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Invasion de petites bêtes infernales
Champagne, 24 juillet 2018. Doryphores. © Michel Duperrex

Invasion de petites bêtes infernales

25 juillet 2018 | Edition N°2296

Champagne – Les doryphores, des coléoptères qui se nourrissent des feuilles de patates, ont envahi une partie du village. Inoffensifs, ils répulsent les habitants.

«C’est l’une des plaies d’Egypte.» La formule est sur toutes les lèvres depuis le week-end dernier à Champagne. A l’image de l’invasion de sauterelles qui déferle sur la terre, contée dans la Bible, une vague de doryphores – des insectes friands de feuilles de patates – s’est abattue sur une partie du village. Si ces coléoptères sont inoffensifs, ils ont mis les nerfs des habitants à rude épreuve. «Il y en avait vraiment partout, raconte Renée Perrin, dont la maison se trouve juste en face du champ de pommes de terre qui hébergeait les envahisseurs avant qu’ils n’essaiment dans la localité. Ils grimpaient partout le long des façades, j’en avais jusqu’au toit. Et comme j’ai toujours les portes ouvertes, il y en avait à l’intérieur. Dimanche, j’en ai pleuré, tellement c’était épouvantable», souffle la retraitée.

La présence des doryphores en Suisse n’a pourtant rien de nouveau. Cela fait même des «centaines d’années» qu’on les connaît, indique André Zimmermann, collaborateur scientifique à la Station de protection des plantes au sein de la Direction générale de l’agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires du canton. Mais cette année, le printemps particulièrement doux a boosté leur prolifération, et pas seulement dans le Nord vaudois. Et les insectes se sont aventurés en dehors de leur terrain de jeu, les champs de patates: «Ce qui est un peu particulier, cette année, ce sont les annonces de la présence de doryphores à proximité des habitations», poursuit André Zimmermann. Une situation d’autant plus compliquée, à Champagne, que la plantation de pommes de terre qui a laissé échapper les petites bêtes indésirables se trouve au beau milieu des habitations.

«C’est du jamais-vu»

Exploitant du champ, Antoine Basset a d’ailleurs été le premier surpris par l’invasion dont ont été victimes les Champagnoux: «C’est du jamais-vu», rapporte l’agriculteur, qui pense que les coléoptères sont allés chercher refuge ailleurs lorsque les insectes ont été privés de leur habitat et de leur nourriture habituels après que les rames de pommes de terre ont été séchées pour éviter que les tubercules ne deviennent trop gros. «C’est la nature», soupire le travailleur de la terre, impuissant face au phénomène. Inutile de songer à traiter la parcelle incriminée, désormais, puisque les insectes ont déjà tous déserté. Et Renée Perrin en est parfaitement consciente: «Le paysan n’y peut rien, assure-t-elle. On sait que quand il y a des patates, il y a des doryphores.»

Plutôt que de chercher un coupable, la retraitée a donc décidé de se retrousser les manches pour se débarrasser des envahisseurs à l’aide de son aspirateur à eau. Dans un jardin voisin, Gisèle Duperrex s’est également mise en chasse. «Je les écrase sur le sol avec le pied: ça fait schloc et ça laisse échapper un liquide brun, c’est dégoûtant», détaille-t-elle. Mais elle semble avoir trouvé une parade: «J’ai sprayé avec un remède de grand-mère à base de bicarbonate de soude, d’huile d’olive, d’eau et de citronnelle, explique-t-elle. Depuis, il semble qu’il y en a moins.»

Est-ce la formule magique de Gisèle Duperrex ou simplement   la fin d’un cycle, toujours est-il que le phénomène semble se calmer. «Le gros de la vague est passé. Le plus spectaculaire, c’était le week-end dernier», confirme Yves Guilloud, vice-syndic de Champagne. Pour calmer les esprits, la Commune a toutefois décidé de diffuser un communiqué de presse, hier, dans lequel elle assure qu’il n’y a aucun danger pour la population et que la présence de l’insecte devrait disparaître d’ici deux à trois semaines. Mais «il y a mieux comme population pour animer le village», glisse Yves Guilloud.

Caroline Gebhard