Le Chenit – Plusieurs centaines de personnes de divers horizons se sont rassemblées, hier devant l’Hôtel de Ville du Sentier, pour protester contre la suppression de postes envisagée par le Groupe Richemont -210 en Suisse, dont quarante au Brassus
«Non, non, non aux licenciements. Oui, oui oui à notre industrie.» Ce slogan, scandé plusieurs fois par la déléguée syndicale Catherine Arnaud, et repris en cœur par la foule réunie hier à la mi-journée au Sentier, est révélateur. Les quarante postes menacés au sein la succursale Vacheron-Constantin -du Brassus ont une portée qui dépasse largement les problèmes internes rencontrés par le Groupe Richemont. Le spectre de la restructuration envisagée fait frémir toute une région, dont l’économie repose sur un savoir- faire horloger au cœur de la tourmente, après avoir connu une époque dorée.
«Je travaille pour la concurrence. Je viens par solidarité. Heureusement, cela va bien pour nous, mais jusqu’à quand ?», indique un membre de l’assemblée forte de 400 personnes, selon les estimations du syndicat Unia. «J’habite à la Vallée depuis 25 ans. Il faut garder ici des places de travail pour nos enfants», relève le collaborateur d’une autre manufacture.
Des retraités, mais aussi des représentants de petits commerces locaux, s’étaient déplacés pour assister à plusieurs allocutions devant une banderole porteuse de l’énoncé «Résidents et frontaliers unis et solidaires ». Noé Pelet, responsable du secteur industrie chez Unia Vaud, a indiqué que 47 postes avaient déjà été biffés chez Vacheron Constantin durant le premier semestre de cette année. Il a demandé au Groupe Richemont d’«assumer ses erreurs stratégiques » et lui a reproché de ne pas envisager l’option du chômage technique, «en attendant que la situation s’améliore». L’orateur a également accusé le poids lourd de l’industrie horlogère de «faire passer les intérêts de ses actionnaires avant ceux de ses travailleurs», en référence à l’augmentation constante et significative des dividendes versés depuis plusieurs années.
Le député Nicolas Rochat Fernadez, auteur de deux interventions parlementaires incitant le Gouvernement vaudois à agir s’est, pour sa part, félicité du nombre de participants à la manifestation, rappelant qu’à la fin des années 1990, la mobilisation contre le départ de Lémania à Genève avait débouché sur une issue favorable. Stives Morand, syndic du Chenit a, pour sa part, apporté le soutien des autorités communales. Il espère pouvoir rétablir le dialogue rompu avec la succursale de Vacheron Constantin depuis le départ de son ancien directeur. «J’ai appris l’annonce des suppressions de poste par les médias. On a le sentiment d’être snobés. Quand ils ont voulu construire leur nouvelle usine (ndlr : elle a été inaugurée en octobre 2013), nous avons planché plusieurs années sur le Plan partiel d’affectation. Il serait appréciable, en contrepartie, d’avoir de temps en temps des retours de leur part», a commenté le chef de l’Exécutif local, peu après que Catherine Arnaud a souhaité un bon retour devant leurs établis aux acteurs de l’horlogerie.
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«L’ambiance est tendue»
«Si nous ne faisons rien aujourd’hui, c’est une porte ouverte au manque de respect envers la dignité des travailleurs. Laissez-nous travailler», a déclaré le collaborateur Ricardo Alemao. Angleur chez Vacheron Constantin, il évoque une ambiance de travail tendue, liée à l’incertitude. «Les bruits de couloir créent de l’angoisse », observe-t-il.