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Un élu condamné
La condamnation pénale d’un élu communal a agité les partis yverdonnois. DR

Un élu condamné

4 décembre 2024 | Textes: Jérôme Christen
Edition N°3845

Un conseiller communal yverdonnois a été reconnu coupable d’escroquerie à l’assurance sociale. L’affaire a mis en ébullition les partis politiques du landerneau, mais certains plus vite que d’autres. Les Verts ignoraient que c’était un des leurs jusqu’à ce que La Région contacte leurs coprésidents la semaine dernière.

L’affaire a été révélée par 24heures dans son édition du 8 novembre qui n’a toutefois pas mentionné son nom. En mai dernier, Olivier Di Prinzio avait été reconnu coupable d’escroquerie envers le Centre social régional par le Ministère public de l’arrondissement du Nord vaudois et condamné à une peine de 90 jours-amende avec sursis pendant trois ans.   Comme le prévoit la procédure, il a fait appel de ce jugement auprès du Tribunal de police devant lequel il a comparu le 8 novembre.

L’élu a admis la tromperie, mais conteste une intention délibérée de vouloir s’enrichir. Dénoncés par la Direction générale de la cohésion sociale du Canton de Vaud, les faits s’étendent sur trois périodes entre 2008 et 2016. Le prévenu et son épouse ont bénéficié des prestations du revenu d’insertion (RI) alors qu’ils n’y avaient pas droit. Le prévenu avait déjà été condamné en 2018 pour une affaire en lien avec l’assurance-chômage.

Revenus et fortune cachés

Le couple a caché l’existence de dix comptes bancaires et postaux sur lesquels se trouvait une fortune totale de plus de 300 000 francs. Il a également omis de déclarer des revenus obtenus par des opérations de boursicotage liées à cette fortune.

Au tribunal, le sexagénaire a expliqué qu’il ne considérait pas ces sommes comme des revenus, mais comme des plus-values. Le montant du litige atteint quelque 14 000 francs.

Condamnation confirmée

Ces explications n’ont pas convaincu les juges. En date du 17 novembre, le Tribunal d’arrondissement du Nord vaudois a confirmé la peine prononcée par le Ministère public. Il a toutefois allégé la valeur des jours-amende de 50 à 30 francs et diminué l’amende de 1100 à 600 francs dont il devra s’acquitter dans tous les cas.

Pas de remise en question

Les juges ont estimé que sa culpabilité était importante en raison de son absence de remise en question et de sa condamnation pour des faits similaires qui auraient dû le conduire à comprendre l’étendue de sa faute. La Cour considère «qu’il a profité du système social en connaissance de cause puisqu’il disposait d’une bonne connaissance du système juridique». Le prévenu, ingénieur ETS, ingénieur en système de communication, a en effet complété, au fil des années, sa formation par un MBA en gestion d’entreprise, un bachelor en droit et un master en droit informatique. En 2022, il était même candidat au Grand Conseil vaudois.

Ulcéré par ce verdict

Olivier Di Prinzio est ulcéré par ce verdict.  Convaincu de son bon droit, il a décidé de faire recours au Tribunal cantonal, toujours sans avocat, comme en première instance. «C’est l’ORP qui m’a orienté vers le RI  et si j’avais su que je n’y avais pas droit, je n’aurais bien sûr jamais fait cette démarche.  D’autant qu’il s’agissait d’une avance (prêt) qui serait remboursée par une autre assurance sociale. L’avantage, c’était son taux zéro, mais j’aurais très bien pu m’en passer. Pour que l’on puisse me reprocher une escroquerie, il faut qu’il y ait astuce. Or tel n’est pas le cas, je n’ai en aucun cas voulu m’enrichir ou abuser qui que ce soit.»


Que vont faire les Verts?

A la question de savoir s’il envisage de démissionner de sa fonction de conseiller communal, il n’en voit pas la raison: «Je suis actuellement présumé innocent. Par ailleurs, cette affaire n’a aucun lien avec ma fonction de Conseil communal, que je n’exerce que depuis deux ans. Je n’étais donc pas en fonction au moment des faits.» Légalement, il n’en est d’ailleurs pas contraint. Il n’existe pas de procédure de destitution dans le canton de Vaud. La question est exclusivement morale et personnelle. Son parti peut l’encourager à le faire, au pire l’exclure, mais son siège lui appartient.

Contacté la semaine dernière, Martin Loos, coprésident du groupe des Verts, se montre plutôt embarrassé: «Vous me confirmez que c’est lui, nous n’en n’étions pas certains», explique-t-il. Les Verts n’ont pas imaginé que ce cas pouvait émaner de leurs propres rangs. Tant et si bien qu’ils disent s’être préoccupés que récemment de savoir si tel pouvait être le cas. Cela signifie aussi qu’Olivier Di Prinzio n’a jamais évoqué avec eux ni les reproches qui lui étaient faits, ni sa comparution, ni son jugement: «Je n’en voyais pas la raison, je n’ai rien à me reprocher», justifie-t-il.

Martin Loos explique que le comité va prochainement se réunir pour décider de la suite à donner à cette affaire.


Des réactions plus rapides

Au sein des autres partis, Pascale Fischer, présidente du groupe PS affirme que sa formation, après avoir appris qu’un élu communal était jugé pour escroquerie, a aussitôt réagi et entrepris des démarches pour savoir si l’accusé pouvait émaner de ses rangs. Cette hypothèse a très vite pu être écartée. Il en est de même au sein des Vert’libéraux selon leur président Pierre-Henri Meystre et à l’UDC, selon la présidente de sa section locale, Sophie Pistoia. Le PLR a, lui,  attendu que le jugement tombe avant de s’en préoccuper. Au vu du profil évoqué, son président Maximilien Bernhard, confie qu’il y aurait pu avoir un doute sur un élu PLR, mais qu’il a été vite écarté. Finalement, seuls les Verts ont tardé à réagir, estimant qu’il n’y avait pas péril en la demeure.