Premier feu vert aux Grands-Marais
27 novembre 2024 | Texte: Jérôme Christen avec l'ATSEdition N°3840
Pour faire face à une augmentation des coûts de construction des futures infrastructures pénitentiaires de la plaine de l’Orbe, le Parlement vaudois a accepté mardi des crédits pour plus de 70 millions de francs. Un large feu vert, mais marqué par des grincements de dents.
En juin dernier, le Conseil d’Etat avait fait savoir que la facture prévisionnelle des Grand-Mais à Orbe allait passer de quelque 280 millions à 410 millions, soit 47% de hausse. Plusieurs raisons avaient été avancées: hausse du coût de la vie, nouvelles normes de sécurité, stratégie de réinsertion et conformité aux exigences du développement durable.
Examen de passage
Hier, devant le Parlement, c’était l’heure du premier examen pour le gouvernement vaudois qui demandait la bagatelle de quelque 70 millions pour ce Pôle pénitentiaire du Nord vaudois (PPNV). Soit, dans l’ordre, un crédit complémentaire de 12,6 millions pour financer les études de la future prison des Grands-Marais en une étape au lieu de deux; le but étant de pouvoir mettre cet établissement de 410 places de détention en fonction à l’horizon 2030 et de limiter les coûts opérationnels.
Le deuxième crédit débloqué par le Parlement se monte à 41,5 millions. Il est destiné à la réalisation des infrastructures communes aux bâtiments existants et futurs du Pôle pénitentiaire Nord vaudois (PPNV) à Orbe. Il s’agit notamment de financer les études et la construction «d’interfaces» entre les établissements actuels et futurs, tant en sous-sol (réseau de chauffage, électricité) qu’en surface (routes, parkings, ponts, installations énergétiques). Le troisième, de 4,3 millions, est destiné aux études de la phase 2 de ces infrastructures et le quatrième, de 10,7 millions, doit permettre d’assurer la continuité de l’exploitation du pénitencier de Bochuz, des ateliers des Etablissements de la plaine de l’Orbe et du Bois-Mermet à Lausanne, d’ici 2030.
La commission, présidée par le député de Rances Patrick Simonin, était unanime à recommander l’acceptation de ces engagements financiers. Son vote à l’unisson n’a pas empêché un large débat, tant cette question préoccupe le Parlement vaudois depuis de nombreuses années en raison d’une insuffisance notoire de places de détention. Le Conseil d’Etat s’est engagé à venir avec des propositions de diminution des coûts autant que possible tout en répondant aux exigences fédérales en matière d’incarcération. «Il ne s’agit pas de faire un projet au rabais. Les conditions de travail du personnel pénitentiaire et les conditions de détention sont aussi deux enjeux auxquels nous devons répondre », a précisé Patrick Simonin.
Vote «à l’aveugle»
Plusieurs députés dont l’Yverdonnoise Mathilde Marendaz, ont regretté devoir «voter à l’aveugle» en l’absence des résultats d’une étude externe sur la surpopulation carcérale, dont la publication n’a toujours pas été autorisée par le Conseil d’Etat. Cela fait plusieurs mois que des membres du Grand Conseil réclament ce rapport dit «Brägger» connu du Conseil d’Etat. Une communication devrait intervenir «d’ici la fin de l’année», a assuré la conseillère d’Etat Isabelle Moret.
Un coût astronomique
Si c’est cette dernière qui défendait ces projets, en tant que responsable du patrimoine, le député UDC José Durussel s’est dit stupéfait par l’absence du conseiller d’État en charge du Service pénitentiaire, Vassilis Venizelos, alors que plusieurs dizaines de millions sont en jeu. Le député de Rovray a ensuite déploré le coût astronomique d’un million par place de détention. «Nous sommes dans un pays d’opulence, cela paraît surdimensionné. Il y a sûrement des gens qui se sucrent au passage.» A la question de savoir «si le renvoi de criminels étrangers résoudrait le problème de la surpopulation carcérale», il n’a pas eu de réponse claire.
Mobilité à travailler
Le manque d’accessibilité en transports publics a été soulevé par la députée PS de Baulmes, Cendrine Cachemaille et le député Vert lausannois David Raedler, pour qui «le site est loin de la gare la plus proche, alors que les familles des détenus n’ont souvent pas les moyens d’avoir un véhicule individuel. Or le projet d’extension du PPNV va encore péjorer la situation en prolongeant le temps de marche.»
Avec la construction des Grands-Marais, qui s’ajouteront aux sites actuels de Bochuz, de la Colonie et de la Croisée, le PPNV constituera à terme l’un des plus grands sites pénitentiaires de Suisse avec 1000 places de détention et 750 collaborateurs.