La Région ouvre ses colonnes à Carmen Tanner pour une tribune libre. La conseillère municipale défend la culture yverdonnoise, dont elle est la cheffe de dicastère.
La nouvelle est tombée mardi soir: les lumières de nos lieux et événements culturels et festifs vont s’éteindre encore, laissant nos souvenirs heureux nourrir notre patience recluse. Et pourtant cette activité vive et riche de notre cité thermale est encore bien présente. Deux médias en chantaient encore de fraîches louanges : le téléjournal de la RTS qui a passé trois reportages ces dernières semaines sur nos activités culturelles, tandis que le Courrier International (rien que ça) de la semaine passée relatait notre exposition multisite et pluridisciplinaire «Rock me baby» dont le rayonnement ne cesse d’impressionner.
C’est vrai, notre culture yverdonnoise est reconnue, car belle, créative, touchant plusieurs domaines, accessible à toutes et tous. Son panel de couleurs est bien là: la Schubertiade en 2017 ou la Fête des yodleurs en 2018; le succès de La Dérivée; nos festivals chéris Les Numerik Games et Les Jeux du Castrum; une bibliothèque qui compte près de 150’000 visiteurs par année; des théâtres qui nourrissent une émission entière de «La puce à l’oreille»; un CACY, notre centre d’art, lieu d’expérimentation pour artistes mais aussi écoliers; les Brandons, notre patrimoine immatériel, ragaillardi par un nouveau comité; une pluralité d’offres allant du jazz (Nova Jazz) à l’improvisation théâtrale (avec notamment le «Shink» festival); un conservatoire de musique qui forme la relève; une fanfare qui a fêté ses 100 ans; l’Amalgame qui reçoit une reconnaissance du Pour-cent culturel Migros; etc, etc. Comme le disait Souchon «un mieux, un rêve, un cheval» (Foule sentimentale).
Ma crainte, c’est celle de voir ce joyeux élan culturel balayé par un ciel ravagé de lendemains économiquement difficiles. Et le risque est gros car cette crise touche un domaine fragile, peu protégé, mal payé, comptant sur des bénévoles dévoués mais fatigués et un mécénat délicat. C’est que cette épidémie jette une lumière crue sur notre société et ses limites. Alors, s’il nous faut panser et maintenir à flot ce qui peut l’être pendant la crise, il nous faut déjà travailler sur l’après. Car nous aurons besoin de lieux pour nous retrouver, parce que le quotidien ne peut se limiter au travail et à l’espace restreint, parce que notre économie de demain devra se baser sur des valeurs fortes comme le partage et le bien-être, parce que les lieux de culture pourront donner du sens à ce que nous avons vécu et nous redonner des espaces de liberté. Pour cela il nous faut maintenant serrer les dents dans ce confinement, entre-temps lâcher les crocs (électoraux) pour certains, demain s’unir autour et pour le bien d’une offre culturelle toujours aussi colorée et une sociabilité régénérée.
Carmen Tanner, municipale à Yverdon-les-Bains