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La huppe fasciée est de retour dans le Nord vaudois

5 août 2014

Grâce à un programme de conservation, cet oiseau rare revient peu à peu dans la région. Rencontre sur les hauts de Concise avec ceux qu’il passionne.

Des huppes fasciées vivent, durant l’été, dans un vignoble près de Concise.

Des huppes fasciées vivent, durant l’été, dans un vignoble près de Concise.

C’est dans un nichoir, situé dans les vignobles près de Concise, qu’un couple de huppes fasciées s’est installé pour l’été. Parmi les cinq oeufs couvés, seuls quatre poussins ont survécu. Oiseau migrateur, la huppe fasciée se caractérise par son plumage orangé et ses ailes arrondies noires et blanches. Sa particularité est de posséder une huppe érectile aux pointes noires. C’est grâce à son bec, long et légèrement recourbé, qu’elle chasse sa nourriture au sol. Essentiellement insectivore, elle fait de la courtilière sa proie favorite. En l’absence de celle- ci, elle se nourrit de larves de coléoptères, de sauterelles, de mouches, de vers et de limaces. La huppe fasciée fouille les moindres interstices des écorces et sonde l’herbe des talus à la recherche de nourriture.

Jusque dans les années cinquante, l’upupa epops, de son nom latin, était une espèce courante en Suisse. Cependant, suite à l’intensification de l’utilisation des pesticides et à la destruction de ses milieux, cet oiseau s’est fait de plus en plus rare dans nos régions. Pierre-Alain Ravussin, ornithologue passionné, se souvient que c’est en 1979 qu’on a eu la dernière preuve que cet oiseau vivait dans le Nord vaudois.

Sauvée par des passionnés

Les petits sont bagués à l’âge de trois semaines.

Les petits sont bagués à l’âge de trois semaines.

Depuis quelques années, le Gobe (Groupe Ornithologique de Baulmes et Environs), une association active auprès des oiseaux, réunit des passionnés d’ornithologie. Parmi les nombreuses espèces suivies, la huppe fasciée a fait l’objet d’un programme de conservation afin d’étudier l’espèce et de favoriser l’augmentation de sa population. Pour Ludovic Longchamp, jeune homme passionné par cet oiseau, «la huppe fasciée est un mythe». C’est pourquoi, il passe la plupart de son temps libre à s’occuper de la septantaine de nichoirs installés entre les Côtes de l’Orbe et Concise. «C’est un travail titanesque, il faut faire des contrôles toutes les semaines pour recenser les couples reproducteurs et empêcher les étourneaux de s’installer dans les nids». C’est à l’âge de trois semaines que les oisillons sont bagués. «Cela nous permet d’indiquer les données sur la nidification et d’avoir un suivi attentif tout au long de la vie de l’oiseau, indique Pierre-Alain Ravussin. On a la preuve qu’un couple, né l’année passée, niche en Chassagne, près d’Onnens. On suppose que la huppe fasciée revient, chaque printemps, au même endroit.»

Carole Daenzer et Ludovic Longchamp s’occupent des nichoirs de la région.

Carole Daenzer et Ludovic Longchamp s’occupent des nichoirs de la région.

La huppe fasciée aime nicher dans les bosquets, les vignes et les vergers où elle investit les arbres creux, voire les vieux murs ou les bâtiments abandonnés. C’est la raison pour laquelle le Gobe a réaménagé, en collaboration avec les propriétaires terriens, des milieux qui favorisent son habitat. L’association encourage d’ailleurs ces derniers à planter des arbres fruitiers et des haies, ou à laisser des bandes herbeuses entre les lignes de vignes. Membre du groupe de jeunes de l’association Nos Oiseaux, Ludovic Longchamp essaie de replanter des arbres fruitiers : «On a replanté un verger à Onnens. A long terme, on espère qu’il n’y ait plus besoin de nichoirs», déclare-t-il.

La fouine représente l’une des plus grandes menaces pour cet oiseau peu farouche. De même que les filets placés sur les vignes pour empêcher les étourneaux de manger le raisin leur sont fatals. «Chaque année, des centaines d’oiseaux sont piégés par ces filets. La plupart ne survivent pas, regrette Ludovic Longchamp. Il est donc préférable d’utiliser des filets latéraux».

Cet oiseau apprécie particulièrement la chaleur. Sa réinsertion dans la région est en partie due au réchauffement climatique. A cause du mauvais temps de cet été, Pierre- Alain Ravussin remarque que «la huppe fasciée a eu beaucoup de difficultés à trouver de la nourriture. On espère que ce mois d’août sera plus paisible pour elle». Enfin, la huppe fasciée apprécie la tranquillité des vignobles et n’aime pas être dérangée.

 

«Un phénomène exceptionnel»

La huppe fasciée migre jusqu’à l’Afrique tropicale pour passer l’hiver. Malgré le fait qu’on ne dispose pas de comptage exact, on suppose que la huppe fasciée était une espèce volatile assez courante dans nos régions. Depuis les années huitante, cet oiseau avait totalement disparu. C’est en 2007 qu’on l’entend à nouveau dans le Nord vaudois. En 2011, la population suisse de huppe fasciée était estimée à 170 couples dont 110 dans le canton du Valais. En général, la huppe fasciée pond cinq à sept œufs d’avril à juin pour un temps d’incubation de 18 jours. Les poussins s’envolent pour la première fois à l’âge de 3 ou 4 semaines. Cette année, on compte six nidifications dans le Nord vaudois, dont quatre ont réussi. «C’est un phénomène exceptionnel dans la région», s’enthousiasme Ludovic Longchamp.

Valérie Beauverd