Président du FC Croy, Benjamin Grünenfelder est aussi le dernier buteur du club, officiellement du moins. Il s’en est allé dans sa 33e année.
«Je vais révéler un petit secret: ce but, c’est moi qui l’ai marqué, confie Aaron Montenegro, l’un des meilleurs amis de Benjamin Grünenfelder. L’arbitre s’est trompé en l’attribuant à Benjamin. Mais c’est un joli clin d’œil, il voulait tellement marquer un but pour le dernier match du club (ndlr: le FC Croy fusionne avec Vaulion pour créer le FC Vallon du Nozon). Même quand il était dans les buts (ndlr: Benjamin Grünenfelder a terminé le match en tant que gardien), il voulait sortir pour aller marquer. Quand on a vu que son nom était indiqué en tant que buteur, il m’a demandé si j’avais suggéré à l’arbitre de le mettre. J’ai répondu par la négative, mais que je le lui offrais volontiers. On a rigolé, et c’est resté comme cela.»
Emporté à 32 ans dans un accident de buggy, début juillet en France, Benjamin Grünenfelder est donc officiellement le dernier buteur du club, son club, «sa grande famille», insiste Christine Fusco, fiancée du défunt et joueuse de l’équipe féminine. Il a tout donné pour le FC Croy. Joueur depuis 2007, il avait repris la présidence depuis trois ans. «Personne ne semblait vouloir se présenter pour le poste et lui ne voulait pas laisser tomber le club», explique Florian Diaz, son petit frère, lui aussi joueur du FC Croy.
Benjamin Grünenfelder a marqué les esprits durant son mandat: «Une membre du comité depuis quinze ans m’a confié que c’était le meilleur président qu’elle avait vu passer ou, du moins, celui qui s’investissait le plus.» C’est vrai que le trentenaire n’hésitait pas à se rendre au terrain à des heures improbables s’il y avait un souci, même minime. Comme les fois où, lorsque la pelouse était arrosée de nuit en raison de la chaleur, il s’y rendait à 3 heures du matin pour déplacer les jets.
Bosseur, «Benyamin», comme l’appelaient ses parents d’origine bâloise, travaillait à son compte en tant que forestier-bûcheron dans le vallon du Nozon. Installé à Vaulion depuis l’arrivée de la famille Grünenfelder en 1996, il habitait dans un appartement de la résidence familiale avec Aaron Montenegro. «Il nous arrivait de discuter pendant des heures sur la terrasse, quitte à finir assez tard. Mais le lendemain matin, il était toujours debout vers 5 ou 6 heures pour aller travailler.» «Benny» adorait la nature. Troisième enfant d’une fratrie de quatre, il jouait souvent dehors avec son petit frère Florian. «Quand on était petits, dès qu’on pouvait, on allait faire des cabanes en forêt.»
Benjamin Grünenfelder avait fait la connaissance de sa «femme comme il n’y pas d’homme», comme il aimait bien le dire, il y a quinze ans. «On pouvait parler de tout, on ne se prenait jamais la tête, on rigolait souvent. Un vrai couple d’enfants», s’émeut Christine Fusco. Fusionnel, le couple avait mis du temps pour se rendre compte de l’apparente évidence. «Quand Gordito (ndlr: surnom affectueux que lui donnait Aaron) nous a annoncé qu’ils s’étaient mis ensemble, puis qu’ils s’étaient fiancés, je lui ai répondu que tout le monde le savait avant lui, tellement l’évidence de leur couple sautait aux yeux.»
Benjamin Grünenfelder laissera le souvenir d’un homme bon vivant, toujours bienveillant et prêt à aider les autres dans toutes les situations. «Avec lui, il n’y avait jamais de problème, que des solutions. C’était le roi des bons types», conclut Aaron Montenegro.
Frank Rohrbasser