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Trafiquant de voitures ou de coke?
Le Nigérian qui comparait depuis hier devant la Cour criminelle a été arrêté à Yverdon-les-Bains le 27 août 2017. © Michel Duperrex

Trafiquant de voitures ou de coke?

13 novembre 2018 | Edition N°2373

Un Nigérian arrêté en août 2017 avec de la cocaïne clame son innocence. Il dénonce un complot politique fomenté par ses ennemis.

Audience extrêmement pénible que celle qui s’est déroulée hier au Tribunal criminel de la Broye et du Nord vaudois. Un Nigérian âgé d’une cinquantaine d’années comparaissait pour blanchiment d’argent qualifié et infraction grave à la Loi fédérale sur les stupéfiants. L’homme ne parle que le dialecte de son pays ou l’anglais. Une traductrice avait donc été mandatée pour officier toute la journée. Seulement, la pauvre ne connaît que très mal le français et peine à traduire. L’audience, qui aurait pu se terminer à midi, continue aujourd’hui avec le réquisitoire et les plaidoiries.

A tour de rôle, ce sont son avocate ou le président qui ont officié comme traducteurs. Le prévenu a eu largement le temps, entre deux questions, de réfléchir à ses réponses… En un mot comme en cent, alors qu’il a été arrêté le 27 août 2017 à Yverdon-les-Bains en possession de cocaïne dans sa voiture, il est innocent. Il vendait des voitures qu’il achetait en Suisse et amenait en Afrique. Point barre.

Il arrosait la Suisse

Pourtant, lors de l’enquête pénale, les écoutes téléphoniques rétroactives, les extractions de données de ses téléphones portables et de son GPS, ont démontré qu’il a livré au moins entre 8380 grammes et 9670 grammes de drogue, lui rapportant une somme évaluée à plus de 50 000 francs. Domicilié en Allemagne, il passait la douane à Bâle et arrosait sur son passage toutes les villes importantes de Suisse, notamment Lausanne, Yverdon-les-Bains, Vevey, Renens et le Mont-sur-Lausanne en ce qui concerne le canton de Vaud. Son trafic a duré au moins d’avril à août 2017.

Lors de son interpellation, il a été retrouvé dans sa voiture deux sachets totalisant 400 grammes bruts qu’il devait encore livrer à un trafiquant non identitifé, contre une somme allant de 2 400 francs à 2 800 francs. Son profil ADN et celui d’un complice ont été retrouvés sur les deux paquets contenant les fingers de cocaïne. Mais comme il n’a eu de cesse de le répéter, «tout ceci est faux». Il a du reste présenté des excuses à la procureure, à qui il aurait menti lors de ses auditions. Il prétend qu’il est victime d’une manoeuvre politique, car en qualité de membre du Parti démocratique du peuple, au Nigéria, il devait se présenter à des élections locales. «Si mes adversaires m’avaient tué, ça aurait fait un tollé dans la région, car je suis très connu dans mon pays. En plaçant à mon insu de la cocaïne dans ma voiture, ils me mettent en très mauvaise position. Cela fait vingt ans que je vis en Europe. Avec mon salaire de chauffeur poids lourd je gagnais 3000 euros. C’est bien assez! Pourquoi prendre des risques en trafiquant de la drogue?», a-t-il lancé à la Cour. C’est bien là la question.

Dominique Suter