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L’Enfer s’ouvrira-t-il sous leurs pieds?
Le Welsch Master Team espère pouvoir présenter Pandémonium au prochain Gym for Life, en juillet prochain à Lisbonne. © Benjamin Payot

L’Enfer s’ouvrira-t-il sous leurs pieds?

10 décembre 2020 | Edition N°2848

Gymnastique – Emmené par Myriam Bertholet-Laala, le Welsch Master Team doit participer à une compétition internationale au Portugal, en juillet prochain. Mais la pandémie met à mal la préparation du groupe et menace l’événement.

Myriam Bertholet-Laala apprend la chorégraphie qu’elle a conçue aux gymnastes du WMT. © Benjamin Payot

Le World Gym for Life Challenge

Un planning établi des mois à l’avance. Des dates réservées par 50 gymnastes. Et une première échéance importante: le 13 décembre 2020. Ce dimanche en fin de journée, Myriam Bertholet-Laala aurait dû avoir fini d’apprendre les 4’59 de production élaborée par ses soins aux membres du Welsch Master Team (WMT), en vue du World Gym for Life Challenge 2021.

Au lieu de ça, l’entraînement est d’ores et déjà annulé, comme tant d’autres cette année, et seule une petite moitié de la chorégraphie a été apprise par bribes. Et encore faudra-t-il que les athlètes s’en souviennent quand ils pourront réinvestir les salles de gym.

Pourtant, la cheffe d’orchestre du WMT refuse d’être pessimiste. Le World Gym for Life Challenge, qui doit se dérouler à Lisbonne du 13 au 17 juillet 2021 et accueillir quelque 3000 gymnastes du monde entier, elle y croit. «Le Portugal fait tout pour maintenir la manifestation. Les préparatifs continuent. Quant à nous, on a reçu les tenues suisses officielles et on est en train de réserver l’hébergement», indique Myriam Bertholet-Laala.

Le concours international, qui se déroule tous les quatre ans, doit cette fois-ci avoir lieu principalement dans l’Altice Arena, qui peut accueillir 20 000 spectateurs. Les groupes sont récompensés d’une médaille de bronze, d’argent ou d’or. Ceux qui en obtiennent une du métal jaune participent au Gym for Life Gala, à l’issue duquel une formation est sacrée championne du monde des clubs. Il y a trois ans en Norvège, le WMT avait obtenu une médaille d’argent pour son numéro Roméo & Juliet, mais avait tout de même pu prendre part au gala final grâce à une wild card.

Un nouveau chapitre

Après Inferno et ses anges déchus, présenté lors du gala de la Fédération internationale de gymnastique (FIG), à l’occasion de la Gymnaestrada de Dornbirn en 2019, Myriam Bertholet-Laala s’apprête à livrer la suite de l’histoire. La nouvelle production du WMT s’intitule ainsi Pandémonium, du nom de la capitale des Enfers.

«Après le départ de Lucifer, le démon féminin Lilith a pris le pouvoir. Mais Lucifer revient et veut récupérer le trône. Il s’agira d’une lutte du mal contre le mal, ça va être glauque», prévient la monitrice.

Le plus difficile pour elle? Se limiter aux cinq minutes maximum imposée «C’est à chaque fois mon challenge. Pour le Gala FIG, je n’avais initialement droit qu’à deux minutes. Mais j’ai tellement bringué que les organisateurs ont fini par me laisser trois minutes trente. C’était la production la plus longue du show mais la plus courte que j’aie monté! C’est dur de raconter une histoire en si peu de temps.»

«Les gymnastes ont bloqué les dates des entraînements et, à chaque fois, je dois leur annoncer à la dernière minute que c’est annulé.»

Une préparation mise à mal

«Nous avons besoin d’endroits accessibles avec la remorque qui transporte notre matériel et pas trop chers, car comme on n’est pas une société de gym, nous finançons nous-mêmes nos entraînements, précise Myriam Bertholet-Laala. On aime bien la salle du Puisoir à Orbe, parce qu’on peut dormir sur place lors des week-ends d’entraînement et elle correspond à nos critères.»

Comme les 50 gymnastes viennent de tous les cantons romands sauf Genève, le groupe se réunit aussi à Neuchâtel et à Fribourg. «Ça évite que celui qui vient du Jura fasse quatre heures trente de trajet à chaque fois.»

Mais tous les concierges ne les acceptent pas. «Certains refusent de devoir nettoyer après le passage d’une cinquantaine de personnes à cause des mesures sanitaires.» Des mesures qui donnent du fil à retordre au WMT, puisqu’elles diffèrent selon les cantons. Et qu’elles ont contraint l’équipe à annuler bon nombre de leurs entraînements en 2020.

«On a pu faire deux jours de condition physique et de travail individuel fin mai, par petits groupes et avec des postes espacés. Puis un vrai week-end de gym plus un entraînement en juin. Et tout le reste a dû être annulé. C’est compliqué, car les gymnastes ont bloqué ces dates et, à chaque fois, je dois leur annoncer à la dernière minute que c’est annulé car les mesures ne se sont pas assez assouplies.»

Georges leur a ouvert les portes de Macolin

Avec Pandémonium, le groupe présentera une nouvelle fois un numéro au sol, sur un air track – sorte de grand coussin d’air ressemblant à un matelas pneumatique – de 14m sur 14m et avec six mini air floor, soit des petits matelas gonflables qui permettent notamment d’éjecter des gymnastes en l’air.

L’air track du WMT, unique en Suisse et affectueusement surnommé Georges, a d’ailleurs ouvert les portes du Centre national de sport de Macolin au groupe romand. «Les cadres nationaux l’ont testé pendant une semaine. Les gymnastes rythmiques se sont notamment entraînées dessus pour voir si cela ménageait leurs articulations», explique Myriam Bertholet-Laala.

Ancienne monitrice aux Amis-Gymnastes d’Yverdon et physiothérapeute, elle constate pour sa part qu’il y a beaucoup moins de blessés au WMT qu’il y en avait lorsqu’elle entraînait dans la Cité thermale avec des tapis traditionnels. «Par contre, c’est une autre façon de travailler. Sur un matelas de 20cm d’épaisseur, les fautes techniques ne pardonne pas.»

Puisque Georges avait passé une semaine à Macolin, les gymnastes du WMT ont eu la possibilité d’aller s’y entraîner durant une journée. «Et désormais, on y est les bienvenus», glisse l’habitante de Belmont-sur-Yverdon.

Un contre-la-montre

Pendant que le WMT est en pause forcée, l’heure tourne. Le groupe doit se produire lors de la cérémonie d’ouverture des Championnats d’Europe de gymnastique artistique à Bâle, le 21 avril prochain.

«On ne présentera vraisemblablement qu’une partie de notre numéro. Par contre, même si on ne devait avoir que trois ou quatre mois pour préparer le Gym for Life, ça va le faire, assure Myriam Bertholet-Laala. La seule chose qui pourrait nous empêcher d’y prendre part, c’est une annulation. Et là, ce serait tout un monde qui s’écroule.» Pour le Welsch Master Team, l’Enfer ne serait alors plus seulement dans sa production.

Muriel Ambühl