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Ses négligences ont coûté la vie de son apprenti à La Russille
© Carole Alkabes

Ses négligences ont coûté la vie de son apprenti à La Russille

9 novembre 2020

En septembre 2016, un jeune en formation de 17 ans avait chuté mortellement sur un chantier mal sécurisé. Son employeur, un entrepreneur de 78 ans, est prévenu d’homicide par négligence. Il a comparu lundi devant le Tribunal d’arrondissement à Yverdon (VD) mais estime n’avoir aucune responsabilité dans le drame.

Le décès accidentel est survenu sur un chantier à La Russille (VD), le 26 septembre 2016. Le septuagénaire encourt jusqu’à trois ans de prison pour le seul chef d’accusation d’homicide par négligence. Il comparait également pour violation des règles de l’art de construire et supprimer ou omettre d’installer des appareils protecteurs.

Quatre ans après les faits, il récuse encore avoir une quelconque responsabilité dans ce drame et estime ne rien avoir à se reprocher en termes de sécurité sur ce chantier. Et ce alors même qu’il était sur les lieux au moment du drame et responsable de la formation et de la surveillance de ses apprentis.

« Dès le départ, j’avais demandé à mon apprenti de rester en bas », avance mollement l’accusé sans convaincre ses juges. D’autant que plusieurs témoignages disent au contraire que c’est l’accusé qui avait ordonné à son jeune employé de monter.

Une chute de plus de 5 mètres

Lui et le disparu étaient parents éloignés. Le jeune homme de 17 ans suivait un apprentissage d’aide-constructeur métallique dans l’entreprise. Une lourde grille se trouvant sous ses pieds avait glissé et l’avait entrainé dans sa chute alors qu’il était au troisième étage d’un escalier métallique extérieur en cours de montage. Un pont roulant aurait dû être utilisé pour cette manœuvre.

L’apprenti a chuté de 5,78 mètres de haut. Sa tête a lourdement heurté le sol. Son décès a été constaté par les secours dépêchés sur place une vingtaine de minutes plus tard.

Il y aura un mort

Ce terrible accident aurait pu être évité. L’acte d’accusation rappelle en effet que plus tôt le même jour, un autre employé avait failli chuter d’une manière similaire. Après s’être rattrapé de justesse, ce dernier avait dit à l’entrepreneur qu’il était « inadmissible de travailler dans des conditions pareilles et qu’un jour il y aurait un mort ».

« Cet ouvrier n’avait rien à faire là. Il ne m’a jamais mis en garde. Il était chez nous depuis peu de temps », se borne à commenter l’accusé. Lequel affirme que dans cette affaire « la Suva a dit des choses complètement erronées ».

Rien de changé

Lorsque le Président du Tribunal lui rappelle que ses ouvriers ne portaient pas de casque ni de harnais sur le chantier, le vieil homme assène le plus sérieusement du monde : « le casque, c’est pas une réussite, c’est comme la ceinture de sécurité en voiture, parfois elle vous sauve et parfois elle vous tue ».

« Avez-vous changé quelque chose suite à cet accident ? » interroge le procureur. L’accusé répond « On est toujours aux petits soins pour nos employés… On aurait changé quoi ? En plus de 50 ans, on n’a jamais eu d’accident ! », affirme-t-il.

A propos de sa victime, l’homme affirme : « Tous les jours, je souffre et je pense à lui. Je l’aimais énormément ! ».

Un grand vide

La sœur et la mère du disparu assistent à l’audience. « Mon fils était un jeune plein de joie qui respectait les adultes et les directives. Il adorait aller travailler. Il était positif et bon vivant. Il a laissé un grand vide », a expliqué cette dernière, des sanglots dans la voix.

« Je suis scandalisée par l’attitude et les propos de son ancien patron dont on attend toujours des excuses ! Notre vie de famille et nos santés ont été détruites par tout ça », a-t-elle ajouté. Le procès se poursuit.

ATS