Binta Ndiaye s’est arrêtée au stade des huitièmes de finale, hier pour ses premiers Jeux olympiques. La Vaudoise de 19 ans oscillait entre déception, après sa défaite, et fierté du chemin parcouru pour en arriver là.
Texte: Muriel Ambühl, Paris | Photo: KEYSTONE / Anthony Anex
Les gradins entourant les deux tatamis de l’Arena Champ-de-Mars étaient pleins, hier matin. La judokate du Mont-sur-Lausanne Binta Ndiaye, qui s’entraîne régulièrement au Centre national de performance à Yverdon, a eu droit à une entrée en lice devant un public en feu, le Français Walide Khyar ayant remporté son combat juste avant que la Vaudoise ne monte sur l’estrade.
Pas de quoi déconcentrer la sportive de 19 ans, qui a facilement pris le meilleur sur son adversaire argentine Sofia Fiora. Celle qui occupe le 16e rang mondial a cependant ensuite été battue sur waza-ari au terme du temps réglementaire par l’Israélienne Gefen Primo, 7e de la hiérarchie mondiale.
Binta Ndiaye, comment analysez-vous, à chaud, votre défaite en huitièmes de finale?
J’ai bien commencé, j’ai tout de suite mis la pression sur ma concurrente, et je pense que ça l’a un peu perturbée, car les autres filles la laissent généralement plus s’installer, prendre ses marques. Mais il m’a ensuite manqué un peu de précision sur le travail de kumi-kata, donc la pose des mains, qui est une partie essentielle pour pouvoir faire tomber son adversaire. J’ai été en dessous à ce niveau-là, surtout durant la deuxième partie du combat. Puis l’Israélienne a marqué au score assez proche de la fin, quand il restait environ une minute, donc c’était difficile de revenir.
Vous avez passé près d’une minute au sol, était-ce à ce moment-là que vous auriez dû faire la différence?
J’y étais presque, oui, les arbitres m’ont bien laissé travailler, mais j’ai manqué de précision, de contrôle dans mes mouvements.
Contrairement à votre adversaire des 16es de finale, l’Argentine Sofia Fiora, que vous n’aviez jamais affrontée mais que vous avez aisément battue, Gefen Primo vous avait déjà posé des problèmes l’an passé aux Mondiaux…
J’avais déjà perdu contre elle à Doha, mais je vois qu’il y a quand même du progrès par rapport à la dernière fois. De l’intérieur, j’ai l’impression que j’avais quand même un peu l’ascendant pendant le combat. Du fait de l’avoir déjà affrontée, j’avais une stratégie plus précise contre elle. Mais en entrant dans la compétition, je savais que je devrais battre une membre du top 8 mondial pour pouvoir accéder aux quarts de finale et prétendre à une médaille.
Qu’allez-vous retenir de votre première expérience olympique?
Le positif! Je pense que j’ai eu une bonne attitude sur les deux combats, que mon envie de gagner s’est vue. Et je vais continuer de m’améliorer, comme je le fais tous les jours à l’entraînement. Il n’y a pas de secret, les choses prennent du temps, il faut travailler.
Comment jugez-vous votre progression depuis que vous avez rejoint le circuit seniors?
Tout est allé très vite, puisqu’en 2021 je combattais encore chez les M18, même pas en M21. Quand je suis arrivée sur les compétitions seniors, la période de qualification pour les Jeux olympiques commençait, donc j’ai dû m’adapter rapidement. Je suis consciente que j’ai parcouru un beau chemin jusqu’ici.
«Je suis assez déçue de ma performance, mais fière de mon parcours jusqu’ici. Et j’ai plein de pistes à travailler pour être encore meilleure.»
Et la dernière phase de qualification n’a pas été facile, avec la bataille entre Fabienne Kocher et vous pour le seul ticket suisse disponible pour la catégorie -52 kg femmes…
C’était très serré, donc on a les deux été obligées de participer à beaucoup de compétitions pour pouvoir décrocher la qualification. C’est clair qu’on n’était pas à chaque fois à 100% physiquement, car c’est difficile d’enchaîner les tournois, les meilleurs judokas ne s’alignent pas en compétition tous les week-ends. Il y a donc eu plein de challenges, et j’ai su en relever certains. Mais pas aujourd’hui.
La déception prédomine logiquement après cette défaite, mais y a-t-il aussi de la fierté en regard du chemin parcouru ces derniers mois?
C’est vrai que j’étais quand même assez fière en décrochant ma qualification pour les JO. Il va falloir un peu de temps pour que je prenne du recul sur la situation. Là, je suis assez déçue de ma performance aujourd’hui. Je pense que j’aurais pu et dû gagner ce deuxième combat, il était à ma portée. Mais oui, je suis fière de mon parcours jusqu’ici. Et j’ai plein de pistes à travailler pour être encore meilleure.
Les JO sont un événement hors normes. Cela a-t-il été facile pour vous de vous concentrer sur la compétition?
Je ne me suis pas laissé impressionner. Le système reste le même que pour les autres compétitions, avec des étapes telles que la pesée, le contrôle des kimonos. Donc j’étais dans ma routine de compétition. J’ai fait ça des centaines de fois. Et je n’ai pas accordé d’importance au fait d’être jeune, car j’ai peut-être moins d’expérience que certaines adversaires, mais il y a aussi des choses qui jouent en ma faveur, comme le fait d’avoir davantage d’énergie. Et je sais qu’il est encore possible que je participe à d’autres Jeux dans le futur.
Qu’allez-vous faire du temps qu’il vous reste à Paris?
Je n’ai pas encore décidé, je pense que c’est bien d’improviser un peu. Mais je vais passer du temps au village olympique et sortir un peu pour profiter de la ville.