Moins d’un an après avoir succédé à Julien Cuérel à la syndicature, Olivier Mettraux a annoncé en décembre sa démission. Le climat politique tendu qui règne à Baulmes n’est pas étranger à ces départs. Le syndic assure qu’il ne part pas en claquant la porte, mais il se dit épuisé et veut passer à autre chose.
Il y a un sentiment d’ambivalence dans les propos d’Olivier Mettraux qui nous a reçus avant l’élection tacite de Jacques Balmat et Jaques-Yves Deriaz (La Région d’hier): «Pendant mes neuf ans de Municipalité, je me suis éclaté, j’ai découvert de belles personnes, nous avons réalisé de beaux projets, mais je suis content de m’arrêter. Je voulais aller jusqu’au bout de mon mandat, mais il y a eu un trop-plein. Il est possible de tirer, pousser, mais il y a une limite. Même si j’ai la chance de bien gérer mon stress, il y a une forme de ras-le-bol et je suis arrivé à la conclusion que je devais m’arrêter pour le bien de tout le monde, à commencer par moi et mon couple. La décision n’a pas été facile à prendre parce que j’aime faire ça. Un municipal est là pour y faire un bout de sa vie. Nous sommes comme un grain de sable dans la vie d’une communauté. Et il y a des moments où on peut s’investir et d’autres moins.»
Un sacerdoce
De l’avis unanime des observateurs de la vie politique locale, exercer la fonction de syndic ou de municipal dans une petite commune relève du sacerdoce, ce qu’il confirme: «C’est beaucoup d’implication, je travaille trois à quatre soirs par semaine, le samedi et le dimanche. Nous sommes contraints de remplir des tâches opérationnelles. Avec les règlements, les dossiers, les courriers, les suivis et les informations, c’est complexe.»
Taux de rotation élevé
La Municipalité de Baulmes a par ailleurs connu une législature compliquée. Par étapes, ce sont six nouveaux élus qui sont entrés en fonction. Pour commencer, lors des élections de 2021, trois sortants avaient été éjectés. Par la suite, une municipale a démissionné pour raison de santé, marquant le retour de Thierry Lacroix. Puis en mai 2024, c’est le syndic Julien Cuérel qui s’en est allé pour saisir une nouvelle opportunité professionnelle, suivi par une autre municipale. «C’est à ce moment-là que ça a commencé à serrer un peu», analyse Olivier Mettraux.
Le syndic bientôt sortant semble vouloir faire passer un message à ceux qui rechignent à s’investir par peur et à ceux qui exercent des critiques trop violentes: «Peu nombreuses sont les personnes qui ont des compétences du métier et s’engagent pour le village. Ce n’est pas le bon moment, elles ont un travail… Pour moi, c’est à la fois un manque d’investissement et la crainte de la critique. Ce n’est pas une place facile, nous sommes toujours sur le devant de la scène. Et quoi que vous fassiez, il y a toujours un groupe de personnes pour dire que ce n’était pas bien, mais il faut vivre avec ça.»
La polémique qui pèse
A la question de savoir si son départ a pour but de créer une réaction, Olivier Mettraux est catégorique: «Non, c’est avant tout personnel. Je viens d’avoir 56 ans. Je ne suis jamais à la maison, j’ai une épouse qui m’attend tout le temps, j’ai moins de temps à disposition pour tout le monde ou beaucoup trop de temps pour les autres et pas assez pour moi. J’ai commencé à y penser il y a six mois. Mais il est vrai que c’est une addition de raisons.
La polémique autour du centre de vie enfantine (accueil parascolaire) en fait partie. «Cette structure coûtait très cher et les dépenses n’avaient pas vraiment de limites. Avec mes collègues, nous l’avons analysée, puis observée et écoutée. Quand nous avons vu les chiffres, les factures, les commandes, nous sommes arrivés à la conclusion qu’il fallait tirer le frein. Nous ne pouvons pas dépenser sans compter!
Pas de grosse fortune
Notre commune est grande. Nous avons beaucoup de forêts, routes, chalets d’alpage, refuges et du patrimoine à entretenir. Et nos moyens sont limités : nous n’avons pas de grosses fortunes qui s’installent. C’est d’ailleurs dommage car c’est une belle région!» commente Olivier Mettraux.
Fin octobre dernier, cette structure qualifiée de «gouffre financier» avait mis le feu aux poudres lors de la séance du Conseil communal. Des voix s’étaient fait entendre pour dénoncer le manque de communication de la Municipalité et l’anxiété des parents et des collaboratrices.
Climat tendu
«C’est devenu très tendu. Il y a une méconnaissance des contraintes auxquelles sont soumises les municipalités. Nous ne pouvons pas communiquer sur des dossiers en cours de travail, surtout quand des ressources humaines sont en jeu. Les questions pédagogiques ne sont pas de notre compétence. Celle-ci se limite à la gestion. Dans la foulée, il y a eu la démission avec effet immédiat de la présidente du Conseil communal qui s’est plainte du manque de communication de la Municipalité, ce qui nous a tous éberlués. D’aucuns n’arrivent pas à percevoir que nous ne sommes pas là pour défendre des intérêts particuliers, mais les biens communaux. Ils en font des affaires personnelles et nous subissons des agressions verbales. Heureusement, depuis ça s’est amélioré, tout le monde s’est calmé», conclut Olivier Mettraux.
Un réseau d’eau potable efficient
Olivier Mettraux est responsable du service après-vente d’une entreprise de Crissier, spécialisée dans la domotique, l’éclairage, la ventilation, le chauffage, le refroidissement et la climatisation.
Au début de sa carrière, il a été automaticien pendant plus de dix ans et a voyagé dans le monde pour faire de la mise en service de machines d’emballage du fromage. La technique l’a toujours passionné. «Quand je suis arrivé en Municipalité, on m’a tout de suite mis dans la technique, avec le dossier sur l’eau potable», se rappelle Olivier Mettraux. «Il a fait un travail énorme», n’hésite pas à affirmer son collègue Thierry Lacroix.
Il aura fallu neuf ans pour qu’il arrive au bout de ses peines. L’Association intercommunale du Vallon de la Baumine, qu’il préside, gère l’alimentation en eau potable des communes de Baulmes, Champvent et Vuiteboeuf, a désormais des installations efficientes, avec de l’eau en abondance et dont la qualité répond aux normes cantonales.
Nouvelles exigences professionnelles
Sans avoir démérité, comme ses collègues réélus tacitement hier, Thierry Lacroix avait été recalé en 2021 après avoir siégé en Municipalité durant une législature. Il y est revenu en 2023 au bénéfice d’une élection complémentaire tacite, permettant à l’Exécutif baulméran d’avoir une équipe complète. Il a dû, à son grand regret, renoncer à poursuivre cette activité compte tenu de sa nouvelle charge de travail. Thierry Lacroix, après avoir travaillé vingt ans pour le pâtissier Guignard, a rejoint il y a treize ans l’école professionnelle Le Repuis comme maître socioprofessionnel dans le domaine de la cuisine. Il dit devoir faire face à de nouvelles exigences, en particulier administratives. Plutôt que de devoir cravacher pour exercer sa fonction et de courir d’une séance à l’autre, il préfère céder sa place à quelqu’un qui aura une meilleure disponibilité pour effectuer au mieux sa tâche. Avant d’être municipal, Thierry Lacroix a siégé au Conseil communal durant dix ans et l’a présidé à deux reprises.
Dès lors qu’elle est désormais au complet, il s’agira maintenant pour la Municipalité de se réunir pour évoquer la question de la syndicature. Si l’élection n’était pas tacite, les électeurs seraient invités à se prononcer le 29 juin prochain.