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Un artiste se réalise malgré la maladie

13 mars 2015

Grandson – Le temps de dire merci, le chansonnier, Pierre Dominique Scheder est de retour dans le Nord vaudois. Rencontre.

Chansonnier, poète, écrivain, Pierre Dominique Scheder a également co-fondé le Groupe romand d’accueil et d’action psychiatrique. © Michel Duperrex

Chansonnier, poète, écrivain, Pierre Dominique Scheder a également co-fondé le Groupe romand d’accueil et d’action psychiatrique.

C’est débordant de bonheur, que le chansonnier, poète, écrivain et psychologue, à l’accent vaudois, parle du Nord vaudois et plus particulièrement de Villars-Burquin, où il a passé son enfance. «C’est un village qui m’est cher et qui nourrit mon oeuvre», indique Pierre Dominique Scheder, qui vit dorénavant à Chexbres. Le «retraité AI» profite, toutefois, de l’exposition «Merci Tschudi», dont il a écrit les textes, à Grandson (voir ci-dessous), pour revenir plusieurs fois par semaine dans la région qui l’a vu grandir.

«L’AI m’a payé pour être malade. L’AVS me paye pour ne rien foutre, a lancé Pierre Dominique Scheder, lors de l’inauguration de l’exposition. Mais c’est dans cet espace sabbatique obligé que j’ai donné et que je donne, je crois, le meilleur de moi-même.»

Les textes et les photos présentés, qui sont à découvrir jusqu’au dimanche 22 mars, ont pour objectif d’être un outil de réflexion poétique autour du travail et du handicap. Mais c’est également l’occasion de dire merci à Hans-Peter Tschudi. Car c’est sous l’impulsion de l’ancien Conseiller fédéral que les assurances sociales se sont développées, celles-ci mêmes qui ont permis à Pierre Dominique Scheder de renaître. Car derrière ce bonhomme chaleureux, à l’oeil rieur, qui n’hésite pas à sauter sur son piano pour illustrer son discours, se cache un parcours de vie tumultueux.

Le chansonnier romand

Après une enfance campagnarde dans une famille qui apprécie particulièrement la musique, et ses premiers succès sur la scène, Pierre Dominique Scheder décide de suivre des études à l’Université de Genève. «Je ne me voyais pas devenir musicien. J’avais envie de d’étudier une science et je me suis approché de la psychologie». Mais le «virus de la guitare» demeure. Il fait une entrée triomphale dans le monde de la musique romande, en 1973, avec Le Déménagement. «Avec cette chanson, j’étais un rapeur avant l’heure», rigole-t-il en s’élançant sur son piano pour jouer un extrait de ce morceau plein d’humour, dont la mélodie vous reste dans la tête. A la fin des années septante, le musicien remplit les cabarets théâtres, remporte des concours et partage la scène avec Jean Villard Gilles, Jacques Higelin ou Jacques de Bronckart.

Incorrigible hiver

Dans les années huitante, bien décidé à vivre de sa musique, le destin de Pierre Dominique Scheder bascule dans la maladie et la dépression. On le diagnostique schizophrène. «Ça aurait été sympa de vivre une grande carrière de musicien, mais j’aurai loupé quelque chose. Car cette période m’a permis de découvrir la vraie valeur des choses.»

Ces années difficiles, qu’il appelle «Incorigible hiver» (du même nom que son album sortit en 1984) passe et il renoue définitivement avec le monde de la musique avec un nouveau disc sorti en 1988, après avoir chanté sur la grande scène du Paléo. «C’est l’année de ma renaissance, où j’ai retrouvé mes amis et ma famille», affirme-t-il.

Une année avant de remonter sur les planches, il fonde, avec Madeleine Pont, le Groupe romand d’accueil et d’action psychiatrique (GRAAP) -qui offre aujourd’hui cinq lieux d’accueil aux personnes concernées par la maladie psychique, dont un à Yverdon-les-Bains-, où il a travaillé comme animateur jusqu’à sa retraite. «Notre but était de changer l’image de la folie, explique-t-il. Nous avons simplement commencé dans un petit bistrot à Lausanne.» En plus d’animer des ateliers et de chanter, Pierre Dominique Scheder se met à l’écriture et donne des cours dans plusieurs hautes écoles.

Contrairement à ce qu’il dit, le retraité ne «fout» pas rien pour autant… Pierre Dominique Scheder continue à écrire, à chanter des messages de bonheur, tout en gardant un oeil critique et en proposant des pistes de réflexion sur notre monde et face aux formes de violence qui nous entourent. De plus, il s’occupe de sa fille de 8 ans, «l’un des cadeaux que m’a offerts la vie, tient-il à préciser. L’AI m’a permis de travailler à 50% et de choisir mon travail, la retraite me permet de me réaliser», conclut-il.

 

Une exposition à Grandson pour dire merci

L’exposition «Merci Tschudi», mise en place par Joseph Martin, Lucien Reber et Pierre Dominique Scheder est à découvrir à l’Espace Photo «Photo-Nord», à la rue Basse 28, à Grandson, aujourd’hui, dimanche, ainsi que les 19, 20 et 22 mars entre 15h et 18h. Pierre Dominique Scheder se fera une joie d’accueillir les visiteurs à la galerie.

En prolongement de cette exposition, Pro Senectute Vaud propose, lundi 23 mars à 14h30, au Caveau du Croch’Pied, à la rue Basse 28 à Grandson, une conférence sur les problèmes budgétaires que peuvent rencontrer les retraités.

Muriel Aubert