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Les savants fous du rhum
John Gallandat (en dessus) et Yann Delisle ouvrant les portes de leur nouveau labo, aux normes pour la vente de produit alimentaire.

Les savants fous du rhum

4 avril 2025 | Texte: Robin Badoux | Photos: Michel Duperrex
Edition N°3922

Depuis 2018, deux Tsavannais se sont lancés dans la fabrication de liqueurs aromatisées à base de rhum. Une aventure spiritueuse qui a déjà piégé plus d’un consommateur.

«Pourquoi ça fait ça? On n’en sait rien. C’est encore un mystère!» Regarder John Gallandat et Yann Delisle travailler dans leur laboratoire à la fabrication de leur rhum aromatisé, c’est comme observer deux alchimistes. Ils ont même leur propre grimoire secret contenant toutes leurs recettes. Et pourtant, même si cela ne se voit pas au premier abord, les deux amis savent ce qu’ils font. Depuis 2018 ils fabriquent ensemble des liqueurs parfumées. Une drôle d’idée qui, peu à peu, est devenue plus sérieuse, pour ne pas dire plus professionnelle, et qui a fini par se cristalliser en une véritable entreprise, John & Yann’s SNC, et un «laboratoire» flambant neuf, parfaitement aux normes. Une belle évolution pour les deux potes. Car, si alchimie il y a, c’est d’abord celle qui lie ces deux joyeux camarades.

Les copains d’abord

L’aventure commence en 2018. «On s’est lancés un peu par hasard, admet Yann Delisle. On se connaît depuis toujours avec John. Un jour, on ne sait pas ce qui nous a pris pour une idée, mais on s’est mis en tête de faire du calvados. On est allés cueillir des pommes, on est descendus à la cave, puis la maman de John est arrivée avec du rhum arrangé qu’elle a l’habitude de faire. On s’est regardés et on s’est dit: pourquoi pas en faire nous-mêmes?»

Incapables de tenir en place, les deux copains finissent par créer leur premier mélange, du rhum à la banane et à la vanille, dont les premières bouteilles ont été offertes à des amis. C’est alors que le projet prend une tout autre tournure. «Le premier essai a plu aux gens, qui revenaient en nous disant: est-ce que vous en avez à vendre? Parce que c’est bon.»

De fil en aiguille, la production passe de 50 bouteilles à 300, pour se fixer autour des 1000 ces dernières années. «Au début, on faisait ça juste pour nous et les copains. Puis les gens ont voulu en acheter. Nous, ça nous plaît, et on apprend des choses», ajoute John Gallandat.

Par la suite, alors que les deux amis avaient pour habitude de se réunir chez l’un ou l’autre pour préparer leur breuvage, ils se professionnalisent, jusqu’à s’enregistrer en SNC en  2021, et commencent la confection d’un local aux normes. «Il y a eu un audit pour voir si on ne faisait pas un truc dangereux. On a alors découvert les facéties des normes dans l’alimentation, qui sont une horreur, rien que pour la contre-étiquette par exemple», résume Yann Delisle. «On avait la volonté d’aller plus loin. C’est pour ça que nous avons aussi créé un site internet, ce qui donne plus de crédibilité», ajoute John Gallandat. C’est d’ailleurs dans sa maison que les deux compères ont finalement installé leur laboratoire, qui a été terminé il y a quelques jours.

«Une bouteille qu’on n’hésite pas à ouvrir»

Et l’endroit porte bien son nom. Car les deux camarades adorent imaginer de nouvelles saveurs. «On est fous et on aime expérimenter. On a essayé de faire du rhum au basilic, au citron, au poivron ou au gingembre. Il n’y a pas de limite. La seule règle pour valider un parfum, c’est que nous devons aimer le goût tous les deux.»

Leurs essais leur ont permis de valider plusieurs mélanges, comme ananas-coco, café, framboise, meuron, orange-clou de girofle ou pomme-cannelle – les deux derniers faisant partie de la gamme de Noël.

La quasi-totalité des mélanges partent d’une base de rhum brun, coupé avec une petite quantité de sirop de canne à sucre. «C’est un rhum qui vient des Caraïbes. Ce n’est pas le meilleur des rhums, mais notre objectif, c’est de faire une liqueur qui plaît à tous, pas forcément haut de gamme. Quelque chose de simple, comme nous. Une bouteille qu’on n’hésite pas à ouvrir», détaille Yann Delisle. Et son collègue d’ajouter: «Ce n’est pas le rhum qu’on met en avant, mais les fruits et les ingrédients qu’on ajoute.»

Neuf arômes différents sont disponibles, dans des bouteilles entre 25 et 30% d’alcool. Un taux qui ne se sent pas tout de suite une fois arrivée l’heure de la dégustation. «C’est pour ça qu’on indique sur l’étiquette: c’est un piège! On ne peut rien nous reprocher», lancent-ils, tout en admettant qu’ils se sont eux-mêmes fait avoir plusieurs fois par leurs propres breuvages.

A la recherche de partenariats

Désormais, les deux Tsavannais entendent diversifier leur gamme, tout en trouvant des partenariats pour amener leur produit au public. «On s’est principalement concentrés sur l’installation du laboratoire, ce qui fait qu’il n’y a pas eu de nouvelles recettes depuis deux ans. Pour la même raison, on a un peu négligé le côté marketing», reconnaissent-ils.

L’idée de continuer à développer leur projet est toujours présente, même si cette activité ne reste qu’un hobby à côté de leurs métiers et de leurs vies de famille respectifs. «Pour faire des bénéfices, il faudrait qu’on vende 2000 bouteilles par an. Mais là, on n’aurait plus de temps pour rien faire.» Pour l’instant, les deux compères espèrent donc passer le cap des 1500 bouteilles et trouver de nouveaux partenariats.

Il est possible de trouver leur rhum aromatisé à La Ferme, à Yverdon, à la boucherie Peguiron, de Fey, ou directement sur leur site internet.

À consommer avec modération. D’autant plus que, comme expliqué plus haut: c’est un piège! Vous voilà prévenus.

https://johnandyanns.ch/