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Sauvetage in extremis
© Michel Duperrex

Sauvetage in extremis

22 juin 2023

La Fondation Sauvetage Faons Vaud protège gratuitement chaque printemps des centaines de petits cervidés dans la région. Les bénévoles s’inquiètent du peu d’appels ainsi que du peu de faons retrouvés dans les champs cette année. Reportage.

Le foin est aussi haut que le soleil dans la région et depuis quelques semaines déjà, on peut observer les faucheuses qui s’activent dans tous les sens. Mais sous ces hautes herbes bientôt transformées en balles rondes, se cachent des petits êtres, fraîchement nés. Les faons sont cachés par leur mère dans les champs et n’en bougent pas d’une oreille. S’ils se protègent ainsi des prédateurs, immobiles, ils deviennent la proie involontaire des faucheuses. Se joignant au bal des machines agricoles, les quelques 25 drones de la Fondation Sauvetage Faons Vaud ratissent les parcelles des agriculteurs qui l’ont contactée en quête de jeunes chevreuils.

Parmi eux, le 15 juin dernier, jour de fauche conséquent pour la Suisse, Boris Bron (photo en bas), a démarré sa journée à 3 heures du matin. Un plan des parcelles, un drone à capteurs thermiques et il part en quête des petits cervidés à travers les champs du Nord vaudois. Dès qu’une zone de chaleur est repérée, il suit sa trace puis dépose une caisse sur le faon, accompagné d’un drapeau. Ainsi, l’agriculteur pourra l’éviter durant la fauche.

En ce jour de mi-juin, ce ne sont pas moins de 100 parcelles qui ont été contrôlées sur le district, pour onze faons sauvés. «Il y a plus de parcelles qu’en 2022 mais beaucoup moins de faons que d’habitude dans la région! Ce n’est vraiment pas assez», s’étonne Boris Bron qui termine gentiment sa journée sur le coup des 9 heures, avec peu de faons sous caisses. Selon lui, deux explications sont possibles: l’augmentation des prédateurs et notamment du lynx, ainsi que la taille des faons qui, pour une bonne partie, ont désormais la capacité de s’en aller. Les routes et la chasse pourraient également être un facteur. «Si on ne préserve pas un minimum ces animaux dans certains secteurs, il n’y en aura plus.»

Alors qu’il remballe son drone et que le soleil commence déjà à taper sur Baulmes, le professionnel de la prise de vue aérienne reçoit un appel d’un collègue pilote. Direction Agiez pour une découverte des plus surprenantes en cette période. «Là, on a trouvé un bébé faon d’environ 20 centimètres. Il était difficile à trouver, on ne pensait pas que c’était ça, il est tellement petit», explique Raphaël Ottonin (photo en haut). «On n’y croyait pas ce matin.» Une jolie opération qui a permis d’épargner le petit animal et à l’agriculteur de faucher sereinement quelques minutes plus tard.

Pour l’agriculteur, ce service coûte seulement un coup de téléphone la veille de la fauche. Il permet par contre de sauver quelques milliers d’animaux chaque année. Mais les appels ont eu du mal à arriver ce début de saison. Malgré des courriers et les tentatives de sensibilisation. «Nous avons reçu deux fois moins d’appels que d’habitude dans notre région», regrette Boris Bron. «La météo a rendu les choses compliquées, on sait que ce n’est pas simple pour les agriculteurs, mais on ne les empêche pas de faucher. Il faut une certaine flexibilité de leur part aussi!»

Si la Fondation Sauvetage Faons Vaud vit grâce aux dons privés et de minces subventions malgré sa large expansion, son but reste le même qu’à sa création: «Sauver les faons de la faucheuse et faire changer la mentalité, de ceux qui assurent qu’il n’y a pas de faons sur leur parcelles ou qu’ils les voient eux-mêmes depuis le tracteur», regrette Boris Bron qui voit également le nombre de parcelles diminuer. «Broyer un faon sans avertir le garde-chasse devrait être amendable.»

Malgré tout, la deuxième partie de saison a été meilleure pour les membres, engagés depuis environ un mois pour de nombreuses et longues matinées. Le tout, avant d’enchaîner avec leurs propres obligations professionnelles et personnelles. Ce à quoi certains nouveaux bénévoles ne résistent pas toujours sur la durée. «Pour nous, c’est assez fatigant! Se lever aussi tôt, ce n’est jamais facile. Mais le bilan est tout de même positif.»

 

 

En chiffres

 

300. Soit le nombre de parcelles survolées (50 faons sauvés) sur le canton le 15 juin. Dont 100 parcelles sur le Nord vaudois (11 faons sauvés).

200 membres (environ) sont actifs sur Vaud, dont 50 pilotes qui utilisent les 25 drones à disposition.

264 faons ont été sauvés en 2022 dans le canton. 246 chevreuils adultes et 37 lièvres ont également été priés de quitter les prairies avant la fauche.