Mario Gavranovic, un ancien Yverdonnois décisif en Russie
25 juin 2018Edition N°2274
L’attaquant tessinois a toujours su saisir sa chance lorsqu’elle s’est présentée. Quand il a fallu traverser la Suisse pour signer son premier contrat pro à Yverdon Sport, ou quand il a fallu renverser la vapeur avec la Nati contre la Serbie.
Mario Gavranovic attendait depuis longtemps sa chance à la pointe de l’attaque de l’équipe de Suisse. Le moment est arrivé vendredi soir à Kaliningrad lors d’un match de Coupe du monde contre la Serbie.
Comme d’habitude, Haris Seferovic a commencé la partie. Comme souvent, l’attaquant du Benfica Lisbonne – en cruel manque de temps de jeu depuis des mois – a été très effacé. Mais pour une fois, le sélectionneur Vladimir Petkovic en a tiré les conséquences rapidement. «Peu avant la mi-temps, il m’a dit de m’échauffer, raconte Mario Gavranovic dans les entrailles de la Baltic Arena. Et au coup de sifflet, son assistant m’a dit d’accélérer. J’allais entrer dès la reprise.»
Ouverture parfaite
A ce moment-là, l’équipe de Suisse est menée 1-0. Elle domine, sans se créer beaucoup d’occasions de but. Mais elle s’apprête à disputer ses 45 meilleures minutes depuis des années. A la 52e, Granit Xhaka récupère le ballon après une frappe contrée de Xherdan Shaqiri et égalise d’un boulet de canon dans la cage serbe. A la 90e et alors que la partie semble s’acheminer vers le nul, le cuir atterrit dans les pieds de Mario Gavranovic, qui voit partir Xherdan Shaqiri. Son ouverture est aussi parfaite que l’usage qu’en fait l’ailier de poche. La Nati met le 2-1 et neuf orteils en huitièmes de finale du tournoi. Le Tessinois de 28 ans a su saisir sa chance.
C’est ce qu’il a toujours fait au cours de sa carrière. A 18 ans, il stagnait un peu à Lugano quand l’entraîneur Vittorio Bevilacqua pense à lui pour renforcer une équipe d’Yverdon Sport qui vise alors le haut du tableau de Challenge League. Dans le Nord vaudois, le jeune homme témoigne tôt de deux caractéristiques sans doute nécessaires pour réussir à s’imposer comme attaquant au plus haut niveau: un instinct de buteur manifeste et une confiance inébranlable qui, dans le contexte de la deuxième division suisse, confine parfois à l’arrogance.
Mais sur le terrain, il fait le boulot. Il inscrit huit buts en vingt matches. Rapidement, d’autres pensent à lui donner sa chance. Xamax d’abord, où il brille. Puis Schalke 04, où il plafonne un peu, avant de passer par Mainz et Zurich. Depuis deux ans, il a audacieusement tenté de rebondir dans le peu suivi championnat croate, mais ses performances capturent l’attention. Il a été sacré champion deux années de suite, avec deux clubs différents (Rijeka puis Zagreb). Cette saison, il a marqué 24 buts et distribué huit passes décisives en 46 matches. De loin les meilleurs statistiques pour un joueur suisse à vocation offensive.
«Précision clinique»
Mais en équipe nationale, Vladimir Petkovic n’est pas homme à retirer la confiance qu’il a accordée au premier soubresaut, et Haris Seferovic compte parmi ses cadres. Mario Gavranovic impressionne à l’entraînement pendant toute la préparation en vue de la Coupe du monde. «Face au but, il est d’une précision clinique. A ce niveau, il est sans égal dans le groupe», souffle un membre du staff de la Nati en marge d’un entraînement. Mais l’intéressé doit patienter. Jusqu’à la mi-temps de ce Suisse-Serbie.
Sa performance peut-elle conduire Vladimir Petkovic à rebrasser les cartes? «Franchement, je n’en sais rien, et je n’ai pas d’influence là-dessus, dit-il. Je suis en forme, ça c’est clair. Je sors de deux saisons magnifiques. Mais moi, ce que je peux faire, c’est travailler sans relâche à l’entraînement, entretenir ma condition physique, montrer que je suis prêt. Le reste ne m’appartient pas.»
Avec sa victoire contre la Serbie, l’équipe de Suisse est en position de force pour atteindre les huitièmes de finale de la Coupe du monde. Elle jouera son dernier match dans le groupe E mercredi contre le Costa Rica. Pour la première fois, ce ne serait pas une surprise complète si Mario Gavranovic s’invitait dans le «onze» de base.