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Le Manoir livre ses secrets
Le maître d’œuvre, le bureau d’ingénieurs CCHE La Vallée SA, projette de finir les travaux en trois ans.

Le Manoir livre ses secrets

11 septembre 2024 | Texte et photos: Maude Benoit
Edition N°3786

Le mystérieux et énigmatique Manoir Hauteroche a ouvert ses portes le temps d’un week-end!

Perché sur les hauteurs du Pont à la vallée de Joux, le Manoir Hauteroche, édifice emblématique du XXe siècle aujourd’hui parsemé de tags, a exceptionnellement ouvert ses portes lors des Journées européennes du patrimoine, du 7 au 8 septembre.

En quelques jours à peine, les  douze visites proposées étaient complètes, démontrant l’attrait que le lieu suscite. Il faut dire que la mémoire de ce manoir bouscule les fantasmes et l’imaginaire des connaisseurs de la combe jurassienne depuis plusieurs décennies.

De l’exportation de glace, du nazisme et du vandalisme

Homme d’affaires richissime et propriétaire du journal Le Matin à Paris, Maurice Bunau-Varilla (1856-1944), tombe amoureux de la vallée de Joux et décide de s’y construire une maison.

Un Parisien à la Vallée au début du XXe siècle? Pas si curieux. Un lien reliait bel et bien la Ville Lumière et la vallée de Joux. À une époque où les frigidaires n’existaient pas, Le Pont (via Vallorbe) exportait des blocs de glace du lac Brenet jusqu’à Paris et dans le sud de la France grâce au chemin de fer. Cette glace était utilisée pour la conservation des aliments, mais aussi pour refroidir les consommations des habitués des bistrots parisiens. «Ainsi, à l’époque, vous pouviez siroter une Suze en terrasse à Paris avec des glaçons de la vallée de Joux», explique Marie Stahl, associée du bureau CCHE La Vallée SA en charge des travaux et guide le temps d’un week-end.

C’est donc dans ce contexte commercial et touristique que le Manoir est construit entre 1912 et 1914. Toutefois, les travaux d’aménagement intérieur sont bloqués par la Première Guerre mondiale. Poursuivis pendant l’entre-deux-guerres, les travaux sont à nouveau empêchés par le second conflit mondial.

En 1944, Maurice meurt et son fils, Guy Bunau-Varilla, hérite du Manoir. Il est arrêté l’année suivante par les autorités françaises qui confisquent le Manoir. Guy avait largement contribué à la ligne éditoriale du journal Le Matin qui, sous la direction de son père, avait pris une tournure franchement sympathisante à l’égard d’Hitler et du régime de Vichy.

Par la suite, l’édifice passera entre différentes mains et sera tour à tour centre de loisirs, camp de vacances et lieu d’accueil pour requérants d’asile. Désaffectée depuis plusieurs années, cette villa est devenue le lieu de squat, d’«urbex», de soirées sauvages et de vandalisme dont les tags sur les murs sont le témoignage.

Une prouesse architecturale

Outre son histoire sulfureuse, le bâtiment est également connu et reconnu pour son architecture innovante.

Il s’agit de l’une des premières maisons construites sur le modèle breveté de François Hennebique. Sa particularité? Le travail du béton armé avec le système poteau-poutre-dalle et la disposition de son escalier monumental en angle en font une œuvre véritablement avant-gardiste. Toutefois, les élévations en encorbellement et les fondations construites avec des moellons reprennent un style traditionaliste qui rappelle les chalets suisses.

À l’intérieur, on trouve: au rez-de-chaussée, une cuisine; à l’étage supérieur, un salon et une salle à manger; et dans les élévations, plusieurs suites et chambres d’enfant. Enfin, sous le toit, se trouvent quelques chambres d’amis et les chambres des domestiques.

Si la décoration n’a jamais été entièrement terminée, le salon comporte des peintures murales de style néo-baroque représentant les quatre saisons. Ces peintures ont été réalisées par deux peintres français connus, Henri Deluermoz et Jean Berne-Bellecour. Dans la salle à manger, des scènes médiévales fantasmées surprenantes sont représentées.

Ainsi, bien que le bâtiment ait souffert de plusieurs années de vandalisme, il n’a pas perdu de sa superbe. Le projet de restauration qui vise à le ramener au plus près des plans de 1914 promet un bond immersif dans le passé.

L’œuvre d’un mécène

Récemment racheté par un mécène anonyme certainement aussi fortuné que Maurice Bunau-Varilla, le Manoir est entré dans une phase de restauration intensive. Le bureau CCHE La Vallée SA, qui travaille main dans la main avec les organes cantonaux de protection du patrimoine, a pour but de ramener ce bâtiment classé (avec la note 1) à l’état dans lequel il aurait dû ressembler selon les plans de 1914.

À terme, ce bâtiment deviendra une des résidences privées de l’acheteur et ne devrait pas rouvrir ses portes avant un moment.

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