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Le rappeur qui veut faire briller Yverdon

10 septembre 2021

Dans ses clips, LaTek s’affiche avec des liasses dans des voitures de luxe. Mais pour Stéphane Alima Béguelin, la réalité, loin des strass et des paillettes, rime surtout avec travail acharné. Avec un but: entraîner tout le rap suisse romand.

«En Suisse, c’est déjà difficile de percer, et encore plus particulièrement à Yverdon. Ici, à une certaine époque, même si tu faisais de la bonne musique, tout le monde ne te donnait pas forcément la force pour te dépasser, t’encourager. Mais aujourd’hui, c’est en train de changer.» Conscient des limites de sa région, Stéphane Alima Béguelin sait aussi reconnaître son potentiel. Pour celui qui est plus connu dans le milieu du rap par son nom d’artiste, LaTek, vivre à Yverdon est à la fois une source d’inspiration et un élément qui le retient.

Une situation que le jeune homme espère bien voir évoluer dans un futur pas si lointain. «Quand je me rends dans des soirées, j’entends de plus en plus de sons d’artistes suisses. Ça fait vraiment plaisir, parce qu’il y a beaucoup de talent chez nous. Et c’est pratiquement impossible d’exploser tout seul. Tu as forcément besoin de ta ville, de ta région.»

Ce soutien inébranlable, LaTek a pu l’apprécier lorsqu’il s’est rendu en France pour des collaborations avec d’autres rappeurs de la région parisienne. «Ils fonctionnent beaucoup par département. Si tu viens du 94 (ndlr: le département des Hauts-de-Seine) et que tu te lances, tu recevras beaucoup de solidarité et de bienveillance dans ton département.»

En plus de découvrir l’ambiance et le soutien qui s’organise dans les quartiers de Paname, ces différentes collaborations ont évidemment été une chance inouïe d’un point de vue musical pour Stéphane Alima Béguelin. «La première fois, c’était incroyable, se souvient l’Yverdonnois. On a travaillé sur un son avec Irvin de L’impasse. Pour moi, ça a été le déclic. J’étais dans un studio rempli de disques d’or, c’était réel.»

Mais comment le jeune rappeur romand a-t-il pu collaborer avec un artiste comptabilisant plus d’un million de vues sur certains de ces clips? «La musique, c’est un sport de riches, ironise son manager, mais surtout ami d’enfance, Simon Jacot. Ce qui compte, c’est le rapport de visibilité entre les deux artistes. En fonction du nombre de vues et d’abonnés, notamment, on peut estimer à quel stade de leur carrière sont les deux auteurs. Donc pour collaborer avec lui, c’est de la débrouille. J’ai contacté son manager et ça s’est bien passé.» En échange d’un cachet, le rappeur français «offre» un peu de sa notoriété au Suisse, mais lui permet aussi de connaître d’autres personnes du milieu.

Les rappeurs français n’hésitent d’ailleurs pas à donner beaucoup en retour. «Ils s’investissent vraiment, relève Stéphane Alima Béguelin. La deuxième fois qu’on est allé en France, on a collaboré avec Key Largo (ndlr: lui aussi comptabilise plusieurs millions de vues sur ses clips) et il y avait beaucoup de bienveillance. Par exemple, la production a ramené d’autres artistes et nous avons tourné un clip, alors qu’ils n’y étaient pas obligés.»

Mais l’Yverdonnois n’est pas près de quitter le Nord vaudois pour autant. «Pour l’instant, je suis dans le plaisir sourit l’artiste. Mais bien sûr, j’espère pouvoir en vivre un jour. Je commence à avoir de la visibilité, mais ça ne rime pas forcément avec argent. Et aller en France, ce n’est pas forcément la bonne décision pour moi aujourd’hui.» Son compère de toujours précise: «Il a déjà une image de rappeur suisse, qu’on met en avant dans ses clips en utilisant des francs suisses plutôt que des euros, par exemple.»

Puis vient la question de l’entourage: «Ici, j’ai plus de contacts, et j’ai Simon. L’objectif est aussi de faire rayonner la production suisse. Après, si une opportunité se présente, je la saisirai.» Et celui qui le connaît depuis ses 12 ans de conclure: «Des fois c’est comme ça dans la musique, en un jour tu avances de dix ans.»

 

Un parcours entre musique et football

 

Né au Cameroun, Stéphane Alima Béguelin est arrivé en Suisse à l’âge de 4 ans, grandissant à Lausanne jusqu’à ses 10 ans. Ses parents déménagent ensuite à Yverdon. «Au début, j’étais au bout de ma vie quand on a quitté Lausanne, sourit-il. Mais c’est toujours le cas quand on déménage et qu’on est jeune.» Pour découvrir les habitants du Nord vaudois, l’homme aujourd’hui âgé de 21 ans peut néanmoins compter sur un facteur d’intégration qui a toujours fait ses preuves: le football. «C’est vraiment ma passion, ça l’a toujours été. À une époque j’ai même voulu percer dans le foot.» Après un parcours au sein de Team Vaud, il intègre notamment le mouvement juniors de Xamax. «Aujourd’hui, je joue pour le plaisir à Champagne.»

En parallèle du ballon rond, le jeune Camerounais se découvre une autre passion, un peu par hasard: la musique. «Au début, c’était juste pour rigoler avec mes amis au studio. Et au fur et à mesure, j’y ai pris goût. Jusqu’à ce qu’on se dise qu’on pouvait peut-être faire des vrais sons.»

En tout, trois ans se sont écoulés entre les premiers pas de Stéphane Alima Béguelin dans un studio et la sortie de son premier projet. Aujourd’hui, plusieurs de ses clips dépassent les 60 000 vues sur YouTube et il totalise plus de 300 000 écoutes toutes plateformes confondues.

 

Pour découvrir LaTek

 

Son dernier projet: Sortie en janvier 2021, la mixtape Zone 14 offre des titres aux sonorités très variées. LaTek y parle de sa vie, de ses expériences et de ses observations.

Les collaborations: Plusieurs invités participent au projet Zone 14, dont les français Key Largo et Irvin de L’impasse. LaTek a aussi collaboré avec William Thomas, célèbre réalisateur de clips qui a notamment travaillé avec les rappeurs Jul ou Niska.

La suite: Un nouveau projet est en route et devrait bientôt sortir. Pour être immédiatement au courant, n’hésitez pas à suivre l’Yverdonnois sur sa chaîne Youtube, Spotify (LaTek) ou Instagram (latek14).

Massimo Greco