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Savina Bugnon, une dame au grand coeur
Savina Bugnon. © Michel Duperrex

Savina Bugnon, une dame au grand coeur

24 mars 2021

L’ancienne directrice de l’EMS Bugnon aura passé sa vie au service et à l’écoute des autres. Ce qui est toujours le cas aujourd’hui, à 93 ans.

Si le prix Nobel de l’empathie existait, Savina Bugnon pourrait sans aucun doute le décrocher. Ce super-pouvoir, celui qui permet de mieux vivre ensemble, est inné chez l’ancienne directrice de l’EMS Bugnon à Yvonand. Aujourd’hui à la retraite, elle est encore extrêmement présente et active au sein de l’établissement qu’elle a dirigé durant de nombreuses années. Sa capacité d’écoute, son dévouement, sa façon de ressentir les émotions des autres, voilà ce qui caractérise cette dame au grand cœur, aujourd’hui âgée de 93 ans.

Savina Bugnon, quelle a été votre enfance?

Native de la province de Sondrio, en Italie, je suis la troisième d’une fratrie de six enfants. J’y ai passé une enfance très heureuse jusqu’à la fin de ma scolarité. Une famille très unie où j’adorais coudre, chanter et m’occuper des animaux de la ferme de mes parents.

Pourquoi êtes-vous venue en Suisse?

En 1947, un nouveau bureau s’est ouvert à Sondrio. Tenu par des Zurichois, il proposait un accompagnement et du travail en Suisse. Comme à l’époque il n’y avait pas trop d’avenir dans mon village, j’ai décidé de quitter la campagne de mon enfance pour me lancer dans cette nouvelle aventure. Ma première année en terre helvétique, je l’ai passée dans une famille à Zurich. Ensuite, je suis allée travailler à Niédens, dans une ferme, pour m’occuper de la cuisine. J’y ai d’ailleurs fêté mes vingt ans. Puis, l’année suivante, je me suis rendue à Yvonand, dans l’établissement de Maurice Bugnon créé en 1935. J’y ai fait un peu de tout, de la cuisine à l’intendance. J’ai tout de suite adoré m’occuper des personnes âgées. Elles ont immédiatement représenté pour moi une grande, une très grande famille.

Comment êtes-vous devenue Madame Bugnon?

Je ne suis restée qu’une année à Yvonand. J’ai ensuite trouvé un emploi à Yverdon, au Café du Centre. La restauration était aussi l’une de mes grandes passions. Maurice Bugnon, qui avait malheureusement perdu sa femme, venait souvent me rendre visite. Il m’a très vite proposé de revenir travailler avec lui. Peu de temps après, en 1954, nous nous sommes mariés. C’était certainement là mon destin.

Quel est votre emploi du temps aujourd’hui?

C’est simple. Je passe la plus grande partie de la journée à faire une petite visite à tous les résidents de l’établissement. Si un jour ils ne me voient pas, ils s’inquiètent et demandent après moi. C’est exactement comme dans une grande famille très unie.

Comment envisagez-vous l’avenir des EMS?

Le plus important pour moi est de rester proche des gens. Nous sommes des humains et nous avons tous besoin de chaleur et de compréhension. Un sourire, un petit mot, une oreille attentive, voilà les ingrédients nécessaires pour travailler au mieux, à mon avis, dans ce domaine. Bien sûr sans mettre de côté l’importance de l’accompagnement médical. Je désire remercier tous les membres de ma grande famille qui m’ont donné tant de joie.

 

L’empathie de Savina Bugnon est un bel exemple à suivre

 

Savina Bugnon se souvient que jadis, dans les années quarante, une journée ne coûtait que deux francs par personne logée dans un établissement médico-social. Certes, la moyenne d’âge était bien plus jeune qu’aujourd’hui, et chacun et chacune participait activement aux travaux de bon fonctionnement de la maison. Aujourd’hui, les choses ont bien changé. Les personnes du quatrième âge sont de plus en plus nombreuses et les coûts de la santé ont explosé.

Mais ce qui n’a pas changé, c’est l’enthousiasme et la joie de vivre que l’ex-directrice des lieux transmet quotidiennement à tous les membres de sa grande famille. Elle connaît la vie et le passé de chaque résident. Et cela sans relâche, depuis plus de soixante ans.

Des anecdotes, Savina en a plein la tête. Entre autre, elle évoque les nombreuses visites d’une inspectrice cantonale il y a fort longtemps, et qui lui avait dit: «Le jour venu, c’est ici que je souhaiterais venir.» Elle a tenu parole et fait partie de la grande famille depuis quelques années.

Peu avant son décès, son mari, Maurice, lui a dit: «Tant que tu peux, continue!» Et c’est ce qu’elle a fait! Madame Bugnon est restée à la tête de l’EMS jusqu’en 2014, avant de passer les commandes, le cœur serré, à la Fondation Saphir.

Depuis lors, Savina ne s’occupe plus de l’administration de l’établissement, mais n’a néanmoins pas abandonné son travail de cœur: prendre soin des résidents. Elle se sent toujours bien dans son joli appartement qu’elle occupe depuis le début. Et tant que la santé le lui permettra, elle compte bien continuer les visites quotidiennes à tous les membres de sa grande famille. L’empathie ne s’apprend pas, c’est un don. Et Savina le possède.

Michel Duperrex