Le Tribunal en inspection au Cheminet
4 juillet 2012Afin de constater les effets des mesures prises, la Cour administrative et de droit public du Tribunal cantonal a procédé à une vision locale lundi, en présence des parties.

Rue de Montagny, Luc Tomasetti (à droite) explique au président François Kart (à gauche) les mesures qui seront prises dans le futur.
La nature du dossier méritait bien un exercice de mobilité douce. Saisie par trois groupes de recourants du quartier Cheminet-Saint-Georges, qui s’opposent aux mesures prises à fin 2010 par la Municipalité d’Yverdon-les-Bains, la Cour administrative et de droit public du Tribunal cantonal, présidée par François Kart, a procédé lundi matin à une visite locale. Un exercice qui a duré plus de deux heures, durant lequel les trois membres de la Cour, et les représentants des parties, ont fait le tour du quartier, pour tenter de voir un peu plus clair dans un imbroglio juridico-circulatoire, aux allures de sac à noeuds emballé par le projet AggloY.
Quelles priorités?
Le président a d’emblée posé les questions essentielles, qui concernent aussi bien la hiérarchie des routes que celle de la législation applicable. Au nom de l’Exécutif, Luc Tomasetti, responsable de la filière mobilité, et à ce titre rattaché au syndic, a expliqué les choix opérés entre les routes de desserte. Une présentation qui a suscité une réaction de François Kart, propre à démontrer qu’il ne fallait pas se perdre: «Vous n’avez pas répondu à ma question. Il y a un choix qui a été fait sur le Cheminet.»
Confirmer d’ailleurs par les faits, la Cour étant réunie devant le Collège du Cheminet. Et le responsable de la mobilité de relever que cette rue faisait partie de «la traversée d’usage de la ville», avant d’ajouter: «Naturellement, il y a plus de trafic.» Etonnement du président qui relève alors que le degré de sensibilité au bruit admis est de 2 au Cheminet… et de 3 (tolérance supérieure) à la rue de Montagny.
Le syndic Daniel von Siebenthal intervient alors pour expliquer que le plan directeur de 1975 n’est plus applicable: «Il faut voir cela par étapes.» Et d’ajouter qu’avec la construction du barreau ouest (liaison Chamard-Châtelard), prévue en 2020, «cela va changer».
Le président de la Cour soulève alors «un problème de nature juridique», qui touche à la législation en vigueur, et aux mesures du projet d’agglomération AggloY. Avocat de la Ville, Me Yves Nicole affirme qu’il n’y a pas de contradiction avec le plan directeur communal.
La fermeture du pont
François Kart demande ensuite pourquoi des mesures prévues pour 2020 ont été avancées à 2010 alors que, par exemple, le pont de la rue de Montagny n’aurait dû être fermé qu’après la construction du barreau Ouest.
Le syndic affirme que la planification a été avancée pour assurer la sécurité des usagers: «C’est une étape intermédiaire. La Municipalité a décidé que c’était préférable pour l’avancement du projet et le passage des bus des fermer le pont en une seule étape, tout en prenant des mesures.»
Sur ce point, une représentante du Services des routes a d’ailleurs confirmé que le Canton avait été informé d’une mise en sens unique du pont, mais pas de sa fermeture…
Les points noirs du quartier ont été passés en revue par la Cour
Les reports de trafic et leurs conséquences
La Cour administrative et de droit public a véritablement pris le temps pour tenter d’y voir un peu plus clair dans ce dossier compliqué, dans lequel la «tactique du saucisson» paraît la règle. Les personnes présentes ont ainsi appris que si elle n’était pas inclue dans la zone 30 prévue pour le quartier, la rue du Cheminet bénéficierait de mesures (passages à piétons avec îlots, arrêts de bus bloquant le passage) propres à en obtenir les mêmes effets modérateurs.
Autre révélation, les priorités seront changées au carrefour de la route venant de Chamard avec la rue Edouard-Verdan, dans le but de réduire le trafic à la rue des Uttins. Voilà qui ne va pas faciliter le passage de la chicane construite près de la Fondation Saint-Georges, et qui va encore compliquer les choses sur l’avenue de Grandson. Les spécialistes des bureaux d’études présents ont admis que, suite aux mesures en vigueur, quelque 2000 véhicules ont été transférés sur les autres axes, notamment l’avenue de Grandson: «Deux mille sont partis à l’extérieur du quartier, deux mille sont restés.»
Les piétons en danger
Le manque de sécurité, pour les piétons, a été déploré, notamment dans la partie finale de la rue du Cheminet, à la rue du Canal, car il n’y a pas de trottoir et le trafic s’y écoule dans les deux sens. Le seul progrès à ce jour est celui obtenu en faveur des habitants de la rue Saint-Georges, qui ont vu le nombre de véhicules y passant être réduit de moitié, à 1200. Mais il ne s’agit que d’une mesure provisoire. La fermeture du pont de la rue de Montagny revient sans cesse. Au point qu’un juge assesseur se demande s’il ne serait pas envisageable de l’ouvrir à nouveau dans un sens, ce qui permettrait de concilier sécurité et passage des bus. Le syndic objecte que l’étroitesse de la route entre la rue de Chamblon et le pont de Montagny a été la cause de nombreux accidents. Interpellé par l’une des parties, le responsable de la prévention à la Police municipale relève que ce n’est pas à cet endroit que se sont produits les accidents, mais au carrefour des rues d’Orbe et de Chamblon.
Bien conscient des problèmes générés, le responsable de la filière mobilité annonce des aménagements pour sécuriser la rue du Canal (1300 véhicules par jour). Des places de stationnement seront supprimées pour aménager des évitements et des piquets marqueront la bande réservée aux piétons. Au terme d’une inspection locale qui a duré près de deux heures trente, le président a levé l’audience. Le verdict n’est pas attendu avant plusieurs mois.