Pour l’amour du baby-foot
11 juillet 2025 | texte: j.-ph. pressl-wenger photos: michel duperrexEdition N°3976
On connaissait les baby-foots artisanaux de Raphaël Mettler. Aujourd’hui, l’artisan du Balcon du Jura enchaîne son prochain dribble en ajoutant le football de rue ainsi que des ambiances sonores à ses pièces uniques.
Quand on pousse la porte de l’atelier de Raphaël Mettler, le temps suspend son cours. On est d’abord accueilli par des bruits de tests, puis des discussions, des sourires et une énergie absolument communicative. Après trente secondes dans l’ancienne menuiserie de l’avenue de France, rendue à sa première vocation après avoir abrité la Brasserie des Trois Dames, on est happé par le monde et l’imagination créative du maître des lieux. Nous sommes à peine arrivés, qu’il se lance déjà dans une démonstration à 100 à l’heure de sa nouvelle pépite: un baby-foot unique, plaqué inox en forme de véritable stade de football professionnel, dont le terrain est éclairé par des petits projecteurs montés aux quatre coins du précieux jouet. «Attends, attends, écoute! A chaque fois qu’un but est marqué, j’ai fait en sorte qu’un audio différent soit joué, il y en a douze», explique-t-il hilare à son ami Raoul Savoy, entraîneur confirmé à l’international. En effet, à chaque fois que le ballon disparaît au fond d’un des buts, un commentateur s’égosille, que ce soit en anglais, en espagnol ou encore en français. La voix du commentateur officiel de l’équipe de Suisse masculine sur la RTS, le Vaudois David Lemos , rappelle notamment la victoire aux tirs au but de la Nati face à la France en huitième de finale de l’Euro 2021 et fait immédiatement remonter toutes les émotions liées à cet exploit historique. Et force le sourire, encore.
Une envie de foot des rues
Depuis quelques années déjà, Raphaël Mettler a lâché sa passion pour la brasserie et la bière, pour se replonger dans un amour de jeunesse, longtemps cultivé. Ancien joueur de Sainte-Croix Sports, où son papa entraînait dans les années septante, il foule les terrains de 2e ligue pour ensuite mettre la compétition en sourdine. Durant un passage aux Etats-Unis en 1997, là où la Coupe du monde 1994 avait tenté d’aviver la flamme du foot «pas américain», il construit lui-même son premier baby-foot. «On était à Venice Beach, en Californie, et j’avais toujours eu envie d’en construire un, raconte-t-il. Je l’ai fait, puis je l’ai ramené avec moi lorsque je suis rentré en Suisse.» Cette relation quasi organique que Raphaël Mettler entretient avec le baby-foot a été tissée entre amis de 13 ou 14 ans, lors des après-midi et des journées de congé, à Sainte-Croix, lorsque le baby-foot remplaçait le foot. Celui que l’on joue dans la rue.
De Liverpool à l’Amérique du Sud
C’est ce football-là que Raphaël Mettler avait envie de mettre en scène dans ses créations. Il y est parvenu en s’inspirant de la folie qui entoure le sport roi en Amérique du Sud. Terrain mal plat, rugueux, inégal. Joueurs bariolés, des balles de différentes compositions, et surtout, de la musique. L’artisan du foot de table a même poussé l’inventivité jusqu’à ajouter un panier de basketball à sa création. Pour que le ballon y passe, il faut l’envoyer, via son ailier droit, dans un couloir qui la mènera jusqu’au panier. Génial! «Le prochain baby-foot, déjà en préparation, sera tourné vers le football de rue, mais en Afrique cette fois.»
«Le prochain baby-foot, déjà en préparation, sera tourné vers le football de rue, mais en Afrique cette fois.» Raphaël Mettler, constructeur de baby-foots uniques
Le football, «Raffi» comme le surnomment certains de ses amis brasseurs en Suisse allemande, a continué de le vivre devant sa télé et dans certains grands stades européens. Même s’il n’a pas encore eu la chance de visiter Anfield Road, le mythique stade de Liverpool, il a construit – et vendu –un baby-foot complètement dédié aux Reds. «J’y ai mis toutes les références du club et de la ville, détaille-t-il, toujours avec cette étincelle magnifique au fond des yeux. Les cheminées qui crachent vraiment de la fumée, le musée des Beatles avec les lumières qui s’allument, les murs de briques, tout!» Et déjà, la musique: à choix, les Beatles ou le You’ll Never Walk Alone, hymne mythique du nord de l’Angleterre. Même les rivaux d’Everton ont droit à leur petit coin autour du terrain.
Autodidacte passionné
D’abord dans le business du skate, puis dans le monde de la bière, Raphaël Mettler, à plus de 60 ans, continue de suivre et de vivre ses passions. Autodidacte, il travaille le chêne pour les pièces de structures et d’autres essences de bois pour les finitions: palissandre, érable, bois de rose, érable moucheté ou encore acajou. Tout semble possible sous les doigts de l’artiste.