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«Lorsque je joue, j’ai 18 ans dans ma tête»
S’il a passé l’essentiel de sa carrière en 1re ligue, à l’époque où il s’agissait de la troisième division du pays, Jonathan Lussier a disputé 48 matches de LNB à Bienne, à Sierre et à Neuchâtel. Photos: Michel Duvoisin

«Lorsque je joue, j’ai 18 ans dans ma tête»

20 janvier 2025 | Textes: Manuel Gremion
Edition N°3873

Une année après son premier match avec le HC Yverdon, en licence B, Jonathan Lussier dispute cette fois la saison à part entière avec le club de la Cité thermale. Le défenseur de 44 ans, qui évolue au côté de son fils Björn, savoure chaque moment. Rencontre en marge de la victoire de vendredi (4-3) face à Saint-Imier.

Jonathan Lussier, comment ce retour à part entière en 2e ligue, à Yverdon,  se passe-t-il pour vous?

Dans l’ensemble, je suis satisfait de mon parcours jusqu’ici. Je me trouvais un peu dans l’inconnu, car la saison dernière je suis arrivé en cours de championnat, dans un rôle d’appui. Je suis toujours dans ce costume, et j’aime transmettre mon expérience, que ce soit aux jeunes ou aux plus vieux. Mais avant tout, je prends un immense plaisir: j’ai peut-être 44 ans, mais lorsque je joue, j’en ai 18 dans ma tête. Le lendemain, au réveil, je n’en ai par contre pas 18!

Votre dernière saison en 2e ligue date de 2013-14. Comment jugez-vous vos performances jusqu’ici?

Je n’ai pas joué durant neuf ans, puis l’an passé j’ai repris un peu mes marques (ndlr: à Royal Lausanne) avec des copains en 3e ligue, puis j’ai dépanné Yverdon. A présent, je suis là sur une base régulière, donc je retrouve un peu les sensations. Mais je n’ai aucune prétention de dire que j’évolue au niveau que j’ai pu avoir. A mon âge, je joue différemment, un peu plus avec la tête. Je me suis préparé physiquement pour encaisser une charge de travail sur la longueur. Le nombre de points que j’inscris est vraiment la dernière chose que je regarde.

Tenez-vous le coup physiquement?

Ça va bien, oui. J’ai parfois des petits pépins au dos et aux adducteurs, mais on a un staff extraordinaire à Yverdon. Les jeunes ne s’en rendent pas forcément compte, mais on a deux masseurs qui viennent une fois par semaine, on est encadrés comme des clubs de 1re ligue ne le sont pas. C’est hyper-plaisant, il y a un bon amalgame entre les anciens et les jeunes, ainsi qu’un bel objectif qui arrive en fin de saison pour les juniors et leurs finales. Le club a incorporé des licences B à la première équipe pour étoffer le contingent, afin de ne pas répéter les erreurs de l’an passé avec les jeunes, pour qu’ils n’arrivent pas cramés quand ça compte. Il y a de belles choses qui se profilent à mon avis!

Qu’est-ce qui fait que vous avez toujours la flamme?

Comme je l’ai dit, du moment que je mets un équipement, j’ai 18 ans. 44, 45 années ne sont pas une barrière. Chez moi, au Canada (ndlr: sa famille est canadienne d’origine, même si lui a grandi en Suisse), il existe de nombreuses ligues où des gars de mon âge, voire au-delà, patinent à un niveau même plus élevé que ça. C’est dans les mœurs, mais en Suisse on voit les choses différemment. A mes yeux, l’âge, c’est dans la tête. Après, je suis bien conscient que je récupère moins bien que les autres. Il sera intéressant de voir comment mon corps réagira à la répétition des matches tous les deux ou trois jours durant les playoffs. En début d’année, on a joué Sion, une belle équipe de 1re ligue, en Coupe, puis Fleurier en championnat: avec deux très bons matches en une semaine, j’étais cuit. Mais mon capital énergie est remonté la semaine suivante, je suis content.

Un mot sur la victoire contre Saint-Imier?

On a réalisé un bon premier tiers, un très bon deuxième, puis ont est retombés dans nos travers, en reculant trop, en laissant des espaces, en jouant sur les talons et avec la peur. Les jeunes nous ont amené beaucoup d’énergie. La ligne de parade était un peu moins présente, mais je ne me fais aucun souci pour la suite, c’est normal dans une saison. Moi, je prends un immense plaisir et j’ai la chance de pouvoir jouer avec mon fils, Björn, quelque chose que j’aimerais pouvoir continuer de partager si mon corps me le permet et que le club le souhaite. Je suis là pour aider, mon ego est à la maison, plus dans le vestiaire.

Il reste deux matches au HCY avant les playoffs, dont le choc face à Moutier.

Le staff va faire tourner un peu l’effectif au Locle, et quelques-uns des plus vieux, on sera de retour pour le match contre Moutier. C’est très bien, ça va donner du temps aux plus jeunes, ils le méritent.

Vous rendez-vous de temps en temps au Canada?

J’y ai toute ma famille, mon papa (Michel «Mike» Lussier, frère de Jean Lussier) y est retourné, et je m’y rends chaque année un mois, un mois et demi.

Et vous y jouez au hockey?

Non, je passe du bon temps avec la famille, je suis dans la nature, au sud-est à une heure de Montréal, dans une région du Québec presque bilingue. Je suis heureux en Suisse, mais je revis quand je retourne là-bas, je n’arrive pas à expliquer, c’est comme ça. Un peu comme les Portugais quand ils retournent chez eux.