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L’Amalgame célèbre son quart de siècle

3 octobre 2019
Edition N°2594

Yverdon-les-Bains - La salle de concert fête son 25e anniversaire avec trois soirées, d’aujourd’hui à samedi. L’occasion de revenir sur ses débuts.

«Mon père a acheté les locaux du site de Sports 5 au début des années 1990, quand l’entreprise générale du bâtiment et des travaux Horace Decoppet SA, qui occupait les lieux jusque-là, a fait faillite, explique Fabienne Decker, fille de feu Charles Decker, fondateur de la régie immobilière du même nom. Il ne comprenait pas que la Ville n’en veuille pas.»

Mais l’histoire de L’Amalgame commence en fait une dizaine d’années plus tôt, avec la naissance de l’association du Groupement des amis de la musique électrique (GAME). «À l’époque, contrairement aux autres villes romandes, il n’y avait pas vraiment de salle de concert à Yverdon-les-Bains, glisse Daniel Alessandro. Les groupes de musique locaux se produisaient dans les villages des environs, et le public de la Cité thermale se déplaçait dans toute la Suisse romande, selon ses envies.»

Plusieurs mois de travaux

Celui qui a rejoint le comité du GAME en 1993 poursuit: «Les soirées de musique électrique, c’est-à-dire principalement de rock, avaient mauvaise presse. Il était difficile d’obtenir les autorisations nécessaires pour en organiser. Le GAME a cependant réussi à en mettre sur pied quelques-unes, ainsi que des festivals, les années précédant l’ouverture de L’Amalgame. Je pense que c’est grâce à cela que les autorités ont accepté que l’association obtienne un local dédié.»

Cependant, avant de pouvoir accueillir leur premier concert, les lieux ont dû être transformés. «Plus de 200 bénévoles ont œuvré pendant quatre ou cinq mois pour réaliser les travaux nécessaires. Il s’agissait principalement de gens de la région qui appréciaient de sortir en ville et qui s’étaient passé le mot. Il y avait vraiment de tout», se souvient Daniel Alessandro. Et d’ajouter: «L’idée était de faire de l’endroit un petit Flon, comme à Lausanne. En ce qui concerne le nom, un concours avait été organisé. La proposition gagnante n’avait, au final, pas été retenue, car la personne chargée de créer le logo n’était pas convaincue. C’en est donc un autre qui a été choisi, soit L’Amalgame.»

La salle, que l’association louait à Charles Decker, a finalement ouvert ses portes en août 1994. «La première année, le succès a clairement été au rendez-vous. Jean-Jacques Olivary, dit Zaz, qui était alors président de l’association GAME, faisait en sorte que des soirées soient organisées chaque vendredi et samedi.» Mais, petit à petit, l’engouement est un peu retombé. «Les gens avaient des attentes trop grandes par rapport à ce que nous pouvions réaliser avec les moyens à disposition», analyse Daniel Alessandro.

Des ardoises souvent effacées

En 1997, celui-ci a succédé à Jean-Jacques Olivary. «Avec le reste du comité, nous avons décidé de ne plus nous imposer un rythme de deux soirées par week-end. Nous faisions la programmation en fonction des opportunités qui se présentaient, mais il y a plus ou moins toujours eu un concert par semaine, en dehors des coupures estivale et hivernale. L’idée était de rentabiliser la salle et, même si nous devions parfois attendre le dernier évènement de la saison pour équilibrer les comptes, je crois que nous sommes plus ou moins les seuls à y être parvenus.»

Fabienne Decker confirme: «Au fil des ans, il y a eu beaucoup de tournus au niveau des comités, car les gens étaient bénévoles, et organiser des concerts n’est pas seulement super cool, c’est aussi beaucoup de boulot, et cela demande de tenir une comptabilité. Quoi qu’il en soit, à chaque changement de comité, mon père passait l’éponge sur l’ardoise laissée par les anciens, afin que les nouveaux venus puissent repartir sur de bonnes bases.» Car, malgré les subventions de la Ville, les loyers n’étaient souvent pas payés, et il arrivait même que Charles Decker avance de l’argent pour financer des travaux, sans jamais se faire rembourser.

Un «deuxième boulot»

«Il m’est arrivé de jouer le rôle de modératrice auprès de mon père, car j’organise des concerts depuis une trentaine d’années. Je sais donc à quel point c’est prenant et cela me rendait plus compréhensive envers le comité de L’Amalgame», relève celle qui s’occupe désormais du Rock Bottom Music Bar, à Giez.

«C’était presque un deuxième boulot, acquiesce Daniel Alessandro. Nous y passions toutes nos soirées. C’était Antonino Fortunato, dit Toni, qui s’occupait des relations avec les tourneurs. Quand on lui proposait un groupe, Toni nous appelait. Si nous le connaissions, nous acceptions. Sinon, nous nous réunissions dans son magasin, Transfert Music, pour écouter quelques titres de la formation et nous prenions ensuite une décision tous ensemble.»

Le comité avait également décidé de miser sur la qualité des infrastructures proposées: «Nous renouvelions régulièrement la sono, les lumières et la table de mixage, qui sont des éléments qui se démodent très vite. Du coup, presque tout l’argent des sponsors y passait», glisse celui qui a quitté son poste de président en 2000.

Il fallait trouver un moyen d’attirer les groupes. «Nous cuisinions aussi pour eux, pratiquement à la carte. Et parfois, cela a payé. Je me souviens notamment du groupe finlandais HIM, que nous avions programmé alors qu’ils n’étaient pas encore connus. Ils sont revenus jouer à L’Amalgame une seconde fois, alors qu’ils avaient acquis une certaine notoriété, car ils se souvenaient que nous leur avions fait confiance à leurs débuts et qu’ils avaient été bien accueillis, se félicite Daniel Alessandro. Nous avions donc pu les reprogrammer pour une bouchée de pain, alors qu’ils n’étaient normalement plus du tout à la portée de notre budget!»

L’arrivée des professionnels

En 2011, sous l’impulsion du Service de la culture de la Ville, un comité professionnel a été nommé à la tête de L’Amalgame. «Nous sommes cinq personnes à temps partiel, avec des postes entre 20% et 65%, plus deux stagiaires, indique Loraine Coquoz, responsable de la communication. Au niveau de la programmation, nous essayons de proposer une large palette de styles, basée sur ce qui marche au niveau national et international. Nous accueillons des artistes qui ont une actualité, qui sont en tournée, tout en restant attentifs à ce que le public aime.»

Elle ajoute: «Yverdon-les-Bains n’étant pas franchement connu à l’international, il est difficile de rendre la salle attractive pour les artistes, surtout que Lausanne est un gros concurrent. Mais nous collaborons avec des programmateurs d’autres cantons, ainsi qu’avec Les repérages de Couleur 3.»

Reste le problème des finances. La Ville, qui a racheté le site en 2016, alloue actuellement un budget de 180 000 francs à L’Amalgame, et demande un loyer annuel de 40 000 francs. Le comité souhaiterait en être exempté.