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Son truc  à elle, c’est le lancer d’hydrante
La sergent-chef peaufine sa technique grâce à la borne d’entraînement du SDIS Nord vaudois. © CArole Alkabes

Son truc à elle, c’est le lancer d’hydrante

3 juin 2019 | Edition N°2510

Le sapeur-pompier Fabienne Manzi est championne suisse de lancer de bouche d’incendie. Une discipline qu’elle pratique avec ses collègues du SDIS.

Il n’y a aucune consigne, si ce n’est celle de se tenir dans la zone de lancement, et de viser l’aire de réception. à chacun sa méthode,  donc, pour lancer une borne hydrante. Chez les sapeurs-pompiers du Service défense incendie et secours (SDIS) du Nord vaudois, il n’y en a qu’une seule. «On a essayé différentes techniques, avec succès ou non. Finalement, on s’est tous approprié la même: on prend de l’élan et on la lance par-dessus notre tête», explique le sergent-chef Fabienne Manzi, du détachement de premier secours d’Yvonand. Elle sait de quoi elle parle. Le 25 mai dernier, à Bâle, cette Tapa-Sabllia a terminé à la première place, chez les dames, du Championnat suisse de lancer d’hydrante. La délégation nord-vaudoise, qui était composée de trois femmes et de six hommes, n’a pas démérité, tant s’en faut, puisque Chantal Reymond s’est classée juste derrière Fabienne Manzi, et qu’Alexandre Bruand a terminé deuxième, sur 19 messieurs.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, les soldats du feu du SDIS Nord vaudois s’adonnent au lancer de bouche d’incendie depuis 2015. Cette année-là, leur commandant avait sondé ses troupes pour savoir si certains étaient intéressés à participer à la deuxième édition du concours national, organisé par la Fédération suisse des sapeurs-pompiers et vonRoll hydro. Six personnes s’étaient manifestées, et Fabienne Manzi était déjà de la partie. «J’aime bien ce genre de défis insolites», souligne cette enseignante de 41 ans. Les pompiers volontaires avaient tâtonné, avant d’ajuster leurs tirs. Désormais, leur technique est bien rôdée. S’ils travaillent leur condition physique séparément, ils se retrouvent, deux mois avant le championnat, pour sept à huit séances d’entraînement à la plage. «Des fois, on doit paraître un peu louches quand on est tous ensemble en train de lancer une borne hydrante dans le sable», sourit la championne suisse. Au-delà du volet insolite de l’exercice, l’aventure contribue à renforcer l’esprit de corps, indispensable chez les soldats du feu.

En quatre participations – elle a zappé celle de 2017 – Fabienne Manzi a toujours terminé en tête du classement. Il faut dire que les deux premières années, il n’y avait qu’une ou deux femmes en lice. Mais le niveau s’est corsé, cette année, puisque huit autres dames étaient au rendez-vous. Or elle reste, pour le moment, la seule à dépasser quatre mètres. Le 25 mai, elle a été sacrée grâce à un jet à 4,40 mètres, alors que son record est fixé à 4,80 mètres. Chez les hommes, le champion suisse 2019 a envoyé son hydrante à 7,50 mètres. Habituée aux courses pédestres et membre de la Société de gymnastique de Grandson, la Tapa-Sabllia a une bonne condition physique. Mais elle a également un atout dans la manche, elle qui a fait des concours d’athlétisme: «Mon point fort, c’est le lancer du boulet», dévoile-t-elle. Sauf qu’entre un projectile de cinq kilos et une borne de 23 kilos, il y a une sacrée différence. à voir Fabienne Manzi manier la borne d’entraînement avec autant d’aisance que de dextérité, on pourrait presque en douter.

Le rebouteux n’est pas loin

«Il faut quand même avoir une bonne condition physique, à la base, et une certaine musculature du dos, avertit toutefois la championne suisse. Après deux mois d’entraînement, on est bons pour aller chez le rebouteux, car ça grince un peu!» Cette maman de deux garçons s’est engagée comme pompier volontaire en 2001, par envie de s’investir pour la collectivité et pour s’intégrer dans sa commune, lorsqu’elle a déménagé à Yvonand. Grâce au lancer d’hydrante, elle a trouvé le moyen de partager bien plus que des missions sur le terrain et des exercices avec ses collègues du SDIS. Et sa famille s’est accommodée de ce hobby pour le moins étonnant: «Ils me soutiennent dans mes entraînements et je pense que mes enfants sont assez contents de dire que leur maman est championne suisse de lancer d’hydrante.» Et son mari? «Il se tient à carreau, lance Fabienne Manzi dans un éclat de rire. Mais il est assez costaud, il peut riposter!»

Caroline Gebhard