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Du lac de Joux à la Norvège, en canoë fabriqué à la main
©Simon Gabioud

Du lac de Joux à la Norvège, en canoë fabriqué à la main

25 août 2017 | Edition N°2067

Le Pont – Bricoleur passionné et féru d’aventures, Valentin Gabioud, 25 ans, a navigué sur les eaux scandinaves à bord d’un canoë made in Vaud fabriqué par ses soins. Il raconte.

La mise à l’eau du canoë a eu lieu en juillet, dans la baie du Pont, sur le lac de Joux, quelques jours seulement avant le départ pour la Scandinavie. ©Simon Gabioud

La mise à l’eau du canoë a eu lieu en juillet, dans la baie du Pont, sur le lac de Joux, quelques jours seulement avant le départ pour la Scandinavie.

Une vie, faite d’aventures, il y en a qui en rêve, beaucoup. Et puis, il y a ceux qui la vivent, nettement moins nombreux. Valentin Gabioud, 25 ans, en fait partie. A la force de ses bras, il s’est construit un canoë en bois. Un ouvrage unique et une formidable entreprise de plusieurs mois qui l’a mené du Pont, à la vallée de Joux, aux latitudes nord des parcs nationaux de Suède et de Norvège, d’où il vient de rentrer.

«L’hiver dernier, pendant mes révisions, je suis tombé sur une vidéo d’un type qui s’est construit un canoë en bois, seul, avec pour unique aide un manuel d’explication, confie l’étudiant établi à L’Isle. C’est quelque chose qui pouvait me correspondre.» Ni une ni deux, le jeune adepte de défis se lance dans l’aventure, non sans avoir recours à l’aide -précieuse- de son père. «Petit, il m’a appris à travailler le bois et à manier les outils, poursuit-il. Aujourd’hui, c’était important pour moi de réaliser quelque chose avec lui, d’avoir un projet commun.»

 

Un chantier naval improvisé

 

La météo, changeante, ne facilitait pas la navigation sur les lacs en Scandinavie. ©Simon Gabioud

La météo, changeante, ne facilitait pas la navigation sur les lacs en Scandinavie.

Ensemble, fils et père ont d’abord aménagé un chantier naval improvisé, sous une tente. Quelques mètres carrés au bord de la Venoge où, durant plus de quatre mois, ils ont dessiné, découpé, scié, collé, pressé, poncé et vernit les lattes de bois formant la coque du futur canoë (voir ci-dessous). «Le jardin familial a été un peu métamorphosé, au grand dam de ma maman, pas toujours ravie de la chose», détaille, sourire aux lèvres, l’intéressé.

«C’était toute une aventure, un travail minutieux, parfois répétitif. Mais lorsqu’on a retourné le canoë (ndlr : l’embarcation se construit à l’envers, sur un moule), notre projet a soudainement pris forme», glisse, non sans fierté, l’apprenti charpentier. Restait encore à tester l’ouvrage, au Pont.

Sous l’oeil attentif de Pégase et dans un décor sauvage qui n’a rien à envier aux paysages du Grand Nord, le canoë -«Petit rorqual» comme il a été baptisé- n’a pas sombré. «J’ai été agréablement surpris par sa bonne glisse, malgré une stabilité moyenne dûe au fond plat», détaille l’habitant du pied du Jura.

 

«Petit rorqual» devient grand

 

Le soir venu, le bivouac en pleine nature offrait une expérience unique. ©DR

Le soir venu, le bivouac en pleine nature offrait une expérience unique.

Puis est venu le moment du départ. Le grand, vers le Nord. A bord de sa voiture, canoë solidement sanglé sur le toit, Valentin Gabioud fait cap sur l’arrière-pays suédois et norvégien, fin juillet. «J’ai toujours été attiré par les pays scandinaves, leurs paysage et leur histoire», argue le jeune Robinson.

Durant une semaine, il a navigué sur les eaux calmes des lacs suédois, où forêts et collines s’étendent à perte de vue. Six jours bercé au son des vaguelettes venant se briser sur la coque et, durant la nuit, au cri particulier du plongeon huard -une espèce de canard nordique au chant similaire au hululement du loup.

La deuxième semaine, sur les plans d’eau norvégiens, la météo maussade et les températures fraîches -le thermomètre est descendu à 3 degrés- le forcent à ralentir son rythme de 25 km parcourus quotidiennement. «Les jours n’étaient pas toujours roses. Dans de telles conditions, on est plus porté à aller à la rencontre de l’autre, à aller chercher un peu de chaleur humaine», poursuit- il en faisant référence à deux militaires croisé par hasard et avec lesquels il a partagé un repas.

Au bout du compte, après trois semaines d’effort, seul un pépin -un chavirement dans un rapide lui a coûté son natel, son appareil photo et sa tente- est venu entaché, un peu, l’aventure. Mais pas de quoi décourager le jeune homme.

A peine rentré de son périple, Valentin Gabioud pense déjà à repartir. «Descendre le Danube, de la Forêt noire allemande à Istanbul, serait un joli projet à réaliser sur plusieurs années », souffle-t-il.

 

28 kilos de red cedar canadien et de sapin blanc

 

Embarcation sobre et élégante permettant un contact privilégié avec la nature, le canoë est si performant qu’il a traversé les siècles, depuis les chasseurs et voyageurs nord-amérindiens du XVe siècle jusqu’à aujourd’hui.

Construit selon des plans achetés sur Internet, ce canoë made in Vaud est le fruit de plusieurs mois de travail. De la coque aux étraves, en passant par les pagaies et les sièges, l’ensemble de l’ouvrage a été réalisé à la main et avec du bois massif.

 

 

La coque est faite de lattes de cinq millimètres d’épaisseur de red cedar -une essence de tuya américain- et de sapin blanc. Plusieurs couches de résine époxy, de vernis et de fibre de verre assurent une protection contre les chocs et les UV. Pour un poids de seulement 28 kg, ce canoë mesure un plus de quatre mètres de long.

 

 

 

Simon Gabioud