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Sébastien Cala, un Combier au coeur des Mondiaux de Falun

3 mars 2015

Ski nordique – Ouvreur sur le tremplin de saut à skis avec son ami d’enfance Rémi Français, le sauteur de 26 ans a vécu douze jours dans la folie sportive qui s’est emparée de la petite ville suédoise. Récit.

Le sauteur du Brassus Sébastien Cala (à gauche) et son ami Rémy Français ont officié comme ouvreurs à Falun, en Suède, durant la grand-messe du ski nordique. Photo fournie par Sébastien Cala

Le sauteur du Brassus Sébastien Cala (à gauche) et son ami Rémy Français ont officié comme ouvreurs à Falun, en Suède, durant la grand-messe du ski nordique.

Anders Fannemel est sur le petit tremplin des Mondiaux de Falun. Par deux fois, la lumière rouge oblige le Norvégien, récent auteur d’un saut à 251,5 mètres, à se relever. Les conditions ne sont pas bonnes. Il faut envoyer un ouvreur: Sébastien Cala. «Si la lumière devient verte, c’est que c’est sautable», se dit-il alors, avant de s’élancer à la place du recordman du monde, pour évacuer son appréhension.

Accompagné de son ami d’enfance Rémi Français, le Combier vient de passer douze jours inoubliables en Suède, porté par la foule, par la ferveur des innombrables spectateurs norvégiens amassés au bas du tremplin, et qui ont permis à leurs idoles de s’élancer «à domicile». «Quand ils ont beaucoup attendu et qu’ils voient un ouvreur s’installer sur la barre, alors les gens crient de joie. Des moments géniaux», commente Sébastien Cala.

Tendu sur le grand tremplin

Sébastien Cala a beaucoup volé à Falun, en compagnie de la mascotte des Mondiaux, le hibou nommé Bubo. Photos fournie par Sébastien Cala

Sébastien Cala a beaucoup volé à Falun, en compagnie de la mascotte des Mondiaux, le hibou nommé Bubo.

Des instants magiques de ce type, il en a vécu des dizaines durant son séjour. L’expérience a été incroyable, mais aussi épuisante. «J’étais un peu tendu lors de mon premier saut sur le grand tremplin, car je n’en avait plus fait depuis quatre ans sur un 120 mètres, alors qu’il soufflait vraiment beaucoup. Je n’avais jamais été autant balloté durant mon élan», raconte-t-il, revenu dimanche soir chez lui, au Brassus. Puis de poursuivre: «On devait toujours être prêt, par n’importe quelles conditions, à attendre en haut de la tour, dans le vent. C’était ça, le plus dur.» Le deuxième jour, par exemple, les ouvreurs ont officié durant quatorze heures d’affilée, avec juste une petit pause à midi.

Attention au passage des élans norvégiens, inarrêtables sur les pistes de fond de Falun. Photo fournie par Sébastien Cala

Attention au passage des élans norvégiens, inarrêtables
sur les pistes de fond de Falun.

Des efforts consentis avec un réel plaisir par Sébastien Cala. Lui et Rémi Français ont pu se rendre en Suède grâce aux contacts de l’amie du second, qui habite près de Falun, et à l’ancien sauteur helvético-suédois Sandro Gelmini, membre de l’organisation. Les autres ouvreurs étaient de jeunes locaux -la discipline se porte mal en Suède- et des sauteurs des pays voisins, la Finlande et la Norvège. «L’un des Norvégiens avait 56 ans! C’était génial de le voir, même s’il n’avait plus les jambes de sa jeunesse. Tous les ans, il est ouvreur à Oslo», glisse le Combier, qui a sauté une bonne quarantaine de fois.

Sur place, lorsqu’il en avait le temps, Sébastien Cala a pu goûter, au sein du public, à l’atmosphère de folie des courses de ski de fond et du combiné. «Tu y participes, même», lance-t-il, reconnaissant avoir perdu sa voix à plusieurs reprises, notamment lors du sprint du relais en combiné remporté par les Français. «Dans le stade, il y avait encore plus de bruit, plus d’ambiance qu’à la Tournée des quatre tremplins, où je suis allé cet hiver, ou qu’à un match de foot. Surtout quand Charlotte Kalla a remporté le skiathlon», se souvient-il.

Les athlètes dans leur bulle

Le fan club de Dario Cologna n’avait pas lésiné sur les moyens pour se faire entendre. Photo fournie par Sébastien Cala

Le fan club de Dario Cologna n’avait pas lésiné sur les moyens pour se faire entendre.

Durant la deuxième semaine et lors des week-ends, il y avait du monde partout dans la ville, tous grimés aux couleurs de leur nation de coeur. «On n’aborde pas de la même manière un tel événement en tant qu’ouvreur. Je pense que je garderai plus de bons souvenirs que lors des mes propres compétitions», souligne Sébastien Cala, qui a participé à des Mondiaux juniors et à des Universiades durant sa carrière sportive.

A Falun, il a retrouvé plusieurs amis avec qui il a pu discuter un peu. «Mais quand tu es hors du truc, tu te rends compte à quel point les athlètes sont dans leur bulle. Ils ne se rendent pas compte de tout ce qu’il y autour, affirme-t-il. En haut du tremplin, lorsque se jouent les médailles, la tension est impressionnante. Alors, tu tiens bien tes skis pour ne pas faire le moindre bruit!»

Reçu par un peuple accueillant, Sébastien Cala a passé douze jours de rêve, au coeur d’un des paradis du ski nordique, avec son pote Rémi Français. «On a commencé ensemble et, ainsi, c’est un peu comme si on terminait ensemble.»

 

Ce qu’il a pensé des sauteurs suisses

Killian Peier (SC Vallée de Joux): «Il peut être content de ses Mondiaux. Se qualifier en deuxième manche sur le grand tremplin à 19 ans, c’est fort.»

Simon Ammann: «On a pu voir qu’il a changé sa technique de saut, et il a encore de la peine à la maîtriser avec régularité. Mais je l’ai trouvé très relax.»

Gregor Deschwanden: «Il était déçu de ses performances, car il avait montré pouvoir aller un peu plus loin à l’entraînement. S’il continue ainsi, on pourrait bien le voir sur des podiums dans une année ou deux.»

Luca Egloff: «Avec son peu d’expérience, c’est bien d’avoir franchi le cap des deux qualifications.»

Gabriel Karlen: «C’est un excellent voleur, il ne se pose jamais quand il a le vent de face. Et comme les conditions étaient souvent venteuses à Falun, c’est certainement pour cela que le staff a tenté le coup de poker de le faire sauter par équipes.»

 

Carte de visite

Nom: Sébastien Cala.

Age: 26 ans.

Nationalités: suisse et française.

Domicile: Le Brassus.

Situation professionnelle: étudiant à l’Université de Lausanne en histoire et géographie, et correspondant pour La Région.

Carrière en saut à skis: Il saute depuis tout jeune sous la houlette de son grand-père entraîneur. Il a fait partie des Cadres C de Swiss-Ski. Il a pris part à des Mondiaux juniors, à une manche de Coupe du monde, ainsi qu’aux Universiades de Harbin (Chine), en 2009, sous les couleurs de l’équipe de France. Il a mis fin à sa carrière il y a quatre ans, mais continue de sauter pour le plaisir, ainsi qu’en tant qu’ouvreur à Engelberg et à Chaux-Neuve (F).

 

Manuel Gremion