Itinéraire d’un Ange
12 mars 2015Football – 1re ligue – Du centre de formation du Havre au Mont, en passant par la Major League Soccer, Ange Nsilu a claqué de nombreux buts. Retour sur le parcours du nouvel attaquant d’Yverdon Sport avant le derby contre Echallens, samedi à 17h30.

Calme, posé, Ange Nsilu revient sur les étapes de son parcours en se félicitant de ses succès, mais sans occulter ses regrets.
Les coups de tête, c’est bien pour marquer des buts. Mais cela s’arrête à peu près là pour Ange Nsilu qui, à 29 ans, donne l’impression d’avoir bien réfléchi chacune des étapes de son itinéraire, chacun de ses choix de vie primordiaux. Il avoue en regretter certains, mais parvient à les assumer en se remémorant celui qu’il était, et ce qui l’animait alors. A Yverdon Sport, où il est arrivé cet hiver en provenance du Mont, qui évolue deux ligues au-dessus, il a signé pour une certaine qualité de vie, lui qui habite à quelques minutes à pied du Stade Municipal, mais aussi pour un projet. Celui de monter en 1re ligue promotion. «Je n’aime pas jouer pour rien, tranquille, sans objectif particulier, martèle-t-il. A ce titre, je suis bien ici, dans un club ambitieux qui n’a rien à faire à ce niveau.»
La 1re ligue, celui qui grandi au Havre peut en parler: il connaît. Il s’est fait un nom en Suisse romande en participant aux quatre du Mont, dont la double qui a conduit l’équipe, désormais installée à Baulmes, en Challenge League. Des souvenirs tout frais, et excellents.
«Ce sont deux saisons qui se sont déroulées dans une certaine continuité, rappelle-t-il, avec un grand sourire. Notre équipe, c’était une machine de guerre, composée de joueurs qui se connaissaient depuis longtemps. L’ambiance était extraordinaire.»
Automne difficile
En deuxième division, beaucoup de choses ont changé, dont une bonne partie du contingent. De son côté, Ange Nsilu s’est blessé et il n’a signé que six apparitions durant l’automne, pour un seul but, lui qui n’en claque jamais moins d’une douzaine par saison depuis des années. Lors de l’exercice 2008-2009, il avait d’ailleurs déjà été un des grands artisans de la première promotion du Mont en Challenge League, sans y goûter lui-même: il avait alors saisi l’opportunité d’aller jouer en Major League Soccer. En un petit match, disputé lors d’un stage de l’équipe à Miami, il a convaincu les dirigeants de DC United de l’enrôler.
«Les Etats-Unis, ce n’était pas quelque chose que j’avais en tête, avoue-t-il. Mais j’y ai été surpris par la qualité des infrastructures et j’ai pu profiter de mon année et demie là-bas pour apprendre l’anglais, note-t-il. Ça a été une super expérience.» Quand son contrat s’est terminé, alors qu’il aurait pu retrouver de l’embauche en MLS, il a décidé de retraverser l’Atlantique. «Ce choix, je le regrette, reconnaît-il. Dans un coin de ma tête, je me disais que le football, c’était en Europe.»
Des attaches vaudoises
Il pense alors avoir sa chance en Ligue 1, en Ligue 2, en Belgique ou en Angleterre. «Mais on m’a proposé le Danemark, la Suède, le Maroc. Ça ne m’intéressait pas, soupire-t-il. A ce moment-là, autant rester aux Etats-Unis!» Et, parce qu’il n’y avait que d’excellents souvenirs, c’est au Mont qu’il a fini par rebondir, avec le succès que l’on sait. Il a ainsi continué de développer de solides attaches dans le canton de Vaud. Il est notamment très proche du président Serge Duperret. «On parle beaucoup. Je me sens comme son fils», ose-t-il.
Bien dans ses chaussures à crampons au Châtaignier, où il a passé, en tout, cinq saisons et demie, il a éconduit nombre de courtisans. «Avec mes statistiques, bien sûr que j’ai eu des offres, lance-t-il. Quand nous étions en 1re ligue promotion, à Noël, j’ai par exemple refusé un contrat à Lugano, en Challenge League. Je me disais qu’on pouvait y monter avec Le Mont, et que ce serait mieux.» Ange Nsilu n’est pas un mercenaire -YS ne sera que le cinquième club de sa vie- et il essaie, autant que possible, de tout prendre en compte lorsqu’il évalue les opportunités qui s’offrent à lui. «Par exemple, il n’y a pas que l’argent, assure-t-il. Aux Etats-Unis, je gagnais beaucoup plus qu’au Mont… Mais je n’étais pas plus heureux.»
Pas de plan B
Le nouvel attaquant yverdonnois vit du football depuis toujours, pour ainsi dire. Il n’a jamais exercé d’autre profession. «Au Havre, j’habitais dans le même immeuble que Souleymane Diawara (48 sélections avec le Sénégal, ndlr), qui est devenu footballeur professionnel. Ça m’a inspiré», sourit-il, en avouant qu’il n’avait jamais réfléchi à un «plan B», au cas où il n’arriverait à rien avec un ballon. De 14 à 20 ans, il a fréquenté le prestigieux centre de formation du Havre, dont sont sortis de nombreuses stars. Il y a ainsi côtoyé Lassana Diarra, aujourd’hui à Tottenham, et le portier marseillais Steve Mandanda, avec qui il partage d’ailleurs des origines congolaises. «J’ai des souvenirs incroyables de cette période, mais il fallait s’accrocher. A l’école aussi! On nous privait de match lorsqu’on faisait de mauvaises notes», raconte celui qui, avant de ne se consacrer qu’au football, a obtenu son brevet d’études professionnelles en comptabilité.
La trentaine approchant, Ange Nsilu commence à penser à sa reconversion. «Je ne me vois pas quitter le milieu du sport», glisse-t-il, au début de ses réflexions en la matière. Pour le reste, son avenir est déjà en bonne partie tracé: en juin, il épousera Margaux, qu’il a rencontré en Normandie voilà dix ans et qui l’a toujours suivi depuis, et il pense rester en Suisse, «pour y trouver la stabilité». En attendant, celui qui a déjà débloqué son compteur dimanche dernier contre Naters (défaite 2-1) espère faire trembler les filets du Stade Municipal, dès samedi, à 17h, contre Echallens. Pourquoi pas d’un bon coup de tête?