Logo

Les jeunes délaissent le vélo

20 novembre 2024 | Jessica Kormann
Edition N°3835

La soirée s’est poursuivie avec une conférence de la doctorante de l’Unil Aurélie Schmassmann, qui a présenté sa thèse concernant l’identification et la compréhension des trajectoires cyclistes des jeunes.

Menée à Yverdon-les-Bains en raison de la taille moyenne de la ville et de son relief favorable à la pratique du vélo, l’étude d’Aurélie Schmassmann a été réalisée en collaboration avec le collège Léon-Michaud, le CPNV, le collège des Rives et le Gymnase d’Yverdon.

Pour la doctorante, on retrouve en Suisse trois tendances dans la pratique du vélo chez les jeunes. Premièrement, son étude lui a permis d’identifier un effet de génération, soulignant notamment que les jeunes font de moins en moins de vélo.

L’âge est également un facteur non négligeable, puisque les 16-20 ans pratiquent moins la discipline que les 13-15 ans. Enfin, le contexte géographique joue également un rôle important, puisque les 13-15 ans font moins de vélo en Suisse romande qu’en Suisse alémanique.


Quatre facteurs explicatifs

Pourtant, le vélo ne semble pas avoir mauvaise réputation. «On a demandé aux jeunes de nous définir ce qu’était, pour eux, le vélo en trois adjectifs, a expliqué Aurélie Schmassmann. Et les jeunes ont une image assez positive de la bicyclette.» Quatre facteurs sont ainsi à observer afin d’expliquer la baisse drastique de cyclistes chez les jeunes, malgré une image plutôt positive.

Premièrement, un facteur individuel regroupant l’accès, les compétences, et l’appropriation. On remarque que si le vélo est un premier outil d’indépendance, il est rapidement concurrencé par la mobilité motorisée, avec l’arrivée du vélomoteur, du scooter, puis évidemment de la voiture. Afin que les jeunes continuent de se déplacer à vélo lorsqu’ils atteignent l’âge requis pour utiliser ces modes de déplacement motorisés, «il est important d’ancrer les pratiques dès le plus jeune âge», livrait Aurélie Schmassmann. Une grande partie des jeunes qui ralentissent leur pratique du vélo le font aussi par manque d’accès à un vélo fonctionnel.

Le facteur social vient en deuxième position, avec l’observation de la pratique des parents et des amis. La doctorante a ainsi observé une pratique du vélo accrue chez les jeunes dont les parents sont eux-mêmes des cyclistes. Certains témoignent également cesser d’utiliser leur vélo lorsque leurs amis arrêtent, car ils ne souhaitent pas en faire seul. Le vélo ne permet effectivement pas de circuler ensemble, contrairement au bus, notamment.

Les aspects contextuels jouent ensuite un rôle non négligeable, puisque le danger de rouler en ville dissuade une partie des cyclistes, ou pousse les parents à interdire la pratique.

Enfin, le genre entre en jeu, puisque les filles tendent à suivre davantage une trajectoire d’abandon. «Chez les garçons, l’image positive du vélo est liée au vélo de descente, au BMX, etc., selon Aurélie Schmassmann. Ce sont des éléments qui ne se retrouvent pas du tout chez les filles. Elles mentionnent davantage des questions de sécurité et d’effort physique.»


Des pistes de résolution

Afin de résoudre le problème de l’accès aux vélos, il pourrait, selon Aurélie Schmassmann, être intéressant que les écoles proposent le prêt de vélos, afin de permettre aux jeunes d’y avoir accès plus facilement. L’organisation de bourses aux vélos, comme celle que propose Pro Velo chaque année, est aussi particulièrement importante.

Promouvoir les cours de vélo à l’école, et accompagner les jeunes par la suite, est également un point non négligeable. «Les jeunes ont du mal à faire le transfert du jardin de circulation à la vraie vie», soulignait la doctorante. Il faut ainsi les accompagner dans ce processus, en demandant aux écoles de proposer des itinéraires maison-école, par exemple.

L’objectif est finalement de permettre aux jeunes de passer du vélo comme jouet au vélo comme mode de transport ou de loisir. «Les gens ont envie de faire du vélo, mais il faut développer le territoire pour répondre à leurs besoins», concluait Aurélie Schmassmann.


Trois trajectoires

Après la phase d’apprentissage, par laquelle passent 98% des jeunes dans notre pays, la majorité suivent donc l’une des trois trajectoires suivantes: la trajectoire utilitaire, restauratrice ou diminutive.

La première inclut autant de filles que de garçons, et regroupe les jeunes utilisant leur vélo afin de se rendre à l’école, en visite chez quelqu’un, ou utilisant leur vélo pour n’importe quel but utilitaire.

La trajectoire restauratrice, quant à elle, concerne surtout des filles du gymnase. Elle inclut toutes les personnes ayant repris leur pratique après un arrêt plus ou moins prolongé. Le manque d’accès à un vélo fonctionnel est lié à cette trajectoire, puisqu’il arrive que certains jeunes délaissent leur vélo par incapacité, ou manque d’envie, à le réparer.

Enfin, la trajectoire diminutive concerne davantage de filles du gymnase et du CPNV, et s’explique souvent par un changement d’école, la peur, ou encore les aspects sociaux.