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La maîtresse d’école sort les fourches
Champvent, 13.02.20, Ferme au fil du vent, Jessica Decrausaz, classe 8P122. © CArole Alkabes

La maîtresse d’école sort les fourches

6 mars 2020 | Edition N°2699

Une vingtaine d’élèves de l’école primaire se sont rendus à la ferme pédagogique «Au Fil du Vent» pour mieux comprendre le monde paysan.

Ce matin, il fait froid et les élèves arrivent tout emmitouflés à la ferme. C’est qu’ils ont déjà de l’expérience dans le domaine, n’en étant pas à leur première visite. L’automne passé, ils se sont déjà formés au travail de la vigne sous un vent glacial. Mais cette fois, c’est dans l’étable que les élèves de 8e HarmoS décodent les comportements des vaches allaitantes et découvrent leur système digestif à quatre estomacs. Ils apprennent à les nourrir et sortent les fourches pour leur amener le foin.

Est-ce que le lait de coco vient du pis de la vache? Est-ce qu’une vache brune fait du lait marron? Ou est-ce que la maison des vaches est appelée vacherie? Ce sont ces questions originales et innocentes qui ont confirmé à Jessica Decrausaz l’importance de répondre à un besoin fondamental: reconnecter les enfants avec la nature. Pour ce faire, elle a convié toutes les classes primaires d’Yverdon-les-Bains à la campagne. D’abord enseignante, puis agricultrice par alliance, la maîtresse a souhaité lier ses deux passions. Et elle n’en est pas à sa première expérience: quand elle enseignait encore dans une des classes de la Cité thermale, elle faisait déjà venir ses élèves à la ferme quelques fois dans l’année. Lors de son quatrième congé maternité, elle a conçu son projet de ferme pédagogique.

Découvrir la nature

Permettre à tous les enfants de venir à la ferme, quel que soit leur âge, leur donner la chance de découvrir la nature et voir leur sourire, c’est ça qui motive Jessica Decrausaz! Une fois le projet accepté par la Direction de l’établissement primaire Pestalozzi, et l’intérêt montré par Edmond-Gilliard, l’agricultrice de cœur a pu inaugurer la ferme pédagogique «Au Fil du Vent» en 2017, lors de la reprise de l’exploitation agricole avec son mari. Vent, parce que ça rappelle le vent de Champvent, et «car il y a aussi des fois des petits courants», ajoute-t-elle en rigolant. Et fil, car les activités se déroulent au fil des besoins, des envies des enseignants, enseignantes, des enfants et des saisons.

Cette démarche ne s’est pas faite du jour au lendemain. Jessica Decrausaz a créé un programme de huit thèmes différents pour toutes les saisons, qui est adapté aux enfants de 4 à 13 ans. «Mon plus grand défi!», s’exclame-t-elle. On y trouve le potager, le verger, les cultures, la vie de la basse-cour, l’étable et la biodiversité. Et pour les plus grands, deux modules spéciaux «Au Fil du Vent», afin de découvrir les différents métiers en lien avec une exploitation et le travail de la vigne.

Créer des vocations

Bien évidemment, elle adapte tous ces cours en fonction des besoins. Car selon elle, les écoliers qui viennent à la ferme pédagogique doivent repartir avec de nouvelles connaissances, se poser des questions, être curieux de découvrir et, pourquoi pas, trouver leur vocation. Ce qui se travaille en classe déjà, avec Alessandro Buccinna, enseignant et doyen de l’établissement Pestalozzi: «Avec mes collègues, nous essayons de faire des liens toute l’année, que ce soit en géographie, en histoire, en sciences naturelles ou en économie.» Selon lui, l’un des objectifs consiste à développer l’intérêt pour les métiers de la terre, notamment chez les élèves qui n’ont pas grandi en campagne. Un de ses anciens élèves va d’ailleurs commencer cette année un apprentissage chez les Decrausaz.

Les enfants ne sont pas les seuls à apprécier cette escapade en pleine nature. Les vaches semblent elles aussi y prendre un certain plaisir! © CArole Alkabes

Quant au financement de la ferme pédagogique, ni les parents, ni les élèves ne doivent casser leur tirelire, puisque Jessica Decrausaz est engagée comme enseignante par les établissements primaires. C’est grâce à ses collègues, qui viennent et reviennent tous les ans que le projet peut perdurer. Chaque année, il y a 138 visites réparties sur quatre matins chaque semaine de l’année scolaire et environ 2000 enfants qui enfilent la salopette!

Aline Schaer

Rédaction