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«On fait la différence… dans le vestiaire en tout cas»
Valère Anthony Pizzirusso.

«On fait la différence… dans le vestiaire en tout cas»

17 décembre 2021

Défenseurs de formation, Iago Vazquez (25 ans) et Valère Anthony Pizzirusso (26 ans)ont régulièrement été alignés au sein de l’attaque du HC Yverdon depuis le début de la saison. Et ont tous deux fait trembler les filets adverses lors des deux derniers matches de championnat. Rencontre avant la réception de Meyrin, samedi à 18h15.

Iago Vazquez (photo du bas) et Valère Anthony Pizzirusso (photo à dr.) sortent de la même voiture, leur bonnet docker sur la tête. «C’est mon chauffeur, tout le temps», se marre le deuxième nommé. Les deux défenseurs du HC Yverdon font tous les trajets ensemble entre la région lausannoise et la patinoire d’Yverdon, ont travaillé ensemble, et se «refilent» leurs bons plans de jobs dans l’éducation – le premier est en master en enseignement spécialisé, le second éducateur dans un foyer qui accueille des ados. En gros, le duo est inséparable, même quand il s’agit d’évoluer loin du poste de prédilection de chacun.

Après des années passées à jouer en tant que défenseurs, comment vous êtes-vous retrouvés à évoluer en attaque?

V. A. P.: Le premier match où j’ai joué devant, c’était contre Saastal. Il manquait du monde, et le coach (ndlr: Martin Roh) m’avait dit le lundi à l’entraînement «tu vas jouer en attaque ce week-end, j’ai pas le choix, je n’ai personne d’autre». J’ai dit «ok, mais la dernière fois que j’ai joué devant, j’avais dix ans». Du coup, je me suis entraîné toute la semaine en attaque. J’ai ensuite de nouveau été aligné derrière, Et là, ça fait deux-trois matches que je rejoue devant. Martin a dû décider que j’étais meilleur à ce poste qu’en défense (rires). Plus sérieusement, s’il nous met en 3e ligne avec Iago, c’est pour que l’on joue défensif en attaque.

I. V.: En ce qui me concerne, Jiri (ndlr: Rambousek, ancien entraîneur de la «une» du HCY) m’avait déjà fait jouer devant il y a trois ans, et il a dit à Martin que j’étais «polyvalent». Alors cette saison, il m’a assez vite mis devant car il manquait du monde, et j’ai désormais plus l’impression de dépanner derrière les rares fois où je joue en défense, que de dépanner en attaque, puisque j’y suis quasi tout le temps! Mais comme a dit Valère, Martin nous a plusieurs fois fait venir dans son bureau pour nous demander d’assurer le job défensif avant d’essayer d’être créatifs en attaque (rires). Mais les retours qu’on a eus sont plutôt positifs, même si on n’est pas stratosphériques devant…

Vous avez tout de même inscrit chacun un but lors des deux derniers matches de championnat…

I. V.: C’était plus inattendu qu’autre chose! Les trois-quatre premières rencontres, je me suis retrouvé devant le but adverse avec des occasions nettes, et je n’avais aucune idée de comment gérer ça. Je m’en serais mieux sorti pour gérer des situations plus compliquées à la ligne bleue que de me retrouver tout seul devant le goal. C’est encore un peu en phase d’apprentissage, mais ça commence à rentrer.

V. A. P.: Cette situation me va, car j’apprends quelque chose de nouveau. C’est complètement différent que d’être en défense, j’ai l’impression de réapprendre à jouer au hockey, c’est stimulant. En plus, on se marre bien devant avec Iago!

Vous avez beau n’avoir que 25 et 26 ans, une partie de l’équipe a cinq bonnes années de moins que vous. Comment le vivez-vous?

V. A. P.: On commence à être un peu les vieux, c’est vrai. C’est intéressant d’avoir les jeunes avec nous, mais je trouve qu’il n’y a plus le même mérite que quand on jouait avec la première équipe en tant que juniors. Dans le sens où on était deux-trois jeunes et on travaillait vraiment dur pour être là, alors que maintenant, on a vraiment besoin d’avoir des M20 avec nous, car on n’est pas assez de joueurs à la «une». Donc pour certains, ce n’est pas un objectif en soit d’être à ce niveau. Et je pense qu’il y a aussi l’éducation qui a changé: nous quand on arrivait au sein du vestiaire de la première équipe, on n’osait pas parler, et il y a des mecs qui ne nous disaient pas bonjour. Alors que eux, ils sont là, ils fanfaronnent un peu. Après, on est aussi sympas avec eux, on laisse faire.

I. V.: Franchement, on a un coin de vestiaire où on a pas mal de jeunes, on les chambre mais ça n’a rien à voir avec ce que j’ai pu vivre en tant que junior avec d’autres équipes. Et pour nous, ce qui est positif, c’est qu’en évoluant dans un troisième bloc où il y a pas mal de jeunes, on a plus de responsabilités. Tu sais que c’est toi le joueur «d’expérience», et il faut bien mettre des guillemets hein (rires), de la ligne et que c’est à toi de gérer.

V. A. P.: C’est intéressant d’amener les jeunes à comprendre comment ça se passe dans le vestiaire et sur la glace, de les entourer au mieux. Aussi dans l’engagement, dans l’intensité, de leur dire «les gars, il faut pas avoir peur quand il y a quelqu’un qui vient en face, il faut juste jouer normalement». C’est ce qu’on a moins eu, nous, avec des gars qui ne nous disaient pas bonjour, qui nous hurlaient dessus.

En tant que joueurs plus expérimentés, y a-t-il une certaine frustration à concéder parfois de larges défaites parce qu’on évolue au sein d’une équipe jeune, comme samedi dernier contre Uni Neuchâtel (défaite 10-0 en National Cup)?

I. V.: Oui. Ça ne me dérange pas d’aller un samedi à Neuch’ et de perdre, si c’est sur un score de 4-3 ou 5-3. Là, on en a pris dix dans le caquelon, et à partir de six, je pense que c’était bon, on avait tous compris. Et c’est malheureux à dire, mais il y a certains jeunes qui n’avaient rien à faire sur la glace à ce moment-là. Évidemment que si on était monstre forts, il y aurait peut-être eu 10-5 avec trois goals de Valère et deux de moi, mais on n’a pas le niveau pour faire ça et on ne prétend pas le contraire. Mais en attendant, ça ne suivait pas derrière, et c’est pénible pour ceux qui se sont impliqués de s’en prendre dix.

V. A. P.: S’il y a quelque chose de frustrant, c’est bien d’aller au match en sachant d’avance que tu n’as pas de chance de gagner avec l’équipe que tu alignes. Et c’est arrivé plusieurs fois. Il y a des juniors qui méritent complètement d’être avec nous, mais quand on en aligne huit ou neuf, on sait qu’on ne va pas s’imposer. Et pourtant, ils ne font pas un mauvais match, donc tu ne peux rien leur reprocher.

I. V.: C’est la même chose que si nous, on se retrouvait contre une équipe de Ligue nationale.

Valère Anthony Pizzirusso, vous êtes probablement le joueur le plus assidu à faire du stretching après les matches. Une raison à cela?

V. A. P.: Je manque pas mal d’entraînements à cause du boulot, donc c’est un peu compliqué en match. Je n’arrive pas à respirer sur la glace, j’ai mal partout. D’où le stretching après (rires).

Iago Vazquez, il paraît que votre truc, en dehors du hockey, c’est la course. Ce ne sont pas les deux disciplines les plus compatibles, non?

I. V.: J’ai commencé après l’interruption de la saison passée, pour me remettre d’une blessure et parce que si je ne fais rien, je m’ennuie. Et avec le Covid, il n’y avait pas beaucoup de choix au niveau des sports qu’on pouvait pratiquer. Je courais avec Jonathan Ledermann, qui est gardien au HC Vallée de Joux. Il était inscrit pour le Marathon de Genève et je me suis mis à courir de plus en plus sérieusement, pour participer avec lui.

V. A. P.: Et moi, je suis allé porter la gourde (rires).

I. V.: C’est vrai, je ne peux pas lui reprocher de ne pas être venu faire le ravitaillement… C’était une belle expérience, mais factuellement, je suis beaucoup trop gros pour faire de la course à pied. Même si j’ai vu mon corps changer et que je pesais 5-6 kg de moins quand j’ai couru le marathon par rapport à mon poids de hockeyeur.

V. A. P.: Il est en forme et son cœur tient beaucoup mieux que le mien. Par contre, aux entraînements de crossfit à l’intersaison, on a vu qu’à part les jambes, il n’avait plus rien au niveau des muscles…

I. V.: D’autant plus que je n’ai aucune passion pour tout ce qui est de lever des poids, faire de la musculation.

Le HC Yverdon avait brillé lors du match aller à Meyrin (victoire 6-4), un adversaire direct pour éviter les playouts. À quoi faut-il s’attendre samedi?

V. A. P.: Ça va être un beau match, mais il faudra qu’on gère nos émotions pour les pénalités parce que Meyrin ne va pas venir pour faire semblant, on va se faire «fracasser». Mais sincèrement, si on joue comme on sait jouer en défense, qu’on est concentrés, ça va venir tout seul devant. On a bien assez de qualités pour aller marquer des buts.

I. V.: Et Valère et moi, on va essayer de marquer les deux pour le troisième match de championnat d’affilée (rires). Non mais devant on a ce qu’il faut pour marquer, des joueurs d’expérience capables de faire la différence.

V. A. P.: Tu parles de nous, là?

I. V.: Écoute, pourquoi pas… Dans le vestiaire on fait la différence en tout cas (rires).

V. A. P.: Je pense qu’on insupporte 50% des joueurs. On les fatigue.

I. V.: Mais on amène de la vie!

Muriel Ambühl