenti pour cet anniversaire des dix ans: «On est une toute petite asso qui a fait de grandes choses, on peut être fiers de ce qu’on a réalisé. Oui, il y a beaucoup de fierté devant le chemin accompli, parce que ce n’était pas gagné d’avance», conclut Anne-Claude Prélaz
Traduire les pièces, un défi
L’entreprise d’Ecoute Voir n’est pas de tout repos; pour une minute de spectacle, il y a une heure de préparation en amont. Adapter les pièces représente également un défi: comment décrire, par oral, écrit ou langue des signes, l’essence d’une danse par exemple? Un travail délicat qui nécessite un aller-retour constant entre les responsables des mesures, les comédiens et des personnes en situation de handicap sensoriel pouvant donner leur avis.
Olivier Trolliet, habitant de Mathod, est une de ces personnes. Etant sourd, il assiste régulièrement aux représentations assistées par Ecoute Voir et travaille aussi sur la traduction des pièces en langue des signes. «Les spectacles, c’est propre à la culture des entendants», signe-t-il, tandis que sa femme, Nathalie Trolliet, se charge de la traduction. «Je me souviens de la première fois que j’ai assisté à un spectacle, ça faisait bizarre de regarder l’interprète en même temps que les comédiens. Maintenant, on a l’habitude. Ecoute Voir, c’était vraiment une belle découverte et une ouverture», conclut-il. On ne peut donc qu’espérer qu’Ecoute Voir continuera ses activités en Suisse romande.