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Le préfet conciliateur tire sa révérence

7 janvier 2013

Albert Banderet symbolisait le préfet vaudois tel que l’a décrit Maurice Meylan dans un ouvrage de référence consacré au lieutenant de l’Etat.

La retraite d’Albert Banderet sera assurément active.

Préfet du district Jura-Nord vaudois, Albert Banderet a quitté l’institution le jour de la Saint-Sylvestre. Avec son départ, c’est plus qu’une page qui se tourne. Il était en effet le dernier préfet-paysan du canton, un homme pour lequel le dialogue et la conciliation étaient des armes maîtresses.

Une main de velours…

«Je pars le coeur léger. J’ai pris beaucoup de plaisir dans ce que j’ai fait!» Albert Banderet transmet la quiétude, un sentiment tout en rondeur, comme le personnage. Sa stature, qui lui donne une autorité naturelle, l’a sans doute beaucoup aidé tout au long de sa carrière. Syndic ou préfet, il a toujours inspiré le calme et le respect. Ceux qui le connaissent savent que c’est une main de fer dont le principal talent a été de jouer avec le velours. Une qualité essentielle dans toutes les fonctions qu’il a occupées et qui lui a permis d’éviter, voire d’éteindre, de nombreux conflits.

Albert Banderet a toujours eu une image de préfet rassurant, celle d’un homme qui est à l’écoute. Et lorsque le verdict tombe, il est le plus souvent accepté, parce que le justiciable a le sentiment d’avoir été compris par un interlocuteur profondément humaniste. D’ailleurs, le taux d’acceptation des décisions en matière pénale atteint dans le district (75%), n’est sans doute pas étranger à son action et à celle de sa collègue Evelyne Voutat. «On joue un rôle essentiel dans le désengorgement de la procédure», relève le jeune retraité.

L’aspect conviction-conciliation joue à son sens un rôle primordial: «En matière pénale ou administrative, il faut parfois prendre un peu de risques.»

Même s’il aurait souhaité voir Yverdon-les-Bains jouer mieux encore son rôle de capitale régionale, et que la régionalisation du Service de défense incendie se passe un peu plus calmement, le préfet transmet le témoin l’esprit serein. Son action est derrière, et, avec un large sourire, il conclut: «Moi, je vais disparaître!»

 

La fonction évolue

Le départ à la retraite, avec un peu d’avance, d’Albert Banderet facilite la réorganisation des préfectures engagée par l’Etat il y a quelques années déjà. Il permet aussi le retour dans la région d’Etienne Roy, ancien préfet d’Orbe, qui a rempli la mission consistant à piloter la création du nouveau district de l’Ouest lausannois. De plus en plus de juristes accèdent à cette fonction, autrefois réservée à de véritables personnalités d’une région.

 

De la scierie de la Poissine au préfet «adjoint de personne»

Une vie riche consacrée à la collectivité

Albert Banderet a ses racines profondément ancrées dans la terre, sur les bords de l’Arnon. Fils de paysan, il a d’abord travaillé durant cinq ans comme manoeuvre à la scierie de la Poissine. Puis lorsqu’il a eu l’opportunité de reprendre un domaine, il a fait sa maîtrise agricole. Avec un arrière grand-père syndic et député, un père et un grand-père municipaux, il avait la chose publique dans le sang.

Une entrée tonitruante au Conseil général de Champagne, sur une liste «révolutionnaire» concoctée par Paul-André Cornu, a placé Albert Banderet sur orbite. La présidence du Conseil (1975), l’entrée à la Municipalité (1981), puis quatorze ans de syndicature l’ont aguerri.

Ainsi, lorsque le préfet titulaire René Perdrix se voit confier des tâches spéciales à Lausanne, Albert Banderet est nommé préfet adjoint de Grandson. «Adjoint de personne», déclare-t-il avec un brin d’ironie lors d’une intervention qui a fait date, puis qu’il est seul «maître à bord». Il deviendra finalement préfet et restera treize ans au service de l’Etat.

Albert Banderet ne s’est pas contenté d’exercer sa fonction de préfet. Il a été un véritable moteur dans sa région. Avant même la préfecture, la création de l’Arrondissement scolaire de Grandson, une première dans le canton, lui a permis de mettre en évidence ses dons de fin négociateur.

Lorsque la Cave des viticulteurs de Bonvillars était en difficulté, il s’est aussi beaucoup investi pour réussir l’opération d’assainissement, même s’il y a eu quelques «étincelles» avec la BCV. La Maison des Terroirs de Grandson lui doit aussi beaucoup. Un concept qu’il va d’ailleurs tenter de développer.

Albert Banderet a également présidé (14 ans) la Fondation Mont-Riant, où, en collaboration avec Patrice Lévy, il a concrétisé un modèle moderne d’hébergement et de prise en charge des personnes âgées.

 

Isidore Raposo