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Sagenord renforce son aqueduc
Christophe Bonnet, directeur de la Sagenord, avec le plan du réseau d’approvisionnement en eau potable de la région. Photo: Michel Duperrex

Sagenord renforce son aqueduc

9 avril 2021

Le maillage et le renouvellement du réseau d’approvisionnement en eau potable avancent à grands pas.

Si, à sa création, la Sagenord avait suscité de vifs débats et quelques tensions, la société en charge de la sécurité de l’approvisionnement en eau potable, qui a son siège au Service des énergies d’Yverdon-les-Bains (SEY), déploie depuis un énorme travail afin de sécuriser la fourniture d’eau, mais aussi de renouveler les installations et d’en créer de nouvelles. Un véritable aqueduc souterrain, de quelque 14 kilomètres de longueur (celle-ci va tripler ces prochaines années), constitue l’armature d’une véritable toile d’araignée comprenant des conduites de différents diamètres, des réservoirs, et des installations de traitement et de sécurité.

Le consommateur de notre région tourne le robinet et il dispose d’une eau de qualité en tout temps. En effet, les incidents sont rarissimes, et les interruptions programmées réduites au strict nécessaire. Mais derrière ce service, il y a un énorme travail. Ne serait-ce que lorsque il faut assurer le service de grands chantiers, du type de celui de la renaturation de la Brinaz, qui imposent des contraintes techniques.

Ces derniers mois, d’importants travaux ont été réalisés autour du Mont de Chamblon, avec notamment le raccordement de Villars-sous-Champvent au grand réservoir situé sur la colline. La tranchée réalisée à cette occasion est à peine visible et la végétation printanière s’apprête à en effacer toute trace.

Et c’est justement à Chamblon que se situe le plus gros réservoir, d’une capacité de 14 000 m3, soit la consommation quotidienne de la ville d’Yverdon-les-Bains. Afin de permettre sa rénovation, ce réservoir a été mis hors service durant deux semaines au début de cette année. «Nous avons connu deux semaines délicates. Mais l’alimentation de la ville n’a jamais été interrompue. Nous n’avions que le réservoir de Beauregard (3000 m3), sur les hauts de Bellevue, pour faire tampon», explique Christophe Bonnet, directeur de la Sagenord.

Durant cette période, la ville a été alimentée en direct depuis les puits d’Onnens. Afin d’éviter des incidents, la pression a été baissée dans l’aqueduc, en laissant s’échapper un peu d’eau. Les responsables de la Sagenord ont fait le bon choix, puisque tout s’est bien passé. «On devait absolument faire ça pendant une période de faible consommation, soit avant l’été», justifie le directeur. Ce dispositif a ainsi permis de rénover les trois cuves du réservoir situé au-dessus du terrain du FC Valmont, face aux casernes.

A l’occasion de cette opération, le réservoir de Chamblon a été équipé de quatre nouveaux départs, portant leur nombre à sept.

Le maître mot dans le développement du plan directeur est la redondance. A l’instar de ce que font les compagnies électriques, il faut, quelle que soit la raison d’une coupure d’alimentation, assurer la distribution de l’eau par une autre voie. Ces bouclages sont réalisés progressivement, de même que la liaison avec les autres distributeurs, l’Association d’amenée d’eau de la Menthue, l’Association à buts multiples de la région de Grandson (ACRG), pour ne prendre que ces deux exemples.

Ces liaisons permettent en tout temps de réaliser des échanges lorsque c’est nécessaire, et de répondre aux exigences du Canton en la matière. Le temps où une commune ou un village disposant d’une source s’autogérait est pratiquement révolu.

Les exigences toujours plus sévères en matière de qualité, le chlorotalonil présent dans des sources où il n’était même pas soupçonné, imposent aux responsables de l’approvisionnement en eau de revoir leur stratégie, et de procéder à des investissements importants.
La Sagenord a ainsi lancé un appel d’offres pour les nouvelles conduites d’approvisionnement des villages de Treycovagnes, Suscévaz et Mathod. Au total, c’est un investissement de quelque 5,6 millions de francs qui va être réalisé. Le chantier pourrait être lancé au cœur de l’été. Il s’agira dans ce cas de construire 2,2 kilomètres de conduites, dont 400 mètres en forage dirigé.

Le réseau de distribution est ainsi progressivement étendu et renouvelé. Il devrait, dans un avenir plus lointain, réaliser la connexion avec celui de la région d’Orbe. Il faut, dans ce domaine comme dans d’autres, faire preuve de patience et de persévérance.

«L’eau, c’est le pétrole de l’an 2000», déclarait il y a plus de trente ans Edgar Rouge, président du groupe Henniez, alors qu’il inaugurait l’usine d’embouteillage de Saxon (VS). C’est une réalité. Ceux qui ont la maîtrise des sources tiennent à la garder. Mais dans un concept de sécurité voulu par l’Etat, ils faut qu’ils acceptent de la partager, et donc de négocier.

La Sagenord entretient de bonnes relations avec ses partenaires, et notamment avec l’Association Intercommunale du Vallon de la Baumine (AIVB), qui vient de réaliser d’importants investissements, dont le plus spectaculaire est le bâtiment qui abrite le réservoir sur le bord de la route reliant Baulmes au col de l’Aiguillon, en contrebas des sources de la Baumine. Avec cette association, le relais est établi par Champvent, qui est à la fois membre de l’AIVB et de la Sagenord.

 

Le réservoir de la Montagne en service

 

Les randonneurs et automobilistes qui s’engagent dans le vallon de la Baumine, au-dessus du village de Baulmes, ont tout de suite l’attention attirée par un bâtiment de bois à la forme originale. Il s’agit du réservoir de l’Association Intercommunale du Vallon de la Baumine (AIVB). Créée en 2017 pour assurer l’approvisionnement en eau potable par les communes de Baulmes, Vuiteboeuf et Champvent, cette association a mis en œuvre un plan directeur ambitieux, qui lui permettra non seulement de sécuriser l’alimentation des villages membres, mais aussi de fournir de l’eau à ses partenaires. Car l’AIVB dispose de ressources importantes et de qualité.

«Nous avons une production assez conséquente et le but est de la mettre à disposition», explique Olivier Mettraux, municipal à Baulmes et président du comité de direction de l’AIVB.
Les travaux de construction du réservoir de la Montagne, débutés l’an dernier, sont pratiquement achevés. «Nous avons mis le réservoir en service le 3 mars dernier. Nous sommes en train de former le surveillant du réseau et deux employés communaux», explique le président du comité de direction.

Avec la nouvelle conduite mise en place par la Sagenord entre Villars-sous-Champvent et Chamblon, l’alimentation de ce dernier village, mais aussi celle du réseau de défense incendie de la place d’armes, sont désormais sécurisées.

Il faut relever qu’à l’occasion de la construction du nouveau réservoir, ainsi que du remplacement de la conduite le reliant aux captages supérieurs, les fouilles ont permis à Romande Energie et à Travys d’y placer leur nouveau réseau d’alimentation électrique. «On y a passé tous les services», relève Olivier Mettraux.

Le président du comité de direction de l’AIVB souligne qu’un autre réservoir de quelque 1600 m3 sera construit aux Prés-Doux, où un nouveau puits a été aménagé.

 

Le raccordement avec le réseau de l’AIVB à bout touchant

 

Le maillage du réseau d’eau potable à l’ouest est en passe de franchir une étape importante. «Nous sommes à quelques mètres et une vanne du raccordement avec le réseau de l’Association Intercommunale du Vallon de la Baumine (AIVB)», explique Pierre Dessemontet, municipal yverdonnois en charge du Service des énergies (SEY) et de la Sagenord. Ce raccordement a été rendu possible par la nouvelle conduite construite entre Villars-sous-Champvent et le réservoir de Chamblon.

La Sagenord négocie désormais les conditions financières des transactions portant sur l’eau. Le municipal yverdonnois relève que l’une des faiblesses de l’approvisionnement de la ville réside dans le faible nombre de sources: les puits d’Onnens et la source du Cosseau, au pied de la colline de Chamblon, qui fournissent respectivement 60% et 40% de l’eau consommée en ville. Il est donc nécessaire de créer des redondances, et cela passe par des accords avec les associations voisines.

Avec la problématique du chlorothalonil, la source du Cosseau, qui ne peut être exploitée lors des périodes de crues en raison de la turbidité de l’eau, reprend une importance première. Car elle n’est pas touchée, ou en tout cas pas au-dessus des normes, par ce polluant résultant des engrais. «On va engager plusieurs millions de francs pour pouvoir l’exploiter toute l’année. C’est prévu dans le plan d’investissement», explique Pierre Dessemontet.

La Sagenord prévoit également de créer une redondance à l’est, en reliant, avec une nouvelle conduite, le réservoir de Chamblon à Belmont. Cela permettra également de sécuriser l’approvisionnement de Gressy. «Ce village est en bout de conduite. Si une rupture venait à se produire du côté de Sermuz, il faudrait alors approvisionner Gressy avec un camion-citerne», relève le municipal.

Enfin, à plus long terme, et pour répondre aux directives cantonales en la matière, il faudra relier le réseau de la Sagenord à celui d’Orbe, avec une conduite de plusieurs kilomètres.

Isidore Raposo