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Ils ont mis trois ans pour expulser leurs locataires
©Michel Duvoisin

Ils ont mis trois ans pour expulser leurs locataires

6 juillet 2017 | Edition N°2032

Sainte-Croix – Un couple de propriétaire a retrouvé son immeuble saccagé par une famille qui y vivait avec quelque nonante animaux.

Françoise et Franco Rossi avait rénové leur immeuble en 2014, mais lorsqu’ils l’ont retrouvé en 2017, ils ont pu tout recommencer. ©Michel Duvoisin

Françoise et Franco Rossi avait rénové leur immeuble en 2014, mais lorsqu’ils l’ont retrouvé en 2017, ils ont pu tout recommencer.

Françoise et Franco Rossi avaient décidé de mettre toutes leurs économies dans un bien immobilier qu’ils ont acheté à Sainte-Croix. Un choix qui paraissait judicieux, mais qui est vite devenu un enfer pour le couple à cause d’une famille de locataires.

Tout a commencé après que Françoise Rossi a loué un appartement à l’un des membres de sa propre famille en 2014. Cette personne a, par la suite, invité son fils, sa conjointe et leurs enfants, qui étaient alors en difficulté pour trouver un logement, à venir s’y installer. C’est là que les ennuis ont débuté, puisqu’ils sont arrivés avec une trentaine d’animaux pour vivre à huit dans un quatre pièces.

 

Deux procédures

 

«Nous avons tout de suite écrit à la gérance que nous avions mandaté pour signaler des odeurs incommodantes et, surtout, un surnombre de locataires», raconte Françoise Rossi, qui avait également entamé des démarches pour faire sortir ces personnes de son appartement. «Entre temps, la gérance avait signé un contrat de bail avec l’un des enfants de cette famille dans le studio situé au bas de l’immeuble, poursuit la propriétaire. Alors quand ils ont dû quitter l’appartement (ndlr : environ une année après leur arrivée), ils sont tous descendus dans le studio. Et c’est à ce moment-là que je me suis faite agressée physiquement pour la première fois.»

Mécontent de cette situation, le couple Rossi a donc relancé la machine pour que cette famille quitte définitivement les lieux. Mais une fois encore, cela n’a pas été simple : «Du point de vue légal, la gérance en charge du dossier a commis des erreurs, puisqu’elle n’a pas notifié les bons motifs ni dans les bons délais», précise Maître Alexa Landert, avocate mandatée par le couple Rossi pour défendre leurs intérêts dans les différentes procédures engagées contre certains membres de la famille, dont une qui a abouti à une condamnation pour voies de fait, injures et dommages à la propriété, et une autre qui est actuellement pendante.

 

Tout à rénover

 

La piscine était jonchée d’affaires, une serre avait été aménagée sur le terrain avec des poules, les fenêtres, la façade, les parties communes du bâtiment et le mobilier, tout était abîmé. ©Michel Duvoisin

La piscine était jonchée d’affaires, une serre avait été aménagée sur le terrain avec des poules, les fenêtres, la façade, les parties communes du bâtiment et le mobilier, tout était abîmé.

En outre, Françoise et Franco Rossi ont constaté de nombreux dégâts dans leur immeuble : «Il y a eu des vols d’électricité, la chaudière a été sabotée, la gouttière en cuivre a été démontée, les parties communes saccagées…, confient-ils. Tout était cassé à coup de masse. C’était de l’acharnement.» «Il y a pour des dizaines de milliers de francs», renchérit leur avocate. Je suis allée sur place et il y avait une de ces puanteurs. Il n’y a pas de mot. C’est inadmissible.»

Finalement, la justice de paix a émis un ordre d’expulsion et la famille est partie au mois de novembre 2016. «Nous avions une interdiction d’approcher notre immeuble jusqu’au mois de mars 2017 et donc nous n’avons pas pu commencer les travaux de remise en état avant cette date-là», ajoute Françoise Rossi, en soulignant le fait que le bâtiment avait été entièrement rénové en 2014. «Nous avons fait 35 voyages à la déchetterie avec notre remorque.

«Nous ne sortons pas indemne de cette affaire et nous avons perdu toutes nos économies, lâche Françoise Rossi, les larmes aux yeux. Nous n’en pouvons tellement plus que nous avons même proposé à la Commune de leur donner l’immeuble gratuitement hormis les hypothèques, mais elle n’a pas voulu.»

 

Une affaire sensible

 

Nous avons tenté de contacter la famille en question par l’intermédiaire de leur avocat, maître Marcel Paris, mais nous n’avons pas pu obtenir d’information. A nos questions, maître Paris nous a répondu : «Ce n’est pas dans l’intérêt de mes clients de s’exprimer dans les médias.» Idem pour le procureur en charge de l’affaire, Patrick Galeuchet : «C’est une affaire délicate.» Nous reviendrons sur cette affaire, lors de l’audience qui est prévue le 20 décembre prochain.

 

Un conflit de famille qui a impliqué beaucoup de monde

 

Bien que cette histoire se soit passée entre un locataire et un bailleur, plusieurs personnes ont été impliquées dans cette querelle. Et, aux premières loges, le voisinage. «J’ai vu des locataires être agressés par la famille et j’ai entendu des hurlements au milieu de la nuit», raconte un Saint-Crix.

«Vous ne pouvez pas imaginer ce que le quartier a vécu. C’était une horreur. Nous avons même signé une pétition pour qu’ils partent.»

Mais peu de personnes pouvaient agir, comme l’explique le secrétaire municipal de Sainte-Croix, Stéphane Champod : «C’était surtout une affaire de famille, donc cela relève de la sphère privée. En tant que Commune, nous n’intervenons que pour loger les personnes d’urgence en cas d’expulsion, ce qui n’a pas été nécessaire dans ce cas. Pour le reste, nous sommes démunis.»

Concernant la nonantaine d’animaux qui vivaient avec eux, la Société vaudoise de protection des animaux (SVPA) a également été impliquée, mais après l’expulsion de la famille. «C’était une situation extrêmement sensible, confie Alain Zwygart, administrateur de la SVPA. A la suite de l’ordre d’évacuation édicté par la Justice de paix, nous avons été contacté et la famille nous a volontairement remis tous ses animaux. Puis, ils ont décidé d’en garder quelques-uns, mais la plupart ont pu être replacés. Il y avait un très grand nombre de chats, de poules et quelques chiens, qui étaient tous en bonne santé.» A cause des conditions dans lesquelles vivaient la famille, le Service de protection de la Jeunesse (SPJ) est aussi venu sur place constater la situation.

«Malgré les différents échanges avec les professionnels du réseau et la famille, une mise en danger des mineurs au sens de la loi n’était pas avérée et donc le placement des enfants n’était pas nécessaire à ce moment-là, confie Christophe Bornand, chef du SPJ. Mais pour pouvoir avancer, il faut une collaboration active des parents, sans quoi nous sommes obligés de saisir la justice.»

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Christelle Maillard