Logo

Le Nord vaudois aurait-il peur de tendre la main?

3 février 2022

L’Aide suisse à la montagne soutient depuis 1943 les projets des habitants des régions de montagne. Alors qu’un tiers du district est éligible à ce coup de pouce financier, les demandes peinent à remonter à la fondation. L’ADNV veut reprendre les choses en main.

Le Centre taoïste Ming Shan à Bullet, les pistes de ski de la vallée de Joux, le Vacherin Mont-d’Or de la fromagerie du Coteau à Ballaigues… Autant de projets locaux qui n’auraient peut-être pas pu voir le jour sans un petit coup de pouce financier de l’Aide suisse à la montagne (lire encadré). «Les habitants des montagnes sont courageux, innovants et bien connectés. Mais les jeunes entrepreneurs de montagne doivent affronter un désavantage supplémentaire par rapport aux zones urbaines, celui de leur lieu d’implantation, notamment en raison des coûts de production plus élevés», souligne Willy Gehriger, président du conseil de fondation de l’Aide suisse à la montagne.

Chaque année, ce sont quelque 30 millions de francs qui sont à disposition des régions de montagne, comme le Nord vaudois. Mais encore faut-il oser demander un soutien. Car malgré la belle enveloppe à disposition et l’innovation de la région, ils sont peu à recourir à ce financement. «Effectivement, force est de constater que l’on ne fait pas assez appel à l’Aide suisse à la montagne, quand bien même on a un tiers du territoire éligible. Pour qu’elle soit davantage sollicitée, il faut que l’ADNV ait connaissance de ce qu’il se passe sur le marché et que les porteurs de projets aient connaissance de cette offre, commente Nadia Mettraux, directrice de l’Association pour le développement du Nord vaudois (ADNV). D’ailleurs, je répète souvent à mes équipes: vous devez être les yeux et les oreilles du marché.» Miser sur la proximité, tel est le nouveau mot d’ordre de l’ADNV qui a décidé d’ajouter ses services dans les sept offices du tourisme régionaux. «Rendez-vous dans cinq ans pour voir si ça marche», défie Nadia Mettraux.

Pourtant, la directrice n’a pas prévu d’attendre aussi longtemps pour amorcer du changement dans le Nord vaudois et dynamiser les régions de montagne. L’une des start-up suisses alémaniques primées par l’Aide suisse à la montagne, Nomady, aimerait se faire connaître dans notre district, mais elle est freinée par le fameux mais non moins terrible Röstigraben. Pourtant, son concept surfe sur la tendance du moment, puisqu’il s’agit d’une sorte de Airbnb, une charte visant au respect de la nature en plus, pour les campeurs qui cherchent un bout de terrain dans la nature où installer leur véhicule aménagé ou leur tente durant quelques nuits.

«C’est une alternative aux campings souvent bondés. En mettant des agriculteurs et des gens de la ville en lien, on comble un peu ce fossé qui les sépare, tout en permettant à l’économie locale de profiter des retombées, explique Barbara Pokorny, responsable des régions francophones pour Nomady. On est en plein développement et, cette année, on va axer sur la Romandie.» Et elle a déjà un œil sur le Nord vaudois. «On a contacté l’ADNV et le Parc Jura-Nord vaudois, mais ils veulent lancer une étude globale pour identifier les lieux à mettre à disposition. On attend que ces organisations reviennent vers nous, car il nous paraît plus adéquat de travailler avec elles que dans notre coin.» Mais voilà, cette étude prend du temps et risque de faire louper une opportunité aux régions de régler la question du camping sauvage.

«La démarche est légitime, mais je n’ai pas envie d’attendre 2023 ou 2025 pour ouvrir des lieux. Je vais trouver quelques endroits pour essayer ce concept cette année pour voir si on peut intéresser des gens et avoir un retour d’expérience», indique Nadia Mettraux, très intéressée par la démarche, qui tient toutefois à relativiser. Dès qu’on veut faire quelque chose d’un peu original, il y a une loi derrière et, en l’occurrence, la loi sur l’aménagement du territoire.»

 

Deux semaines pour récolter des dons

 

D’abord destinée à soutenir les agriculteurs, l’Aide suisse à la montagne a élargi son champ d’action en permettant à tous les habitants des régions de montagne d’accéder à un coup de pouce. Avec ce changement de cap, la fondation a senti le potentiel créatif dans ces secteurs et le temps lui a donné raison. Car aujourd’hui, les régions de montagne se montrent très créatives et innovantes.

Mais parfois, avoir une bonne idée ne suffit pas. Il faut un petit coup de pouce pour la concrétiser. Et c’est ce premier soutien qui s’avère souvent le plus difficile à obtenir. L’Aide suisse à la montagne permet justement de pallier ce manque. Le soutien apporté décuple les investissements opérés dans la région, dont les retombées – sous forme de création de valeur et d’emploi – profitent en premier lieu au commerce local. «Les nombreux projets qui ont bénéficié d’un soutien montrent à quel point l’aide à l’entraide de l’Aide suisse à la montagne est importante pour lutter contre le dépeuplement des régions de montagne», explique Willy Gehriger, président du conseil de fondation.

Pour continuer son activité, la fondation lance un appel aux dons, sa seule source de financement, jusqu’au 12 février.

www.aidemontagne.ch

Les chiffres

 

29,3 La somme, en million de francs, allouée en 2021 par la fondation suisse pour soutenir des projets dans les régions de montagne.

30% Comme la proportion du territoire nord-vaudois éligible à l’obtention d’un soutien financier de l’Aide suisse à la montagne.

59 Soit le nombre, en milliers, de donateurs qui ont soutenu la fondation l’an dernier, totalisant 29,8 millions de francs.

833 projets ont été financés par l’Aide suisse à la montagne, dont 52 nouvelles entreprises.

Christelle Maillard