Souffler ses bougies d’anniversaire sans public? ça ne compte pas! C’est pourquoi Jean-Pierre Masclet, déçu d’avoir dû annuler les deux rendez-vous prévus en 2020 en raison du Covid, a décidé de ne pas lâcher l’affaire. Il revient cet été avec une double célébration d’envergure pour fêter les 25+1 ans des Cartons et les 15+1 ans des Jardins du Cœur d’Yverdon, le 22 août.
Pour l’occasion, le président des deux associations a invité ses collègues de l’émission radio Monsieur Jardinier. Ainsi, dès 6h du matin, une vingtaine de jardiniers et chroniqueurs diffuseront leur rendez-vous dominical en direct de la Cité thermale. «Il y aura quasi l’entier de l’équipe, ce qui est très rare. Ce sera notre seule sortie de l’année, précise la réalisatrice Christine Magro (en photo à dr.). Si elle rêve de pouvoir enregistrer toutes ses émissions en direct des jardins, cela reste exceptionnel en réalité pour une question de coût. C’est pourquoi venir à Yverdon à la fin du mois sera un événement pour elle aussi, ce d’autant plus que l’an dernier, son équipe n’a pas pu fêter comme il se doit les 40 ans de Monsieur Jardinier en raison de la situation sanitaire. «On s’est greffés avec bonheur!», confie-t-elle. Ainsi, le double anniversaire pourrait bien devenir une triple célébration.
Le public est d’ailleurs invité à se lever aux aurores, à venir jusqu’aux Jardins du Cœur et à déjeuner au son des cisailles tout en découvrant les coulisses des reportages. «Comme on ne sera pas en studio, on ne pourra pas prendre les questions par téléphone, seulement celles des auditeurs présents, précise Christine Magro, qui s’attend à une vague de lève-tôt. D’habitude, on a entre 150 et 180 questions, et lorsqu’on est en direct, il y a toujours du monde, sauf une fois où il avait plu. Mais dès qu’il y a eu une accalmie, c’était la ruée!»
Pour ceux qui ne sont pas du matin, il y aura toujours la possibilité de vivre un moment festif un peu plus tard, puisque l’anniversaire continue après l’émission. A 10h30, le président des Cartons du Cœur lancera la partie officielle avec la conseillère d’état Cesla Amarelle, le syndic d’Yverdon Pierre Dessemontet, ainsi que Claude Anne Jaquier et Danielle Blaser, du Lion’s Club Azur. Ensuite, des ateliers seront organisés jusqu’à 16h où chacun pourra rencontrer «son» Monsieur Jardinier et récolter quelques précieux conseils. Un moment qui semble très attendu: «Depuis quinze jours, les gens n’arrêtent pas de demander comment sont mes tomates? Ils veulent savoir si celles de Monsieur Jardinier seront mieux que les leurs, sourit Jean-Pierre Masclet, chroniqueur depuis 26 ans. Ma réponse? Je n’ai pas de solution miracle!»
Le Nord-Vaudois n’a peut-être pas de baguette magique, mais il espère toutefois attirer du monde avec son programme festif. «On a tenu à marquer le coup car c’est une visibilité pour notre travail, relève le président des Cartons du Cœur. Cela a toujours été notre souci, parce qu’il y a toujours eu une frange de la population qui avait peur de venir.» Le fait d’être à l’extérieur du centre-ville et d’avoir créé un jardin ludique et pédagogique, ainsi qu’un important biotope avec des ruches, un verger, des chèvres et une place de jeux incitent davantage de monde à s’approcher de l’avenue des Sports 42. Mais il y a encore du travail à faire. Le bouche-à-oreille reste l’outil de communication qui fonctionne le mieux pour attirer les gens qui sont dans la précarité, même si, avec le Covid, il n’y a pas eu besoin de faire beaucoup de publicité pour développer les Cartons du Cœur. Un élan de générosité a permis à l’association de distribuer massivement des sacs de nourriture de mai à septembre 2020. Telle une bouée de sauvetage, ces dons ont contribué à aider les bénéficiaires qui ne cessent d’augmenter.
«Depuis le Covid, on a noté une hausse de 10 à 15%», assure Jean-Pierre Masclet, qui espère pouvoir récolter d’autres dons grâce à l’événement du 22 août. Le Chavornaysan rappelle une chose essentielle: «La précarité, ce n’est pas que dans l’assiette. Offrir à manger ne sert pas uniquement à nourrir des estomacs, cela permet aussi aux gens d’avoir un peu de sous pour une sortie ou pour acheter un jeu, un sac ou autre chose à leurs enfants.»
Une année de liberté!
Les Cartons du Cœur du Balcon du Jura ont aussi un anniversaire à célébrer à la rentrée. La route fut longue et pénible, mais désormais les bénévoles sont fiers d’être indépendants d’Yverdon.
Cela n’aura pas été simple de maintenir des Cartons du Cœur à Sainte-Croix. Lancée il y a une quinzaine d’années, l’antenne avait finalement coulé en raison de problèmes d’organisation et de vols internes, poussant le responsable de l’époque vers la sortie et, même, un déménagement. Mais la bénévole Nathalie Pauli ne voulait pas rester sur une fausse note et abandonner tous ceux qui avaient réellement besoin d’un coup de pouce.
Elle s’est donc tournée vers l’équipe de la Cité thermale pour prendre conseil et obtenir un soutien. Prise sous l’aile de sa grande sœur yverdonnoise, la nouvelle structure a donc fait ses premiers pas en juillet 2015. Si certains voyaient cette renaissance d’un bon œil, d’autres prédisaient une marche rapide vers le précipice. «Dès le départ, on nous a dit qu’on allait se planter, qu’on n’arriverait pas à assumer nos charges, etc. Mais on ne s’estimait pas si bêtes que ça», raconte Nathalie Pauli, présidente de l’antenne sainte-crix. Déterminée, elle n’a rien lâché. Elle a développé son local avec les moyens du bord jusqu’en août 2020, où elle a annoncé vouloir voler de ses propres ailes. Une décision mûrement réfléchie, mais dont elle n’avait pas mesuré toutes les conséquences. Car en l’espace d’un mois, elle s’est retrouvée sans rien, plus d’accès aux livraisons de matières premières ni au compte bancaire qui étaient gérés par Yverdon. En deux temps trois mouvements, la présidente a dû monter sa structure, appeler la fédération vaudoise des Cartons du Cœur et Table Suisse pour obtenir des denrées, et envoyer plus de 400 lettres pour appeler les particuliers, les fondations et les autorités à faire des dons. «En effet, ils sont partis avec aucun fonds puisque c’est Yverdon qui gérait financièrement Sainte-Croix. Mais on leur a laissé tout le matériel, confirme Jean-Pierre Masclet, qui se dit soulagé. C’est moins de soucis financiers et moins de gestion en ressources humaines.»
Il semblerait pourtant qu’une légère tension existe entre les deux associations. «J’ai envie de dire que c’était le moment qu’ils se motivent à Sainte-Croix, estime Jean-Pierre Masclet. Pour moi, c’est de l’histoire ancienne.» Même son de cloche du côté du Balcon du Jura: «On aurait pu faire des histoires, mais on préfère tourner la page», souligne Eliane Pauli, secrétaire et mère de la présidente. Désormais, chaque équipe prépare son anniversaire dans son coin. A Sainte-Croix, une petite fête est prévue le 10 septembre.
