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«Le tireur a pointé son arme vers mon cœur»

18 janvier 2013

Le procès des cinq prévenus d’origine kosovare s’est poursuivi au Tribunal criminel de la Broye et du Nord vaudois. Celui qui avait failli laisser sa peau dans la fusillade de Lucens est arrivé mercredi et le récit des événements a été passé au peigne fin. 

Peu après les faits, la police avait bouclé et quadrillé le quartier de la Grand-Rue de Lucens, à la recherche de douilles.

Plus de doute, l’affaire de la fusillade de Lucens qui avait eu lieu le 31 octobre 2011 pourrait très bien servir de scénario à une série policière qui ne manquerait pas de piquant et de coups de feu. Avec heureusement une issue favorable pour celui des cinq comparses qui avait été sérieusement blessé au thorax par une balle qui l’avait complètement traversé. Il avait eu la vie sauve, suite à une intervention chirurgicale au CHUV.

L’intervention de son avocat, Me Stefan Disch, au Kosovo, et le sauve-conduit de la présidente du Tribunal criminel de la Broye et du Nord vaudois ont permis qu’il puisse venir déposer et il est arrivé mercredi à Yverdon-les-Bains. Il était retourné dans son pays suite à une interdiction de domicile en Suisse. Or, sa version des faits avait bien entendu une importance capitale dans ce procès, après que les quatre autres prévenus ont fourni la leur.

En particulier la déposition des deux frères, F. B. et B. B., qui, selon l’acte d’accusation, ont tiré sur les trois autres protagonistes de cette fusillade, F. K., A. H. et M. L. (La Région Nord vaudois du mercredi 16 janvier). Si c’est certain pour l’un d’entre eux, ce ne l’est pas pour l’autre. Rappelons que ces trois autres protagonistes s’étaient rendus au domicile de ces deux frères parce que ceux-ci avaient sérieusement tabassé l’un d’entre eux, A. H., consécutivement à un différend financier concernant un fond de dette impayé. Ils l’avaient retrouvé dans un mauvais état à Moudon et avaient en quelque sorte décidé d’une expédition punitive le même soir à Lucens.

Course-poursuite

«On n’avait pas d’arme, ni de couteau, juste un bout de bois entre les sièges, a déclaré F. K., celui qui a reçu le coup de feu. Dès qu’il est sorti de la maison, le tireur a pointé sur moi, en direction de mon cœur.» Le montrant d’un geste de la main: «C’était lui»! La présidente: Est-ce que d’autres personnes ont tiré? «Je n’ai pas vu et je n’en sais rien car, ensuite, j’ai perdu connaissance.»

Ensuite, c’est justement la course-poursuite sur la route de Berne, en direction de Lausanne, où plusieurs coups de feu ont encore été tirés, alors que le blessé était inconscient au volant. «Il avait toujours le pied sur l’accélérateur et je tenais le volant parfois avec l’aide de notre camarade à l’arrière, a déclaré F. K. J’ai dirigé le véhicule à vive allure jusqu’à la montée de Montpreveyres, où ils ont arrêté de nous poursuivre et ils ne tiraient plus.»

Reste que pour le plus jeune des deux protagonistes sortis de la maison à Lucens, lors du passage de la Mercedes, un de leurs occupants a aussi adressé un coup de feu en direction de son frère depuis la voiture, qui roulait à vitesse réduite. Autant dire qu’il n’est pas facile de démêler cette affaire, une sorte de guerre de clans à la mode kosovare, au coeur de la communauté balkano-broyarde et où pourtant tout le monde se connaît plus ou moins.

« Juste faire peur »

Une chose est sûre, l’un des deux frères, F. B., celui qui est actuellement incarcéré à la prison du Bois-Mermet et qui a provoqué la blessure de F. K., assume tout et ne veut mettre en cause aucun autre membre de sa famille: «J’avais pris ce pistolet par précaution quand je suis sorti; quand j’ai entendu mon jeune frère crier et que je l’ai vu tomber, j’ai tiré en me concentrant sur la Mercedes. J’ai agi sans réfléchir; je maintiens que j’étais menacé et qu’a priori je voulais juste faire peur. Je suis content que F. K. ait pu s’en sortir. Durant la poursuite, j’ai tiré depuis la fenêtre droite.»

A la question de la présidente: «Vous étiez dans quelle voiture et qui conduisait?», il refuse de citer qui que ce soit et a visiblement décidé de tout prendre sur lui. Le réquisitoire du Ministère public et les plaidoiries des avocats sont programmés au début de la semaine prochaine.

 

Roger Juillerat